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Roujan 2014 : la femme conjuguée au pluriel

Galim sur la scène des Anartistes (photo Etienne)

Galim sur la scène des Anartistes (photos Etienne)

Qui donc ose chanter que « le pluriel ne vaut rien… » ? Nous sommes à Roujan, entre Béziers et Pézenas, petite commune qui semblerait endormie s’il n’y avait l’Assoc Thaumate, sa salle des Anartistes et son festival « Femme plurielle »…

Les Anartistes, NosEnchanteurs y avait consacré il y a peu un papier suite à sa fermeture d’autorité par la maréchaussée. On se savait alors tout à fait pourquoi. Ce fut simplement un excès de zèle de jeunes pandores, jeunes coqs voulant prouver leur virilité gendarmesque, à suspecter et traquer le moindre signe de vie, la moindre supposée menace à l’ordre établi ! Vous pensez, un lieu où on est heureux, où on chante le poing levé en entonnant L’Internationale, où à défaut d’être tous gauchers on vote tous à gauche, pas celle molle qui préside et légifère, non, la vraie : celle couillue, sensible et talentueuse qui chante et appelle des jours meilleurs. Donc, la salle fut fermée, le temps de solutionner cet ubuesque embrouillamini. Cognes et cons à la fois, vous dis-je.

C’est dire si la chanson des Anartistes ne sait rien de la mièvreté. La poésie ici est engagement, qui plus est dans la beauté.

On pourrait rédiger mille articles pour tenter de relater l’exceptionnelle convivialité de ce festival hors normes, hors subventions, hors tout. Mais pile dans la bonheur. Vous parler de tout ces artistes plasticiens, caricaturistes, qui exposent dedans et dehors, vous entretenir de tous ces comédiens, ces musiciens qui arrivent…

Limitons pour aujourd’hui notre propos aux chanteuses. Au nombre de quatre hier. Tout est bon chez elles, y’a rien à jeter.

Sabine Drabovitch et Michel Tayeb

Sabine Drabovitch et Michel Taïeb

A NosEnchanteurs, on connait Sabine Drabowitch, aux vers puissants, d’une force d’évocation peu commune. Elle est comme Kerouac qu’elle chante, sur les routes de la vie. De l’amour immortel aussi. Ses chanson sont comme tableaux mouvants, émouvants, que traversent biches et sangliers. Et des passants qui « se ramassent à la pelle / dans les ruelles. » Chez elle la poésie n’est pas là que pour faire beau, et cette chanson sur les sdf est un des moments forts (il y en a plein d’autres) de ce récital maîtrisé de bout en bout,, avec à ses côtés un Michel Taïeb brillant, à la guitare comme à la voix, qui fait chorus avec le chromatique de cette touchante artiste qu’est Drabowitch. D’une vois oscillant entre Amélie les crayons et Barbara, elle a su imposer son chant dans des conditions pas faciles, bar ouvert en cette salle aussi grande que le Limonaire : ses vers supplantaient sans mal les verres, s’entrechoquant pareillement.

Nous ne connaissions pas Galim. Au bout de son set, on la conserve précieusement. D’un timbre et d’une façon de chanter très proche de Melissmell* (certains trouvent en elle les gènes d’un Mano Solo). Galim, c’est une chanson faite de blessures, de plaies ouvertes et de couteaux qui les remuent, de douleurs et d’incommunicabilité. Son chant est remarquable, alliant puissance et colères, évoquant sans fard des « bouts de [sa] vie pas toujours cools. » Seule en scène, avec sa guitare et de petits instruments, avec ses samples utilisés ni trop ni trop peu, ses sons ainsi générés qui mis bout à bout font comme symphonie, Galim gagne notre admiration qui va bien au-delà de son cercle de fans. Les organisateurs seraient bien inspirés de signer avec elle.

Francesca Solleville : faut-il encore vous la présenter ?

Francesca Solleville : faut-il encore vous la présenter ?

Nous reparlerons dans un prochain billet de Fantine Leprest. Et, pour celui-ci, disons le triomphe de celle qui chante le poing levé depuis… Parlons de Francesca Solleville, cœur et corps battant, fatiguée l’après-midi, radieuse le soir en scène, mieux que ça même. Ferrat, Pitiot, Debronckart, Dautin, Nazim Hikmet, Brua, Aragon, Le Forestier…. la crème des auteurs présidait à ce récital sans fausse note, édifiant, bouleversant, révolutionnant, émouvant… A l’intime de Sarment (de Leprest), elle fait se succéder l’irrésistible et drôle Femme de marin de Dimey, au Papa titubant de François Morel elle enchaîne L’homme qui tient encore debout de Dautin. Pleins et déliés de chansons, avec subtilité, avec délicatesse et détermination, Francesca a encore une fois confirmé son statut dans la chanson : en haut, tout en haut. Il y a en elle une idée de ce que peut être l’Everest.

 

* Le concert de Melissmell prévu demain soir à Femme plurielle est annulé (pour des raisons de santé), remplacé par From & Ziel.

Le site de Galim ; celui de Sabine Drabowitch ; celui de Francesca Solleville ; celui des Anartistes.

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4 Réponses à Roujan 2014 : la femme conjuguée au pluriel

  1. Robinsonne Chanson 7 juin 2014 à 15 h 44 min

    Bises Sylvie Roblin, Joëlle Bailleux et toute l’équipe des Anartistes où nous avons eu le bonheur d’être reçus il y a 15 jours !

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  2. Danièle Sala 7 juin 2014 à 16 h 20 min

    Différentes, mais avec en commun les mêmes révoltes, les mêmes espoirs, et le même idéal partagé . Je découvre aussi Galim . Une belle conjugaison de femmes plurielles , et un lieu de résistance à défendre et à protéger .

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  3. catherine Laugier 7 juin 2014 à 16 h 41 min

    Michel, et vous autres Hommes, prenez l’habitude de ne pas employer le terme « couillu » pour qualifier les gens qui en ont (de l’énergie et de l’inspiration).
    Ces dames suffiraient à prouver s’il en était besoin que le cerveau et le cœur ne se trouvent pas dans cette partie de votre anatomie Messieurs, que l’on peut apprécier par ailleurs pour d’autres raisons…:-)

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  4. Patrick Engel 10 juin 2014 à 14 h 55 min

    Catherine, vous me l’enlevez de la bouche…
    Dans le domaine de la chanson aussi, il serait temps d’intégrer enfin que le talent n’a pas de sexe, et qu’une femme peut être aussi douée, ou aussi peu douée, il n’y a pas de raison, qu’un homme. Halte au machisme, évitons l’ovaire-dose !

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