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Claude, prête-moi ta plume

par Claude Fèvre

Cher Claude, j’espère que tu ne m’en voudras pas de venir te parler un moment… juste comme ça, avec un peu de timidité tout de même. C’est vrai, je suis un peu chavirée de t’écrire, à toi que « les mots ont pris pour une caravane, avec tes airs de désert. » Mais il faut que je te dise qu’hier c’était un peu avec tes chansons pour repères que je suis venue au Bijou, à Toulouse. J’étais de ceux que l’on avait conviés pour auditionner les candidats au prix d’écriture qui porte ton nom. Que veux-tu, il faut t’y faire.  On n’en finit pas de t’honorer dans la ville rose. Une femme prénommée Cécile (tu vois de qui je parle ?) a même participé au jury de présélection et je sais qu’elle est là, discrète, dans la salle.  C’est stupide, sans doute mais sa présence rajoute à mon trouble. Je suis assise aux côtés de quelques personnes dont la réputation n’est plus à faire dans notre région (autre motif d’émotion… rends-toi compte, Claude, Festiv’Art aux côtés d’Alors Chante, de Pause Guitare, du Chaînon Manquant…) pour écouter, regarder ces jeunes auteurs compositeurs interprètes de chanson en Midi-Pyrénées âgées de 15 à 25 ans. Ils seront huit jeunes pousses pour quatre lauréats, un en catégorie 15/18 ans et trois en catégorie 18/25, pour gagner de quoi  donner un joli coup de pouce à leur rêve. Nous serons une dizaine à en décider réunis par l’association Rue de Siam qui préside aussi à la carrière d’une certain Yvan Cujious. Tu connais bien, n’est ce pas ?
Le Bijou est décidément le lieu idéal pour accueillir ces auditions : un écrin pour la chanson, avec le confort de son et de lumières comme on peut en rêver. Le savent-ils vraiment ces jeunes qui vont chacun leur tour interpréter trois chansons ? Savent-ils que c’est un privilège ?
Bien sûr, Claude, je suis surtout venue te parler de ce qui s’est passé sur cette scène. Parmi nous certains diront qu’ils ont entendu des « pains » regrettables, que certaines voix n’étaient pas bien placées… que ces jeunes s’inspiraient d’une chanson aujourd’hui dépassée. Mais, je souhaite avant tout te dire que ces « mots tissant l’émotion »,  ces « mots de prédilection », ces « mots bruissant comme des rameaux. » ces mots que tu as tant chéris, nous ont quelque fois visités et parfois même charmés. Et c’est bien à toi que je songeais alors en donnant mon avis. Il m’est arrivé même de penser que leur goût des mots les conduisait parfois presque à l’hermétisme… me laissant personnellement sur la rive… Dommage, je n’ai parfois pas pu embarquer !
Il  ne m’est pas possible de te  donner aujourd’hui le résultat de ce concours, encore tenu secret, mais je t’offre un petit montage de citations, juste pour le plaisir de l’assemblage des mots…
Quelle étrange idée de s’exposer sur une scène éclairée (Cécile Cardinot) /Je ne veux pas attendre la lune, puisqu’elle ne m’attend pas (les Pas des Rives) / Mon esprit s’éveille soudain et je danse dans les nues (Ma Pauvre Lucette) / Mais après tout , ce n’est qu’un bijou, ce n’est qu’une parure, un p’tit peu d’aventure (Hugo Croiset)/ J’avais mes rêves et mes espoirs, mais je suis fier d’être moi (Funky Kiwi) / Les étoiles rigolent tout en filant le temps (Saturne et Pluton) Je m’offre aux heures perdues…(Lucas Solal)  Je t’aime pas-sionnément-songe (Suzanne)/
En 2009, un trio a remporté ce prix, il se nomme Pauvre Martin (photo ci-dessus)… aujourd’hui, ces trois copains, originaires du Lot ont fait leur bout de chemin. On les a vus aux Découvertes d’Alors Chante, sur la scène mythique des Trois Baudets…Les  lauréats  2012 seront-ils promis à un avenir ? Claude, peut-être ton nom sera-t-il à nouveau un précieux parrainage ?

Les sites du Prix d’écriture Claude-Nougaro, du Bijou, de Rue de Siam prod et du groupe Pauvre Martin.

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9 Réponses à Claude, prête-moi ta plume

  1. Laffaille Gilbert 5 avril 2012 à 8 h 49 min

    Bel article! un seul bémol à mon goût : « une chanson aujourd’hui dépassée »… Rimes, Toulouse, Quatre boules de cuir, Le jazz et la java, Le cinéma, Assez! je ne continue pas la liste. Les grandes chansons avec de grands textes et de belles musiques ne peuvent être dépassées : elles sont éternelles.

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  2. Delorme 5 avril 2012 à 11 h 57 min

    Les chansons éternelles?

    « Moi je dis que la loi cruelle de l’art est que les êtres meurent et que nous-mêmes mourions en épuisant toutes les souffrances, pour que pousse l’herbe non de l’oubli mais de la vie éternelle, l’herbe drue des œuvres fécondes, sur laquelle les générations viendront faire gaîment, sans souci de ceux qui dorment en dessous, leur « déjeuner sur l’herbe ».

    « La durée éternelle n’est pas plus promise aux œuvres qu’aux hommes »

    Marcel Proust

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  3. Gérard DEBARD 5 avril 2012 à 14 h 04 min

    Si l’éternité a pour moi les limites de lma propre vie (je ne crois pas à d’autres formes d’éternité !) alors je suis d’accord avec Gilbert Laffaille. Il me semble qu’il faudrait être bougrement présomptueux ou mégalo pour imaginer le destin des oeuvres d’art au delà de ses propres limites. Souvenons-nous qu’au moment de sa mort, Van Gogh n’avait pas vendu une seule toile et qu’aujourd’hui, comme l’a dit Léo, « il se vend mieux que du cochon » !
    Gérard DEBARD

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  4. CCS 5 avril 2012 à 16 h 04 min

    @ Gérard Debard : ce ne serait pas plutôt ramener l’éternité aux limites de sa propre vie qui serait mégalo ? Ou pour le moins égocentré ? Enfin, quand même : « si l’éternité à pour moi les limites de ma propre vie »… quelle drôle d’idée. Ça ne veut rien dire ! Et je suis d’accord avec Delorme (ou Proust ou les deux) : la seule façon pour une œuvre d’art de toucher à l’éternité (disons de l’effleurer), c’est par sa fonction d’inspiratrice et de terreau d’œuvres à venir ; qui la supplanteront, la dépasseront mais en garderont quelque-part le gène.

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  5. FESTIV'ART 5 avril 2012 à 16 h 19 min

    Cher Gilbert …après toutes ces belles envolées qui me ravissent … juste une précision : le personne qui regrettait que les jeunes s’inspirent d’une chanson « dépassée  » ne faisait pas allusion aux chansons de Claude Nougaro…je ne sais pas exactement d’ailleurs à quoi elle pensait… elle évoquait peut-être la musique du groupe un peu plus rock , ou bien l’accordéon un tantinet nostalgique d’un autre groupe…et que moi, j’aimais bien d’ailleurs …Elle soulignait qu’il y avait peu d’originalité.

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  6. danielemes 5 avril 2012 à 17 h 59 min

    Très bien, Pauvre Martin . Hervé Suhubiette et les quatre musiciens de Pulcinella ont aussi revisité, réinventé Nougaro : » Récréation Nougaro » en jonglant avec les mots et les musiques . Ces nouvelles couleurs musicales auraient plu à ce magicien des mots ..

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  7. FESTIV'ART 5 avril 2012 à 18 h 15 min

    @danielemes: tout à fait d’accord, j’ai rédigé un article sur Hervé Suhubiette et ses recréations Nougaro..Ici même début mars …Oui, Claude aurait sans aucun doute beaucoup aimé. Comme il aurait aimé cette jeunesse qui continue la longue histoire de cette « exception française  » qu’est notre chanson. Elle a encore de beaux jours devant elle, pour peu que l’aspirant puise aux racines des étonnants trésors que nous écoutons encore… pour mieux les dépasser, les surpasser, oui, gageons !

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  8. Delorme 6 avril 2012 à 13 h 42 min

    Je ne crois pas que Gérard soit mégalo, peut-être voulait-il dire que l’idée de l’éternité n’est qu’une hypothèse tout à fait subjective, et juger certaines choses comme dignes de l’éternité n’est qu’une manière d’affirmer nos goûts, de les imaginer comme plus grands que nous, ce qui n’est sans doute qu’une des nombreuses manières d’échapper à notre propre temporalité et la rendre supportable.

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  9. CCS 6 avril 2012 à 19 h 22 min

    Je ne sais pas ce que voulait dire Gérard – peut-être simplement une manière de s’opposer à l’idée religieuse de l’éternité ? – , et la raison est un outil bien dérisoire pour aborder une telle notion. Pour la signification du fait de juger les choses éternelles, il est fort possible que vous ayez raison. Ce qui ne change rien à la temporalité propre des choses en question.

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