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Vaison hanté : Brassens, Brassens, Brassens, Brassens

Dans les couloirs du festival (photos Michel Trihoreau)

Dans les couloirs du festival (photos Michel Trihoreau)

Il a fallu qu’un jour un fan, pas seulement à cause du prénom ou des initiales, prenne l’initiative d’organiser dans cette jolie petite ville de Vaison-la-Romaine un festival dédié à Tonton Georges pour que, presque un quart de siècle plus tard, la fête continue. Georges Boulard peut être fier d’avoir eu cette belle idée. Il a peu à peu cédé l’organisation et la programmation à Jean-Marc Dermesropian, mais l’esprit est le même ; qui s’en plaindrait ?

Un tel festival demande en effet un respect, pour ne pas dire une fidélité, aux valeurs que le poète a placées dans son œuvre. Bien sûr on ne chante pas que ses chansons, il ne faut pas se gaver des meilleurs mets, mais elles sont bien présentes, reprises, enluminées, habitées, accommodées, actualisées par des artistes choisis.

Vous n’y rencontrerez pas les balourds, les fesse-mathieux, les paltoquets, ni les bobèches, les foutriquets, ni les pimbêches, mais plutôt ceux et celles qui n’ayant pas d’idéal sacro-saint se borne(nt) à ne pas trop emmerder (leurs) voisins, qu’ils soient médiatiquement reconnus ou simples croque-notes, ce sont des modestes. Répartis sur les neuf jours du festival, le répertoire du Sétois a fleuri sur les lèvres de Jacky Evrard, le sympathique chanteur belge, sur celles du groupe poitevin Sale Petit Bonhomme, celles de Serge Ménard qui l’a harmonieusement croisé avec des textes de Pierre Desproges et celles, polyglottes, de Manuel Hernandez. On l’a encore entraperçu dans la prestation d’Alain Laurent et parmi les chansons de Patachou interprétées par Anne-Marie Brun et même à la fin de la soirée humoristique de Pierre Douglas.

Deux spectacles ont toutefois fait l’unanimité pour le public.

Bruno Granier

Bruno Granier

Il n’était pas vraiment nécessaire à Bruno Granier d’être le petit-cousin du Grand Chêne pour le chanter en toute légitimité. Il interprète magnifiquement les chansons de son parent, fidèlement, avec même quelques intonations dans la voix ; héritage génétique sans doute. On sait que le talent n’est pas héréditaire et sa réussite est bien le fruit de son travail ajouté à ses dons naturels. L’originalité vient du traitement musical. Entouré de l’excellent Philippe Lafon aux guitares et mandoline et de Laurent Clain à la contrebasse, Bruno Granier tire le meilleur des richesses mélodiques parfois napolitaines et d’un swing métissé manouche aux accords les plus alambiqués que recèle la soi-disant « pompe » stupidement décriée par les béotiens malveillants. En revanche, les esprits éclairés ont bien senti la présence bienveillante de Django dans cette fête à cordes.

Jean-Félix Lalanne

Jean-Félix Lalanne

Jean-Félix Lalanne, dont on connait les prestigieuses compétences musicales, a inauguré pour le festival de Vaison son nouveau spectacle autour des chansons de Tonton Georges. Celui-ci d’ailleurs prend de temps en temps la parole, répondant aux questions pertinentes de Jean-Félix. Un travail bien conçu, bien documenté et commenté avec humour, aux antipodes de ce qui pourrait paraître un ennuyeux récital de guitare. Là encore il faut souligner la richesse de ces musiques qui se prêtent à de multiples fantaisies comme Joël Favreau l’avait déjà prouvé naguère.

Pendant ces neuf jours, sur la scène, dans la salle, dehors, les chansons du Vieux jaillissaient. Autour d’un verre, à la terrasse, éloignés des chauvins, des porteurs de cocarde, attrapant spontanément une guitare, sans que leur « la » se mette à gonfler, sur le ventre ils se tapaient fort les copains d’abord, riant chantant et prouvant qu’Il restait encor / du monde et du beau monde sur terre. Une question non formulée demeure : et demain ?

Les jeunes blancs-becs, p’tits bleus ou jeunots d’la dernière averse ne sont pas nombreux parmi les têtes chenues et les vieux fourneaux. Et si toute cette richesse allait s’éteindre ? Cette belle culture balayée par le minable divertissement plus rentable ? Même s’ils savent que l’été de la Saint-Martin n’est pas loin du temps des cerises, les résistants de Vaison chantent et rechantent, conscient(s) d’accomplir, somme toute un devoir...

 

La page Bruno Granier sur le site Les amis de Brassens, c’est ici ; le site de Jean-Félix Lalanne, c’est là.

Bruno Granier et Les Amis de Brassens : Image de prévisualisation YouTube

Jean-Félix Lalanne : Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Vaison hanté : Brassens, Brassens, Brassens, Brassens

  1. Odile Fasy 17 mai 2019 à 9 h 31 min

    Comment ais je pu passer à coté d’un article si bien écrit?
    On ressent bien l’admiration pour notre poète, en insérant des vers , dont lui seul savait nous les trouver.
    Je trouve une ressemblance avec son cousin.
    Merci à Vaison pour son festival .

    Répondre

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