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Barjac 2023. Jack Simard, à cœur ouvert, à corps offert

Jack Simard à Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

Jack Simard à Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

30 juillet 2023, festival Barjac m’en chante,

 

Sans artifice, à nu, à vif, tel est Jack Simard sur scène, s’offrant sans retenue avec la conviction de celui qui n’en a plus, la force d’un désespoir lucide et une soif d’absolu. Le voilà qui surgit tout de noir vêtu, couleur de la révolte et du refus qui animent les titres de son dernier album qu’il nous présente ici, seulement ponctué de ce « je ne me souviens jamais de mes concerts » image emblématique de l’acte scénique :

«On pourra me tordre le cou / On pourra baisser ma culotte / Je resterai planté devant vous / Et au diable les fausses notes / On pourra me brûler vivant / Tant que c’est là sous la lumière / Rien n’arrêtera mon tour de chant » 

Portés par la pulsation de la batterie (Vincent Cegielski) et soulignés par les volutes de claviers teintés d’électro (Sébastien Valle), les mots de Jack Simard sont ici scandés bien plus que chantés et viennent nous frapper tels des uppercuts. Pas de place pour les concessions, les certitudes, les prises de position affirmées, tout est remise en question (Bref) : « Alors quoiqu’il en coûte / Je fais l’éloge du doute / Je n’ai jamais été aussi sûr de rien… ».

Il y a dans la présence sur scène de Jack Simard une alchimie étonnante, détonante, un mélange de fragilité assumée et d’une force implacable. Ecorché vif, il s’expose, se livre, se donne au public les bras ouverts, le corps offert comme en sacrifice pour ensuite venir nous percuter, nous bousculer.

simard 2« Trois minutes trente avant la fin des temps », c’est peu pour l’urgence de dire, pour jeter un regard lucide sur son existence, sur ce que l’on a fait d’elle et de ses rêves d’enfant, pour une dernière fois avoir en soi « l’envie fulgurante de se sentir vivant » alors que se profile le désastre et que vient planer l’ombre de la mort. C’est le temps des bilans lucides, amers et mélancoliques (« Qu’est ce qui nous arrive »), de constater que rien, rien / ne sera plus comme avant / puisque tout part à la dérive, c’est aussi celui d’un tableau cynique de notre monde que nous n’avons de cesse de détruire (Bravo) : « Et il ne restera rien / de la courte histoire de l’humanité / si ce n’est le souvenir / d’une espèce de prédateurs… »

Chant désespéré, vision pessimiste, on pourrait au fil du concert se laisser emporter dans ce chaos et pourtant de celui-ci naît un souffle salutaire, un vent libertaire, un Non catégorique adressé à tous les diktats, les conventions, aux normes établies, à toutes les entraves, un message libérateur, émancipateur : Et parce qu’être vent debout et contre tout / et bien ça fait partie du chemin / et parce qu’apprendre à dire non / c’est devenir quelqu’un. Alors contre toute attente, en dépit des erreurs, des embûches, des errances, c’est l’envie de vivre qui se fait urgence, l’espoir qui renaît (Elle est revenue), c’est un Sang neuf qui bouillonne dans les veines comme une sève qui monte, la vie qui pulse avec, dans son sillage, l’amour, la tendresse, la poésie.

Un concert de Jack Simard est une plongée dans son intimité, ses états d’âme, un moment singulier où l’artiste se fait vecteur de tous nos doutes, nos questions, nos révoltes, fardeau parfois lourd à porter (Si tu veux bien prendre ma place), le vertige d’un funambule en équilibre entre désir et désespoir, rage, colère et soif d’aimer, obscurité et lumière. Déchirant, poignant, émouvant, une magie noire !

 

Le site de Jack Simard, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit, c’est là.

 

« Sang neuf » : Image de prévisualisation YouTube

« Non » : Image de prévisualisation YouTube

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