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Mariluce, chansons à recoller

Mariluce (photos Audrey Chevalier)

Mariluce (photos Audrey Chevalier)

Des femmes qui chantent leurs problèmes, leur intimité, il y en a beaucoup, tant que c’en est devenu, ces derniers temps, comme une subdivision de la chanson. Des chansons taillées dans le mélo (Lynda Lemay), d’autres dans l’humour, la provocation. Là ce sont deux artistes, Lucie et Marie (leur duo se nomme en conséquence Mariluce), qui ne sont jamais dans l’excès, chantent calmement, posément, accordant leurs jolies voix. Ça tranche parfois d’avec ce qu’elles chantent. Non des énormités, loin s’en faut, mais des sujets peu traités, ou pas de cette façon. Et ça commence avec l’avortement mais côté technicienne, Faiseuse d’anges : « Je fais ce qui ne se fait pas / On dit bien ce qu’on veut de moi / Je suis faiseuse d’anges, passeuse d’âmes / L’ange gardienne de tant de femmes ». Faire d’un thème a priori grave un sujet comme un autre… loin que ce qu’ont pu en chanter Pierre Perret, Anne Sylvestre ou Jeanne Cherhal. En nettement plus léger, trop peut-être. Comme dit Mariluce : « On ne souhaite pas la mort au ventre / Personne ne la chante ».

La violence faite aux femmes au sein du foyer est un thème lui-aussi assez récent de la chanson, avec quelques petits chefs d’œuvre, comme le Je passais par hasard d’Yves Jamait. On accordera attention à Une valise à la main, des Mariluce. Qui nous campe une femme cabossée « qui était belle avant », dans l’hésitation de partir, fuir son compagnon violent : « L’important serait maintenant d’y aller / De tout quitter… » Le traitement musical en ferait certes une chanson comme une autre ; il suffit d’entrer dans les mots et de ce qu’il y a derrière…

EP-Dames-soeursOnze titres, des portraits de femmes. Et des mots que vraisemblablement un homme ne saurait toujours trouver, ne saurait imaginer. C’est vu de l’intérieur. Ici, une femme qui « chevauche sans peine / les licornes et les poèmes » posée sur un banc. Là, Aurore, qui elle reste figée sous la pluie, regardant défiler la vie. Il y a celle, indécise chronique, qui veut tout et son contraire. Celle dont le « cœur vacille et se dilate, je me tortille, rouge écarlate » quand s’approche l’étreinte… Et encore celle, l’Amélie-Mélo, qui se mélange volontiers les pinceaux (adorable chanson que celle-ci…). Soyons juste, ça se clôt par Sous la pluie, joli et tendre portrait de Fredo, un jardinier maladroit… Des portraits que nos deux dames qualifient, avec raison, de « morceaux de verre brisés ». A l’auditeur de recoller…

Sans tout à fait nous transporter, ce premier disque de Mariluce peut nous séduire sur certains aspects, à pas mal de titres même. Pas sur tout. La légèreté des mots et des notes véhicule parfois mal l’empathie. C’est frais, c’est sympa (et c’est sans mal que nous vous recommandons d’investir en cet opus – leur troisième autoproduit -). Mais, tout en gardant une nécessaire distance, nos dames sœurs gagneraient à muscler un peu plus leur verbe, leur verve, le nuancer. Et ne pas tout chanter sur le même ton, mélodies certes entêtantes mais souvent ressemblantes, ce qui forcément nivelle. Sans quoi Mariluce ne restera qu’aimable, estimable curiosité. Ce qui serait dommage, car le potentiel ne manque pas. Elle méritent bien plus.

 

Mariluce, Dames sœurs. Rockwithyou 2020. Le site de Mariluce, c’est ici, leur facebook, là.

« Tandem » : Image de prévisualisation YouTube

« Faiseuse d’anges » : (en public 2018) Image de prévisualisation YouTube

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