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Muz’Nouch, touche-à-tout (avec brio)

3700409810817Selon leur propre dico, un « muz’nouch » serait « un punk, fan de Django Reinhardt qui aurait appris le tango avec Jacques Brel à Bucarest. » Dit comme ça, ça met en condition, ça prédispose à l’écoute. De ce deuxième album après celui d’il y a neuf ans, Mon p’tit tapin. Ce quatuor bas-normand (de Caen) n’encombre donc pas les bacs, dommage car ça vaut l’écoute. Il y a tant de groupes qui additionnent leurs instruments et font dans le festif sans passer par un élémentaire stage d’écriture de textes que celui-ci, sans être exceptionnel, est remarquable, au sens qu’il doit être remarqué.

Comme ils parlent très bien d’eux-mêmes, poursuivons : « Ici, pas de faux-semblant ni de gêne mal placée, pas de langue de bois ni de détours aseptisés, pas d’interdiction de clopes ni de consommation limitée d’alcool… Ici, on valse, on swingue, on se laisse porter dans la vraie vie faite de sang, de chair, de sueur et d’odeurs. »

C’est costaud, repu de vers nourris des mots du quotidien, en v.o. du franc-parler d’origine : en quelque sorte un franc-chanter. Qui d’ailleurs, sur ce nouvel opus, commence mal avec T’es morte : une défunte qui hante et chante la mémoire de son fils. Ça jette un froid, c’est radical (« T’es morte, t’entends ? Bordel ! J’te dis qu’t’es morte ! ») au moins autant que le titre suivant (Les jouets d’con) déplaira aux enfants. Parfois, leurs mots appellent les baisers (Oh… ta bouche) ou grillent les poumons (Gaston et sa cibiche), déambulent chez les clodos (« C’est quand même bien embarrassant / Tous ces vilains qui tendent la main / ça pue, ça traîne, c’est pas jojo / Des trottoirs aux quais du métro »), se bourrent de médocs et de tranquillisants… C’est une chanson en plans serrés, douce mais terrible focale, pellicule sensible qui fixe la vie, toute terrible qu’elle puisse être, et les gens ; la portraite sans fard mais avec belle humanité.

Muz’Nouch tient tant de ces groupes très en vogue de rock festif jazz manouche ska que du Grand orchestre du Splendid. D’ailleurs, ça l’est : splendide ! La personnalité de ce quatuor (Valéry Debowski en parolier de la plupart des titres et chanteur, Nicolas Bordes à l’accordéon, Gary Grandin à la guitare et Hugues Letort à la contrebasse, un grand orchestre, j’insiste, à eux seuls, avec sur ce disque quelques collaborations musicales parfois très cuivrées, un joli duo aussi avec Sarah Auvray) est rare évidence, tant qu’on le ne confondra pas longtemps avec ses confrères. C’est une chanson qui a du cœur et de la cuisse, une rare intelligence et d’la fesse, même mal torchée. Faites fête à cette chanson-là : elle vous le rendra.

Muz’Nouch, T’es morte, Metakagoule/(rue stendhal) 2013. Le site des Muz’Nouch, c’est ici

 

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