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Brac, l’encre bien plus loin

Jean-Michel Brac (capture d'écran)

Jean-Michel Brac (capture d’écran)

Si ce disque n’était sorti durant cette pandémie, il aurait trouvé pour cadre une autre catastrophe, climatique ou guerrière. L’homme est, à ce titre, d’une imagination sans limite. N’empêche que, écouter en confinement la chanson-titre vous en fout un coup : « Il paraît que ce s’ra demain la fin du monde / A qui tendre la main pour sortir de la ronde ? » Je ne sais si le poète a toujours raison, s’il voit plus haut que l’horizon : il chronique en tout cas le temps présent comme pour alimenter utilement notre mémoire de demain.

C’est à l’image du visuel du disque : Le Brac nouveau a changé de ton. Il a jeté l’encre plus loin, en des eaux plus profondes. On dira que Brac a changé de braquet : amusés, les musicologues (pas les chroniqueurs de variétoche, pas eux) retiendront cette expression. Les propos de l’artiste sont moins enjoués, plus sombres. Bien sûr, il y a de beaux restes, des traits d’humour et des croissants trempés dans le café, où notre cuillère touille indifféremment sucre et mélancolie, bien sûr « on roucoule des je t’aime et on plume des poèmes ». J’en connais au moins un qui a écrit Les mémoires d’une table, un autre celles d’un cul sur la commode : lui chante Une chaise [qui] se met à table : ça en fait des histoires de fesses… Bien sûr…

Mais l’ambiance sinon baisse au moins change d’un ton. Paradoxalement c’est plus joli encore, l’effet que ça fait dure plus longtemps. Est-ce le fruit du travail mené avec Claude Lemesle qui s’est acharné sur lui en atelier d’écriture ? Ça baigne dans une douce mélancolie, comme dans ce superbe Berlin Berliin : « On ira à Berlin pour oublier nos ruines / Nos deux cœurs sur la brèche se demandent où ils pêchent / Là-bas cette fois c’est sûr, on f’ra tomber nos murs ». Comme cette valse où le souvenir autant que les regrets accompagnent La mère Strapontin dans les allées d’un cimetière. Joliment beau, ; vous dis-je. Comme ce titre sur le crabe alors qu’on en pince pour la vie.

digipackcd_2_volets_1 plateau_livret 4 a 16pagesD’un coup les notes s’emballent, presque se révoltent : Brac a des visions de télés, d’écrans, Big Brother sur les dents : « Boutons ouvreurs de vide, discours malade / Visages sans une ride / Trop de pommade / Branchés sur votre peur au fond de vos cages / C’est l’absence des heures, arrêt sur image », comme une situation confinée…

En empathie avec les mots, les musiques sont gracieuses, voluptueuses à certains titres quand elles se projettent dans les cordes ; guitare et piano jouent leur pertinentes partitions.

Sous l’humour, parfois l’incongru, les constats et autres indignations, jamais loin des copains et des chopines, c’est un artiste complet, bigrement intéressant qui se dévoile plus encore, qui vous arrache parfois sinon des larmes au moins ses ingrédients, qui appelle le respect, l’attention, la superbe écoute qu’il mérite. Il paraît que demain, chante-t-il. Si Brac peut nous accompagner dans ce demain, ce sera forcément bien. C’est parce que vous ne le connaissez pas encore qu’il vous faut le découvrir : ce serait bête de passer à côté.

 

Brac, Il paraît que demain, 2020. Le site de Jean-Michel Brac, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

Berlin Berliin
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Comme une larme dans l’océan, hors album
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