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Barjac, monument aux vivants

(photos prélevées à la face facebbok J'irai à Barjac en juillet)

(photos prélevées à la page facebook J’irai à Barjac en juillet)

par Romain Lemire,

Moi qui, depuis une bonne vingtaine d’années, marche sur un fil tendu entre les salles de théâtre et les salles de concert, j’ai toujours entendu parler de Barjac comme étant le cœur du milieu du centre spatio-temporel de la chanson-d’expression-française- de-caractère-à-textes-de-qualité mais, en bon artiste irrésolu entre les deux formes, je n’y étais jamais allé. C’est ainsi qu’en cette fin de juillet 2019, j’ai découvert d’un seul coup les différents aspects de Barjac, en qualité de chanteur (j’y ai joué mon spectacle Gaston moins le quart dans la salle Jean-Louis Trintignant), d’écouteur (j’ai assisté à une petite quinzaine de concerts) et de noceur (après la scène ouverte de 00h30 au chapiteau, il y a le bœuf de 3h du mat ‘ au bar du chapiteau… c’est fou comme le jour se lève tôt, en juillet). Première fois donc, et c’est bien un regard de néophyte que je pose ici sur Barjac m’en chante.

Ce qui m’a frappé avec une intensité croissante au fil des jours, c’est le caractère pluriel de ce festival. À force d’en entendre parler, j’en avais fait un mythe et je m’étais résigné à visiter une chapelle. Pourquoi pas, il y en a de belles et on y découvre des trésors mais il faut bien reconnaître que, par nature, la chapelle ne brille pas par son esprit d’ouverture. Or, j’ai trouvé là une grande maison joyeusement profane avec des tas de fenêtres, avec presque pas d’murs, où chacun pouvait trouver refrain à son goût mais aussi élargir son champ musical. Barjac n’est pas devenue la gardienne auto proclamée d’une certaine idée de ce que doit et ne doit pas être la chanson. Si on considère, ce qui est mon cas, qu’il n’y a pas la chanson mais des chansons, c’est une bonne nouvelle. Jean-Claude Barens parvient à concilier plusieurs cercles partiellement superposés, faisant de Barjac une rosace qui laisse entrer la lumière — quoi de plus actuel que la lumière naturelle ? — en l’exaltant, comme l’artiste rehausse nos réalités avec ses propres couleurs. À Barjac, un amoureux de Anne Sylvestre peut se frotter au rock vigoureux de Aron’C, un amateur de l’électro-sensible Jean-Louis Bergère peut croiser le vers avec Thomas Fersen et un auditeur touché par la poésie souveraine de Marion Rouxin peut se laisser embarquer par la fantaisie tourbillonnante de Lili Cros et Thierry Chazelle et des Fouteurs de joie. Cet heureux phénomène demande des efforts à tout le monde et c’est d’après moi la deuxième bonne nouvelle: il m’a semblé que les festivaliers véritablement curieux sont nombreux et, si j’ai vu des spectateurs sortir de certains concerts dont ils estimaient probablement, pour faire court, qu’ils étaient trop bruyants, je retiens surtout qu’ils ont pris le risque d’aller les voir, comme de jeunes auditeurs auront peut-être fait connaissance en un seul concert avec Jehan l’interprète et Leprest l’interprété.

67299143_2491336500905029_2455202683070447616_nLes chansons qu’on y découvre, le public qu’on y rencontre, les copains qu’on y retrouve, les merveilleux bénévoles, les conditions techniques irréprochables, la petite ville pleine de charme… j’ai d’abord vécu Barjac comme une fête interminable, la célébration du mariage de la musique et des paroles pour le meilleur et pour le dire. Si je le peux, je reviendrai m’extasier, pester, boire de la bière, débattre comme on raisonne ensemble, chanter comme on résonne à plusieurs, communier sans dieu mais avec les couplets et les refrains qui créent notre monde. Les chansons existent, on les a rencontrées.

6 Réponses à Barjac, monument aux vivants

  1. Franck Halimi 4 août 2019 à 13 h 57 min

    Romain Lemire est un mec formidable.

    Parce que c’est dans l’humanité qu’il puise ses besoins, ses envies et ses forces.

    Et, comme dans son spectacle à l’univers si singulier « Gaston moins le quart », quoi qu’il fasse, on retrouve (éparses ça et là, ou bien parfaitement ordonnancées) des traces de sa créativité, de sa sensibilité et de sa délicatesse.

    Et ce papier sur ses ressentis barjacois confirme pleinement la vision que j’ai de lui.

    Aussi, pour l’avoir vu s’intéresser à ses semblables si différents, avec curiosité, gourmandise et empathie durant toute cette belle semaine, je me dis juste que j’aimerais mieux connaître ce mec formidable…

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    • Martine LaMarzina 4 août 2019 à 18 h 18 min

      Romain Lemire est très « sympathique » en l’occurrence… je le connais depuis son prix « Chapeau bas » (Tremplin dans le 20ème, qui n’existe plus) un ou deux ans après que David Sire l’ait eu , lui aussi… Toujours un « bonjour, tu vas bien ? », quand on se croise à la fin d’autres spectacles, dans le public…Je ne sais pas comment il fait, il est « partout » et s’intéresse à tous ses « confrères »: Auteur-Compositeur-Interprète, mais aussi comédien, et ne l’oublions pas, excellent pianiste « auguste » dans le spectacle de François Morel (sur Raymond Devos) ! Amitiés musicales, Martine (Webzine « LaMarzina »).

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  2. JEAN HUMENRY 4 août 2019 à 14 h 21 min

    Merci petit frère,
    Je sais qui tu es et ce que tu dis m’importe.
    tu es de ce monde des générateurs d’émotion dont le monde est en manque ou…que le monde ignore…
    Tu es de ces fous aux mots sublimes qui portent et qui transportent…
    J’ai réécouté il y a deux jours ton magnifique premier album « Il pleut des plumes et je suis fier de t’avoir accompagné pour lui donner le jour.

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  3. Michel Trihoreau 4 août 2019 à 15 h 16 min

    Un bien bel article qui remet les pendules à l’heure.
    Le public de Barjac n’est pas sectaire, mais friand de qualité, exigeant quels que soient les styles, curieux de découvrir, critique s’il le veut, aimant le plus souvent.
    C’est essentiel qu’un artiste s’en aperçoive et offre son témoignage avec une brillante lucidité.

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  4. Catherine Laugier 4 août 2019 à 17 h 19 min

    J’aime beaucoup le point de vue de Romain Lemire, son ouverture, son éclectisme, l’image magnifique qu’il a trouvée pour parler de la programmation du Festival, une rosace qui laisse entrer la lumière. J’espère vivement qu’il continuera à nous apporter son point de vue éclairé, c’est bien le cas de le dire, sur la musique et la chanson belle et sans a priori.
    Inutile de dire combien j’avais apprécié son propre spectacle, vu au Off d’Avignon en 2017, je vous en ai déjà parlé.
    Merci Romain.

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  5. Camerlynck 4 août 2019 à 17 h 53 min

    Je Signe des deux mains. Je suis venu plusieurs fois et j’ai aimé je m’y sens en famille Même si, il y a 5 ans je craignais qu’il se referme sur un style de chanson. Mais il s’ouvre, il rajeunit dans le public et sur scène. Garder l’esprit des créateurs et y mettre son empreinte Bravo Jean Claude. Personnellement je continuerai à le suivre. Je ne suis pas remis de mes émotions devant les réactions du public.

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