CMS

Alain Sourigues, boxeur à profusion, chanteur à contusion

Alain Sourigues au Théâtre Clavel (photo Anne-Marie Panigada)

Alain Sourigues au Théâtre Clavel (photo Anne-Marie Panigada)

Alain Sourigues, 14 janvier 2018, Théâtre Clavel à Paris,

 

Si la programmation d’Edito/Noir Coquelicot au Théâtre Clavel (1) vit ces temps-ci quelques soubresauts (des annulations pour diverses raisons non imputables à l’organisateur), elle connaît la plupart du temps de bien belles satisfactions. Comme ce dimanche…

Là, nous sommes au terme du spectacle. La salle est presque comble et l’artiste anticipe les réactions du public. Et il supplie celui-ci de le laisser partir : il a fait son taff, ralenti même la cadence en fin de parcours pour être raccord avec son contrat mais pas plus. Il sait l’adhésion des spectateurs. Il les flatte, les cajole, s’agenouille devant eux, à presque pleurer. Il les culpabilise, les brusque même : il veut partir. Nous, le public, sommes censés le retenir. C’est vrai que nous avons notre dû : la ration fut généreuse, la pitance bonne. L’homme de lettres qu’il est (notons qu’il fut jadis facteur, à en distribuer en abondance) jongle avec le verbe sans jamais faire tomber le moindre mot. Avec son physique de mousquetaire, il foudroie l’air de sa verve comme d’Artagnan le faisait de son épée. Son spectacle est l’exacte rencontre, la fusion, entre un one-man show d’humoriste et un tour de chant. Qui plus est brillant, excitant, exaltant. Sans répit. De La rue de la poupée qui tousse à l’antre très fréquentée de Séguéla (pour un fameux Diner de cons méga-sponsorisé), il occupe l’espace-temps de ses mots judicieux, ses saillies, ses réparties sans jamais se départir de sa coutumière élégance. Car le monsieur a la politesse du mot qu’il aime bien servir, cajoler ou culbuter, parfois en simultané. Ça brille, ça virevolte avec une dextérité de la verve qui nous épate (mais c’est du Panzani !), qu’on lui envie. Il se met en scène en Auguste, et c’est bien ça. Auguste comme un clown, Auguste comme un empereur, rodé Rodin à la sculpture de verbe. Alors, quand il nous dit filer un mauvais coton, ça ne va pas de soie, même si « J’me suis levé du pied gauche / Marché dedans du pied droit / j’ai eu un trou dans ma poche / Et bâclé mes signes de croix… »

On dirait bien que sa prestation agit sur nous comme un poing sur la gueule mais Sourigues nous a déjà devancé. Le poing sur la gueule est justement un de ses sketches-chansons qui, même et surtout ganté, uppercute plus encore que d’autre, particulièrement les spectateurs du premier rang souvent sollicités qui connaissent ainsi et à leur tour les joies de l’intermittence sans passer par la case Assedic. Chanteur ou boxeur, le Sourigues ? Dans le rendu, ça prête à contusions.

Certes c’est la vedette, même l’idole pour certaines de ses fans, mais Sourigues n’est pas Sourigues tout seul : c’est la complicité (dois-je dire aussi la perfection) d’un remarquable trio qu’il forme avec Jules Thévenot, à la guitare et au banjo, et Jean-Michel Martinot, à la basse et à la flûte. Ces deux-là font même humour de leurs notes, qui toujours tombe à point nommé.

 

(1) Prochain rendez-vous au Théâtre Clavel le 11 mars 2018 avec François Gaillard dans son concert dessiné. Le site d’Alain Sourigues, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Alain Sourigues, boxeur à profusion, chanteur à contusion

  1. Joël Luguern 16 janvier 2018 à 0 h 51 min

    J’ai moi aussi assisté à ce spectacle. Impressionnant !
    Alain Sourigues ne sourit quasiment jamais, tandis que nous, les spectateurs, ne cessons jamais d’éclater de rire. Du grand art!
    On ne saura jamais si les convives du « Dîner de cons » se sont régalés ou non, mais nous, nous nous sommes régalés en écoutant la chanson.
    Qu’attend Sourigues pour passer dans une salle de cinq ou six cents places, tremplin parfait avant l’Olympia ou Bobino? Car c’est dans une salle de cette dimension que ce digne héritier de Raymond Devos (qui en a peu, des héritiers) devrait logiquement présenter son spectacle dans quelques années. Ah ce « fichu fichu fichu » !!

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

code

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>

Archives