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Le charme fatal des chanteuses (peu) banales

Lison David et Marie Gottrand (photo Jeremy F. Marron)

Lison David et Marie Gottrand (photo Jeremy F. Marron)

Allain Leprest le disait : « Un interprète ? Les chansons, il les repeint ! Mettre en scène, c’est une forme d’écriture. » Voici un beau tableau que nous proposaient Lison David à la voix et Marie Gottrand au piano et à la voix pour leur « Récital fatal pour femmes banales » le 14 avril dernier à Rians (Var). Départ pour la féminité, disent-elles ? Ce sera à l’image de ce duo décalé, espiègle dès l’entrée de la pianiste, dont on comprend très vite que l’accompagnement sera lui aussi peu banal ! De Juliette à Boris Vian, de Tachan à Anne Sylvestre, en passant par Camille, Yvette Guilbert ou Brigitte Fontaine, Marie-Paule Belle, Paris Combo et même Fragson pour n’en citer que quelques uns, le patchwork joliment mis en scène par Lison David explore la gamme des sentiments avec une savoureuse dérision.

Du rose pour l’amour ? Que nenni, l’accord sur scène se fait en bleu électrique et la note est donnée, on ne va pas faire ici dans le sentimental ! Quelques accessoires suffisent à théâtraliser le spectacle (un micro qui se fait la malle, quelques tissus bien choisis qui feront un voile ou un tablier, un bout de papier toilette malencontreusement coincé…), c’est l’expressivité qui emporte l’adhésion des spectateurs dont les rires fusent dès la première chanson. Tour à tour mutine ou provocante, Lison David chanteuse et comédienne joue de sa belle voix et de tous les registres pour donner une nouvelle densité à ces titres connus, mille fois entendus ou oubliés. De son piano, Marie Gottrand n’est pas en reste, ponctuant d’une bien jolie voix ou d’un visage incroyablement drôle et expressif la plupart du récital.

Lison David (photo Anne Lefebvre)

Lison David (photo Anne Lefebvre)

Les chansons revivent délicieusement devant nous : on oublie Marie-Paule Belle avec une Parisienne qui acquiert une nouvelle sensualité ; les fameuses Blondes d’Anne Sylvestre si fatales à la séduction des brunes, débarquent sur les planches ; le cœur se vrille à l’écoute du Attila Marcel de Benoît Charest, avec « un dur, un balèze » qui n’aime qu’avec les poings, et la vendeuse des P’tits gâteaux de Mayol s’incarne devant nous avec gourmandise ! Quant à Johnny, la pianiste finit par bondir sur son piano pour implorer aussi de son côté : « Mais oui Johnny, fais-lui mal ! ». Effet de surprise et rires garantis !

Point trop n’en faut, c’est quand la mise en scène ne s’impose pas qu’on en reconnaît la qualité. L’expression est ici d’une grande justesse, rien d’appuyé, l’humour y est pince-sans-rire, le drame nous attrape sans nous serrer, et l’émotion en est d’autant plus présente pour le spectateur. Point d’orgue avec les Vierges ! d’Yvette Guilbert, pour le savoureux jeu comique du duo, où chanteuse et pianiste se voilent devant nous pour se demander très inspirées (et très drôles) « à quoi rêvent les vierges » et si « elles jouent avec les cierges »

De paysage en paysage, l’amour en chansons se dessine sur scène, pour conclure fatalement avec Brigitte Fontaine que L’amour c’est du pipeau, et même « une vieille peau » avec Léo Ferré ! Avec Lison David, « belle passeuse de mots » (là, c’est Christian Camerlynck qui le dit des interprètes) et Marie Gottrand, pianiste magique, l’amour sans guimauve ne se repeint pas en rose, mais de couleurs parfois acides ou sombres, tendres et sensuelles toujours. 

Un récital caustique et réjouissant où T’as bien l’bonjour d’l’amour !

 

Récital fatal pour femmes banales, un spectacle du Collectif TIF. Le site du collectif TIF et la présentation des artistes, c’est ici. La prochaine date, c’est le 31 août à Calvisson (30).

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