Robinsonne, pas de fumée sans feu !

Robinsonne et Francis Gerö (photo non créditée)
La séduction, franche, se porte d’abord sur le visuel de cet élégant digipack au graphisme signé Jonas Demblon (à ce point de qualité photographique, il faut le nommer).
Voici donc le nouvel album de l’ardéchoise Robinsonne, après son Vie publique d’il y a six ans. Pour découvrir cette artiste, le titre d’Écrans de fumée (c’est la première chanson de l’album) est bien mal choisi car, en treize titres elle s’y révèle à nouveau, comme elle est, franche, entière… transparente, ce qu’on apprécie depuis toujours chez elle. Suffit, pour les novices, de s’adapter à son timbre, comme on dompte un cheval sauvage, grain de voix dont la Seita n’est sans doute pas pour rien.
Treize titres pour un « multivers en aller-retour constant entre l’extérieur et l’intérieur, entre ce qui se passe dehors et ce qui nous remue dedans, une souris à la main ou le nez sur un portable, planqués derrière nos écrans de fumée » : voilà pour le titre. Et c’est vrai que, sur le visuel, elle sort de l’écran de fumée de son poste de télé : si c’est pas une attitude saine, ça…
Robinsonne est de cette famille de pasionarias, sans concession ni rémission. Un peu comme le féminin du chanteur-harangueur lyonnais Jean-Marc Le Bihan, auquel elle rend hommage sur un titre éponyme : « T’avais toujours cett’boule au ventre / L’âme au bord des lèvres tremblantes / Ivre de colère et de rage / Contre les violeurs de courage » tout en chantant sa tendresse au chapitre d’après.
A sortir un album tous les six ans, on se doute que ce ne sont pas les sujets qui manquent. Aux maux qui s’empilent, à l’apathie, à tout ce qui fait écran, Robinsonne répond par la solidarité, l’empathie, l’ouverture à l’autre, le force du combat.
C’est une chanson populaire, au sens qu’elle parle du peuple, qu’elle sent la vie. Malgré la société qui se racornit, s’étiole, s’aigrit (son Ici-Paris brosse le portrait d’une Capitale gangrenée par la misère, qui se déglingue à toute berzingue), elle tente le rappel des cœurs et des âmes : « La liberté n’est pas en forme / L’égalité tombe dans les pommes / J’crois bien que la fraternité / A besoin d’être réanimée ».
C’est un disque très photographique, à la manière d’un reporter, d’un collecteur d’images, de séquences. Un écriture « dans tous les sens » : la tendresse n’y est pas absente, loin s’en faut, c’est presque même la moitié du disque. L’amour non plus (Comme cadeau de Noël, la belle se cherche qui aimer) malgré « les brumes de l’incertitude » :
La galette de laser se clôt sur un petit bistrot d’Aubenas ? Où « y’a du vin sur la planche » et des copains. Tous chantent, tanguent, rêvent en ce « port de tendresse » : qu’ils sont bons ces îlots où l’amitié prédomine, où on peut y refaire le monde le temps d’une soirée.
Le fidèle Francis Gerö, son complice de scène, a assuré les arrangements et pas mal d’instruments, avec à ses cotés Tanguy Blum, Jean-Marc Torchy, Zouick et Lucas Mège : ça donne un bien joli et très convaincant environnement musical. C’est l’album à ce jour le plus abouti, le plus prenant de Robinsonne.
Robinsonne, Écrans de fumée, Cardioïde productions 2025. Le site de Robinsonne, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
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