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Louise O’sman : sobriété, avez-vous dit ?

Louise O'sman

Louise O’sman (photos Jean-Pierre Maybon)

Festival de poche à Miramas, 17 octobre 2021,

 

Toute de noir vêtue, sobre coiffure cheveux noirs rangés en rideaux bombés, seule, si ce n’est son compagnon – l’accordéon, Louise O’sman en scène. Que dire ici de plus de celle qui, depuis le lancement de son solo il y a trois ans, enchaîne les succès, d’Avignon à Barjac, et a fait la chronique obligée (entre autres) de NosEnchanteurs.

Beaucoup évoquent ainsi sa fascination très tôt pour cet instrument original qu’est l’accordéon, venu bien avant les mots et dont sa prise en main est remarquable, à bien des lunes de l’image bal musette habituelle : l’instrument est entre ses mains un être à part dont le souffle est décuplé par les influences d’ailleurs venues chamarrer sa pratique commencée classique. Sont là accents jazz et argentins, et surtout bourdon et ornements de la musique des Balkans, ou encore ces modulations orientales tout particulièrement envoûtantes sur L’Ombre des mémoires. Son compagnon, c’est certain, en dit autant qu’elle : il respire et déplie sa chanson traçant la perspective d’un décor singulier.

Si Louise O’sman est si sobre, seule sur cette grande scène, c’est parce que ses mots sont un univers qui remplissent dès les premiers cliquètements de l’ivoire l’espace auparavant vide. Comme un conte, Louise nous fait entrer dans ce « pays sans nom / dont les chemisiers bleus ont décoloré l’horizon » par des paroles denses où l’on voyage d’image à image. Très scénique, le décor est là, devant nos yeux, arrêté soudain sur un de ces détails qui font tout le tableau – « on a vu alors dans l’immensité des Maures tournoyer une robe. Une robe trop vive, une robe voyou, une robe légère, une robe été ».

L3Car ô la musique des mots ! Grâce à métonymie et personnification, voici que nous découvrons ces choses enfouies en nous ; voici que nous pénétrons dans la maison du temps, là où « les mains se remplissent les heures » ; voici que nous déjeunons avec l’espérance. Cet arbre ensuite qui nous dit peut-être – qui sait – de ralentir, « frêne, frêne / tu réfrènes tes peines / il faut toujours être pour ». Il faut dire que Louise O’sman a été bercée aux littératures d’ici et d’ailleurs : son nom de scène doit entre autres un peu de ses sonorités à la protagoniste de La liberté et l’amour ! de Desnos. Sans oublier l’écriture : si pour certains la rédaction de travaux universitaires fait partie de ces petits traumatismes d’étudiant que l’on fait vite d’oublier, elle évoque au contraire avec bonheur son goût qu’elle avait à y ciseler des entrées en matière et conclusions dramatiques. L’art de captiver son public ne date donc pas d’hier !

Subsistent ainsi l’une après l’autre en bouche ces pépites poétiques « Si j’ai mis un peu de mon bois dans le foyer de tes grands yeux » (Si ce n’est toi), « Le temps contre son flanc/s’est allongé » (Les marais salants), « Et sur les bouches en cœur / S’envole la fureur des gens » (Les marais salants), « De ces plaines qui règnent / Dans ton palais des pluies » (Ma sœur),… Et dansent au creux de ses paumes les mélodies de l’accordéon aménageant une pause dans les mots, agrandissant l’univers. De même s’invitent d’autres langues, couplet traduit en arabe, poème de Neruda, deux entre-deux dans la densité des textes. L’art de la respiration : son premier nom de scène, No man’s Louise, refondu en l’actuel Louise O’sman explique à lui tout seul d’où viennent ses textes – d’une période de latence, d’une pause dans la course de la vie, d’un no man’s land d’où, à 25 ans, sont poussées ces chansons.

De cette sobriété scénique, se déploie ainsi émotions, frissons, hypnose : « La chanson au tambour m’a fait frissonner », écrira quelqu’un sur son livre d’or. Ma sœur, au tambour pris en boucle, tendons tendus des doigts mimant l’orage aura en effet hypnotisé la salle entière, levée à l’unisson en fin de concert pour applaudir ce qu’on peut appeler, oui, une performance.

 

NosEnchanteurs a déjà beaucoup parlé d’elle, ici, et encore . Pour la fin 2021, Louise O’sman partagera ses scènes entre son solo Joyeuse ville et son groupe de musique des Balkans. Pour suivre son actualité, faites donc un tour ici.

Tandem live Session : Image de prévisualisation YouTube

https://www.youtube.com/watch?v=1nKrhwfZpyg&ab_channel=Tandem

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