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Fahb. C’est beau tout ça…

Fahb -Miconnet-Mettay pour En attendant -2020

Fahb : Miconnet-Mettay pour En attendant -2020

Il y a des moments où l’on s’arrache les cheveux quand on lit dans les journaux, qu’on entend à la radio que la chanson est un genre obsolète, inutile, en voie de disparition. Quand on reçoit, une fois encore, un disque soigneusement préparé, enregistré, vécu, qui vous arrive malgré le sort, malgré l’effroi.
Il y a des soirs pourtant où l’on danse dans sa chambre, Ay Maria ! confinés par un virus en couronne, où l’on se prend à espérer, à vibrer sur des morceaux de vie d’humains, où l’on oublie qu’on est en sursis… On part « à la conquête d’un nouveau monde ! »

Ce disque, justement appelé En attendant, a été préparé tout au long de cet automne, dans ce studio lisboète, avec soin, avec amour. De la musique,  aussi bien fine mélodie qu’envolées lyriques ou rythmes colorés, de la chanson qui vous importe, qui vous emporte. Une grosse moitié des musiques sont de Fabien Mettay, l’auteur des textes et chanteur, souvent les plus intimes, le pianiste Pascal Miconnet donnant sa patte sur des titres plus cinématographiques. Du travail bien fait, comme on n’ose plus en faire, sans retenue, avec cette liberté issue du rocker que reste Fabien Mettay, capable de murmurer comme de tout donner, jeu et voix, comme le font actuellement les chanteurs d’opéra. Le piano voix est enrichi sur quelques chansons d’un quatuor de cordes, les violons de Marie-Camille Costaseca et Cécile Teixidor, l’alto de Charlotte Chollet et le violoncelle de Delphine Roustany, qui réchauffent le son sans l’alourdir.

L’album s’ouvre sur un cri, une chanson qui monte en intensité, déclaration d’amour torride et si respectueuse à la fois, à une femme, au quartier de Paname dont on ne sait qui personnifie le mieux l’autre : « Depuis tes courbes où je glissais / Jusqu’à la moiteur de tes quais / A chaque instant me retenir / Pour mieux pouvoir mourir d’aimer ». C’est ce titre, où rôde le souvenir de Léo Ferré, jailli d’une soirée à Paris, d’une envie viscérale de retour à la chanson, après un passé rock et électro, qui a déclenché ce projet de disque, vite transformé en album complet de douze titres. Faits de souvenirs, d’absences, de voyages, de rencontres. Comme dans un film de Dupontel : « Au fond d’un caniveau ou bien d’un bar aux Seychelles / Ici on chuchote et l’on crie / Ça va du dégoût à l’envie ». Et qui se finit en nostalgie, « Il est pas si loin ce temps, mais putain / Ce que je vieillis mal / C’est comme avant / Dans le fauteuil du grand-père… ».

Il y a du tragediante dans Fabien Mettay, que l’on a connu dans des fantaisies légères, ici c’est Shakespeare qui pointe son nez, plutôt que Colargol (1). Il semble qu’à la maturité il ait envie de donner libre cours à ses envies de chanson qui touche, à la limite du jeu d’acteur, à la Brel, «  Y a des moments qu’on n’oublie pas / Des mots de trop qu’on vous dégueule / Comme une tarte dans la bouche », à la Nougaro, en mettant de côté la pudeur d’homme qui vous empêche de montrer vos sentiments quand on est tout jeune. La vie vous donne de la matière, la voix se polit, les émotions peuvent enfin s’exprimer librement. Si la présentation sur scène s’est épurée, coiffure courte stylée, chemise blanche, pantalon noir, l’inspiration a dénoué ses entraves. Zurich a vu partir un père qui tente maladroitement de compenser son absence : « Tes p’tites excuses, tes p’tits mandats / Si c’est d’l'amour, c’est pas pour moi ». Pascal Miconnet lui insuffle ce rythme lent, presque macabre, pour accompagner la supplique du chanteur à la voix qui d’un coup se brise : « Allez tire toi / Avant qu’j'incise / Au plus profond / Que j’pique ma crise », son jeu sait suivre toutes les nuances, toutes les humeurs de la voix de Mettay.

Fahb 2020 En attendantExorciser les amours qui finissent mal, dans un scénario digne de Guitry dans La poison : « Ça fait combien dis-moi / Que je te suis comme ça sur ce chemin de croix ». Vingt-ans ? Le mot change trois fois de sens pour Mr Simon, je vous laisse en découvrir la chute. Un film noir de 3 minutes 19. Ou plus légèrement, à l’italienne : « Vai via / La vita è più bella senza te». Chasser les chiens qui reniflent dans vos poubelles, après vous avoir mangé dans la main, une chanson dure, poétique, entièrement de Mettay, magistralement mise en scène par son orchestration. Et retrouver enfin l’amour : « Quand je me couche entre ses bras / C’est pas des minutes ou des secondes / Mais bien toute la vie qui gronde là ». Ou encore : « Et toi tu ressembles à l’aurore ». A ce jeu difficile de la déclaration il s’entraîne sans fin… « Vous me le copierez cent fois Mettay / Les mots de trop n’existent pas ».

Ces questions qu’il évoquait déjà dans La vie c’est beau comme un film de Dupontel, qui lui tournent dans la tête depuis longtemps, les voici développées dans Pardonner : «J’espère que vous nous pardonnerez / Que vous saurez ce qu’on s’en balance nous / De la grandeur de la France / De l’Amérique ou des chinois / Qui peut-être demain, seront les rois ». Prémonitoire.

 

(1) De Shakespeare à Colargol est le titre d’un précédent album.

 

Fahb, En attendant (2020)

Le site de Fahb c’est ici.  Ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, là.  Disponible sur les plateformes de diffusion.

En l’absence de concerts cet été, Fahb sort un nouveau titre plus léger, basse batterie, Petite, accompagné d’un remix par Anton Wick, qui  fera l’objet d’un clip très prochainement tourné au vert à la montagne. Une vidéo de vacances et de détente, destinée à casser l’atmosphère anxiogène.

 

Monsieur Simon Image de prévisualisation YouTube
La vie c’est beau comme un film de Dupontel Image de prévisualisation YouTube
Pardonner Image de prévisualisation YouTube

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