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Les Insus, trois sexagénaires au sommet de leur art

Les Insus (photos prélevées sur la page facebook Les Insus nos fantastiques rockeurs)

Les Insus… portables (photos prélevées sur la page facebook Les Insus nos fantastiques rockeurs)

Les Insus, Paris-Bercy, Paris, 21 octobre 2016,

 

Depuis trente ans, tous les journalistes les ont harcelé avec cette question : « Quand reformerez vous Téléphone ? » Le plus grand groupe de rock français (que Nicolas Sirkis veuille bien me pardonner) a cartonné et embarqué avec lui toute une génération d’ados pendant dix ans, de 1976 à 1986, en cinq albums studio et deux live officiels.

Ils auront mis le temps. L’envie était là depuis longtemps. Toutefois, après plusieurs tentatives de rencontres, ils n’auront pas réussi à dépasser les vieilles querelles pour partir dans l’aventure tous les quatre. Ils faut dire qu ils auront vécus dix années très Rock & Roll, dans la tradition du “grand n’importe quoi”, avec tous les excès que cela implique… Seuls les Stones auront réussi la performance de rester un groupe, en traversant plus de cinquante années de séismes, d’ego sex and drugs, tout en restant créatifs encore aujourd’hui (cf. l’autobiographie Life de Keith Richards). On regrettera que les ex-Téléphone n’aient pas suivi l’exemple de leurs illustres aînés dont ils se sont tant nourris, faisant même leur première partie en 1982 à l’hippodrome d’Auteuil. Corine Marienneau ne sera donc pas de l’aventure, au grand regret des fans de la première heure. Elle est remplacée pour cette tournée « revival » par le bassiste Aleksander Angelov : pas certain que nous ayons réellement perdu au change d’un point de vue strictement musical.

14900355_1803452463229918_8332303589865245679_nPour des raisons de droits, Téléphone est devenu « Les Insus… portables ». Le nom est ridicule, le jeu de mot pas drôle, mais peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse… et quelle ivresse ce premier soir à Bercy au milieu de près de 20000 personnes ! La lumière de la salle s’éteint sur un fond rouge. La scène est surplombée de trois points d’interrogation lumineux rouges qui rappellent le tout premier signe distinctif du groupe Téléphone qui figurait sur les affiches et pochettes des 45 tours qu’ils vendaient à la fin de leurs toutes premières représentations.

Le concert s’ouvre, « Tu es le long, le long serpent, tortueux et vicieux… » Dès l’intro de Crache ton venin, la folie s’installe dans le public. Louis attaque fort avec la célèbre entame, à la Chuck Berry, d’Hygiaphone, puis suivront Dans ton lit et la triste histoire de la petite de Fait Divers. Aubert dédicace Argent Trop Cher à Emmanuel Macron…

14900463_1776861285896925_4326005068913458224_nLe son est énorme, lourd mais limpide. Les instruments sont parfaitement identifiables. Surprise ! Bertignac et Aubert partagent le lead des guitares. Historiquement, Louis tenait le lead et les solos tandis que Jean-Louis se chargeait des rythmiques avec le chant. Là, ça joue à un très haut niveau et les garçons  s’éclatent, c’est une évidence. Kolinka offre généreusement son jeu de batterie instinctif, presque bestial et pourtant tout en finesse, fait vibrer ses cymbales, subtilités des rides et charleston. Il nous régale de son show habituel de jets et de jonglage de baguettes qu’il fait tournoyer autour de ses doigts. Un moment d’émotion s’installe lors de l’introduction de La bombe humaine, Jean Louis s’adresse aux barbares du Bataclan : « Tant qu’à te suicider, t’aurais mieux fait de rester sur ta première idée »… Dédiée aux victimes, la chanson prendra une dimension particulière. Les quatre musiciens se figent, arrêt sur image pendant quelques secondes, avant d’entamer Au coeur de la nuit. Puis c’est Bertignac qui lance un : « Patron ! un whisky s’il te plaît, ça marche… » pour introduire son titre 66 heures, premier ce soir de leur ultime album Un autre monde. Il enchaînera avec sa chanson mythique, emblématique d’une période junkie révolue, Cendrillon. La fête continue, on repère la crinière blanche de Bertignac qui se balance au rythme d’un « Flipper ». Pas de tilt ! On espère s’en refaire un petite gratuite. Ça tombe bien, Aubert nous exhorte à entrer en voiture (station Bercy ligne 6) pour Métro c’est trop.

Des balayages de projecteurs de lumières blanches (assez pénibles par la fréquence) éclairent le public. On y décèle des visages ravis, quelques larmes d’émotion par ci par là car le public a du mal à y croire, le voyage dans le temps est si brutal… Même avec son perfecto, un quinqua adulescent ça reste sensible. Il y a du rockeur, du tatoué, quelques ados. Le public est populaire, simple et délibérément là pour faire la fête.

Tandis que nous nous perdons dans une observation pseudo-sociologique du public, Aubertignac s’assoient sur le bord de la scène et nous balancent une énorme claque avec un set acoustique blues de deux titres : Le silence et Fleur de ma ville.

Aubert se lève, s’installe au piano pour Le jour s’est levé. Très populaire, ce titre a marqué en 1986 la fin du groupe. On s’en serait dispensé ce soir, un peu trop douçâtre, à la limite de la mièvrerie..

En revanche, on enchaine avec un coup de défibrillateur de trois tubes : Ce que je veux, New York avec toi et Un autre monde. Pour cette dernière, Jean Louis lance une énorme mappemonde gonflable dans le public qui bondira dans la fosse, poussée par des centaines de mains et déclare : « C’est votre présent votre passé, votre avenir, prenez-en soin. »

Ça c’est vraiment toi, ce premier rappel de près de dix-huit minutes, sera l’occasion de tous les délires. Jean-Louis et Louis se mettent dos à dos, font glisser leur guitares en bandoulières permettant à chacun de jouer sur la guitare de l’autre. Ils alternent de magnifiques solos acrobatiques et, comme Louis aime le faire à l’occasion de ses concerts perso, il glisse du morceau original vers (I Can’t Get No) Satisfaction et Sympathy for the devil des Stones. C’est toute la musique que l’on aime, elle vient de là, elle vient… des seventies. Bertignac s’en donne à coeur joie, c’est son ADN musical, le son dont il ne s’est jamais séparé, Led Zepp, les Who, Clapton et bien d’autres.

Festival_des_Vieilles_Charrues_2016_-_Les_Insus_-_039Le concert s’achève sur Tu vas me manquer (non, Kevin, c’est pas du  Maître Gims !), excellent choix pour cette fin de soirée.

Au sortir d’un concert comme celui-là, toutes les polémiques, toutes les considérations sur l’opération commerciale, les cachets exorbitants, les querelles, n’ont plus aucun intérêt. Seules la musique, les chansons traversent le temps et triomphent. Nous avons vécu simplement un moment de grâce, d’émotion pure. Si l’effet nostalgie d’une adolescence enfuie est en filigrane, il n’en demeure pas moins que ce soir à Bercy, Bertignac, Aubert, Kolinka et Angelov ont balancé un rock puissant et maîtrisé. Du très grand spectacle, bien meilleur qu’il y a trente ans. Jean-Louis n’escalade plus les amplis mais joue bien mieux de la guitare. Louis n’est pas seulement notre guitar hero français mais chante, et chante vraiment très bien. Les années de carrière solo de chacun, de concerts, les albums à succès respectifs, auront permis une maturité artistique de très haut niveau tout en gardant la fraîcheur et l’émerveillement de la jeunesse. Un concert des Insus ce n’est pas le refus du temps qui passe, c’est assumer le temps tout en restant vivant, en éveil, profitant de l’instant présent car « le temps lui n’existe pas, Le Temps, est ce que tu en feras… » Nous partirons les mirettes pleines d’étoiles, enchantés d’avoir revu ces trois sexagénaires de dix-sept ans et demi au sommet de leur art.

 

Le site des Insus, c’est ici. Image de prévisualisation YouTube

2 Réponses à Les Insus, trois sexagénaires au sommet de leur art

  1. guertault 1 novembre 2016 à 0 h 43 min

    C’est pour moi le groupe de rock français de l’excellence…. Lorsque l’on revoit

    les anciens concerts avec TELEPHONE et les actuels avec LESINSUS. On

    retrouve la même flamme du rock avec un groove et toujours une énergie d’enfer

    finalisés par un plaisir flagrant de la scène. Merci encore pour cela.

    Dans ma vidéo « LES INSUS « J’ai écrit : En INSUS ils sont revenus…

    J’aurai du modifier le dernier caractère et ajouter un suffixe soit

    Les Insurpassés. ( les inégalables) sont revenus.

    LesInsus :

    https://www.youtube.com/watch?v=onke4MOncSs

    Répondre
  2. Jerome Robillard 11 novembre 2016 à 9 h 59 min

    Effectivement, je trouve aussi que c’est le meilleur groupe de rock français. Les Insus est un groupe qui sait partager son énergie et c’est magnifique.

    Répondre

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