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Anne Sylvestre, 1934-2020

(photos Anne-Marie Panigada)

Anne Sylvestre au festival de Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

Il nous faut d’urgence se chercher un mur pour pleurer… Pleurer celle qui vient de s’en aller et rend comme jamais la chanson orpheline, même si, à n’en pas douter, le métier ne s’en rendra pas compte, ne s’en chagrinera pas, lui qui a tout fait pour l’ignorer, la mettre hors champ, hors chant. Celle qui, contre vents, contre marées, imposa ses rimes féminines dans une époque où celles-ci n’étaient pas particulièrement les bienvenues, où la condition de la femme ne faisait qu’à peine débat et encore moins chansons. Elle, c’est Anne Sylvestre, « une sorcière comme les autres », une fabuliste déjà, moins au service d’une cause que de rares évidences qu’elle versifia avec le talent que l’on sait.

C’est dans les lieux de la chanson rive-gauche qu’elle débuta, en 1957. Tendresse, ironie et amour sont alors ses ressorts poétiques. Une chanson se fait remarquer, Mon mari est parti, en 1960. Deux ans après, notre chanteuse se retrouve sur les scènes de Bobino et de L’Olympia… Mais le yéyé triomphe alors à la manière d’une lame de fond, qui balaye tout sur son passage. On retrouve celle qui fut un temps baptisée avec un rien de condescendance la « Brassens en jupons », dans les années soixante-dix, avec des propos plus mûrs, autrement plus affirmés. Le temps de la disgrâce lui avait permis de se consacrer plus encore à la chanson pour enfants (les premières « fabulettes » remontent à 1961), la sauvant de la mièvrerie qui, souvenez-vous, prévalait en ce domaine.

Sauf à les citer toutes, on ne listera pas ici ses mémorables chansons. Tant de titres font bien plus qu’une œuvre, mais le socle de notre mémoire commune, parfois de nos combats. Même si on sait depuis longtemps que la chanson ne peut changer le monde. Tout au plus certaines chansons, certains artistes, certaines, ont pu faire bouger les lignes, les ébranler. À ce titre, par ses titres, Anne Sylvestre a remué, secoué, fait avancer des idées, comme par Gay marions-nous, Non tu n’as pas de nom, Douce maison… des thèmes alors avant-gardistes, audacieux, incongrus.

Rescapée de périodes douloureuses de son enfance, dont son répertoire porte les traces (ainsi, Le p’tit grenier…), Anne Sylvestre s’est construite dans l’adversité. Un temps sans producteur, après avoir successivement quitté Barclay et congédié Gérard Meys, elle monte sa propre maison de disques, comme Béart, comme Perret.

cI0121-021C’est peu dire qu’Anne laisse et laissera son empreinte dans la chanson. Car, parfois cause à ses Fabulettes, elle fait école. Nombre de ceux qui se lancent dans la chanson ont quelque part en eux, voire dans leur répertoire, un peu beaucoup d’Anne Sylvestre. Et s’ils doutent aussi, c’est à l’unisson de sa chanson. On connaît peu d’artistes de renom qui, comme Anne, se soient intéressés autant et d’aussi près à la jeune génération, à aller la voir en scène, la soutenir presque chaque soir.. De fait et sans le crier sur les toits, Anne Sylvestre est la marraine de tout un pan de la chanson, celle d’aujourd’hui, plus encore celle de demain.

Et quand je parle de chanson, c’est comme Anne : sans œillère, sans chapelle aucune. Elle est de ces artistes qui aiment la chanson en son ensemble. Il y a des rencontres qu’entre toutes on se rappelle : ma première avec elle fut à Barjac, en pleine nuit, dans un terrain vague, à chanter à tue-tête Les Champs-Élysées.

Pour tous ces jeunes, pour nous-mêmes, c’est une parente proche qui s’en va, une mère ou une cousine, une qui frère avec nous, une dont les vers sont parfois tellement en nous qu’elle ne risque pas de disparaître un jour. Anne Sylvestre n’aimait pas beaucoup qu’on dise d’elle qu’elle était « une grande dame de la chanson ». Nous ne le dirons donc pas ; de toute façon, grand n’est pas assez vaste pour dire la dame qu’elle est. Il nous faudra du temps pour guérir de ce séisme du 30 novembre 2020, si on peut.

 

‘Un mur pour pleurer » : Image de prévisualisation YouTube

« Le lac Saint-Sébastien » : Image de prévisualisation YouTube

« Partage des eaux » : Image de prévisualisation YouTube

26 Réponses à Anne Sylvestre, 1934-2020

  1. Catherine Laugier 1 décembre 2020 à 16 h 39 min

    Pour entendre un enregistrement public récent du Lac Saint-Sébastien, c’est le 16 novembre 2014 à Inzinzac-Lochrist (Morbihan) avec Les Ogres de Barback.

    A 1:21 https://www.youtube.com/watch?v=8dmz61RVueo

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  2. Erwan 1 décembre 2020 à 17 h 08 min

    Nous sommes tous des orphelins.
    Elle était tellement discrète et tellement présente à la fois…
    Tout comme sa « Frangine »…
    C’est le même sentiment.
    Avec pour Anne Sylvestre, un attachement à son univers dès l’enfance…
    C’est vraiment un déchirement.
    Oui, je vais aller chercher un mur pour pleurer.

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  3. Evelyne Gutieres 1 décembre 2020 à 17 h 24 min

    « Les amis d’autrefois » et de maintenant!
    nous sommes dans le chagrin depuis l’annonce de la disparition de Anne .
    je l’ai vu de nombreuses fois à Toulouse , Barjac ,Conseze et je devais la revoir samedi dernier à Montpellier ,mais ce sale virus en avait décidé autrement! A chaque fois que j’allais l’écouter chanter outre l’immense plaisir que j’avais ,je craignais toujours que ce fut la dernière fois!
    ses chansons sont et resteront pour toujours dans notre coeur ,notre mémoire et nous la chanterons encore et encore….. je continue à découvrir ses chansons bien qu’ayant tous ses CD …il y a tellement à y puiser !!
    Anne ,va rejoindre Allain Leprest la-haut et tous ceux qui sont partis trop tôt !et une pensée affectueuse à Baptiste
    A ses filles et à Clémence j’adresse mes plus douces condoléances
    mais aussi à sa copine Michèle Bernard à qui elle va beaucoup manquer . et je ne veux pas oublier tous ceux qui comme moi lui vouait une admiration sans borne
    Anne je t’aime !
    Evelyne

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  4. Valérie Davreux 1 décembre 2020 à 18 h 09 min

    Bonjour,

    Je vous contacte à propos d’Amis Terriens, une de nos formations, et la sortie « D’un mot », son premier album (entièrement autoproduit). Je souhaiterais vous envoyer quelques informations à ce propos.

    A qui devrais-je plus précisément adresser cet email ?

    Merci d’avance pour votre réponse.

    Belle fin de journée à vous,

    Valérie

    ps : Merci à Michel Kemper pour ce bel hommage à Anne Sylvestre, artiste à la présence forte et discrète

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    • NosEnchanteurs 1 décembre 2020 à 18 h 30 min

      Michel Kemper/NosEnchanteurs 11a rue Président-Allende 42240 Unieux

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  5. Jean-Yves LIÉVAUX (ALCAZ) 1 décembre 2020 à 18 h 35 min

    Merci Michel, on reste sans mots sans voix …
    Vyviann et Jean-yves

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  6. Henri Schmitt 1 décembre 2020 à 19 h 45 min

    Anne Sylvestre, je n’avais pas ses disques, mais je connaissais ses chansons les plus celebres, et c’etait dans ma tete un pan de l’histoire de la chanson du XX siecle, et du XXI depuis l’an 2000. Pas besoin de ne pas l’entendre a la radio, et si peu a la television. Elle etait la, quelque part en moi, comme Greco, Michel Bernard, Brassens, Beart ou d’autres. C’etait une des figures de mon paysage interieur, quelqu’un dont plusieurs chansons seront avec moi jusqu’au dernier moment, comme certains lieux, certaines oeuvres d’art, certaines musiques. Elle etait de mon monde, celui que l’on a en soi, celui que l’on voudrait voir exister a travers nos choix, nos desirs, nos coleres devant la betise et la noirceur de l’autre que l’on doit subir. Anne Sylvestre, ca voulait dire que dans cette noirceur, il ya quand meme des eclats de lumiere qui ne renonceront pas a briller…
    Bonne route, Madame.

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  7. Natasha Bezriche 1 décembre 2020 à 19 h 55 min

    Je cherche un mur pour pleurer ma sorcière tant aimée…! Elle venait de mon donner son accord enjoué pour interpréter deux de ses chansons dans mon futur spectacle :  »C’est une fille »…Nous avions partagé la scène à deux reprises, à Lyon… Moments inoubliables pour moi ! Tu me manques déjà Anne, ma sœur Âme… Condoléances sincères à sa famille.

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  8. Didier Delezay 1 décembre 2020 à 20 h 06 min

    Très beau papier pétri de respect et de tendresse.

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  9. Anne Lefebvre 1 décembre 2020 à 20 h 08 min

    Magnifique article Michel. Toi seul a su trouver les mots (mais je ne m’en étonne pas) pour parler d’elle.

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  10. Daniel Dion 1 décembre 2020 à 20 h 09 min

    Merci pour cet hommage mérité. En effet, les chaînes de télé publiques en ont à peine parlé et c’est tout. Elle est du niveau de tous les grands de la chanson, il faudrait lui consacrer un récital complet, ce ne serait que justice. C’est infâme !

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  11. Bruno Soldera 1 décembre 2020 à 20 h 10 min

    Magnifique hommage
    Magnifique texte
    Merci Michel
    Merci Madame
    Merci

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  12. Frédéric Quinonero 1 décembre 2020 à 20 h 12 min

    Bravo, Michel ! Tu n’as pas ton pareil pour rendre hommage aux artistes. Qui d’autre que toi pour célébrer Anne Sylvestre ?

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  13. Vincent Capraro 1 décembre 2020 à 20 h 20 min

    Quelle tristesse d’apprendre aujourd’hui le départ d’Anne Sylvestre. Elle devait remonter sur scène en 2021.
    Une artiste majeure de la chanson, d’une grande finesse et élégance. Enfants nous avons découvert son talent au travers de ses fabulettes et plus tard, toute la richesse de son répertoire pour adulte.

    Je pense à tous les jeunes artistes qu’elle a encouragé, qu’elle aimait et qui partagent aujourd’hui cette cette tristesse. Elle faisait partie des rares artistes a être toujours à l’écoute,
    à s’intéresser aux talents émergents, à les encourager à poursuivre, à tenir sur cette voie de la passion. On la croisait souvent au Forum Leo Ferré d’Ivry. Elle venait écouter Garance, Agnès Bihl, et tant d’autres dans diverses salles. Je me souviens d’ailleurs avoir croisé Agnès aux folies Bergères à l’occasion d’un superbe concert de musique Tzigane « les Yeux noirs ». Je l’avais taquinée en lui disant que nous faisions partie « des gens qui doutent »
    (elle en avait marre qu’on fasse toujours référence à cette chanson alors qu’il y en a tant d’autres superbes dans son répertoire) Elle m’avait répondu :  » Les jeunes, ne doutez pas trop quand même! ».
    Au revoir Madame. On va suivre ce conseil et ne jamais douter de cet engagement pour la chanson qui a été le votre pendant plus de 60 ans.

    Répondre
  14. Agnès 1 décembre 2020 à 21 h 55 min

    Les Fabulettes, à tout jamais les tubes de mon enfance!
    Fabuleux article.

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  15. NosEnchanteurs 1 décembre 2020 à 22 h 27 min

    Lu sur facebook ce post d’Agnès Bihl :

    Anne,
    Impossible de parler de toi au passé.
    Tu seras toujours une Grande Dame et une merveilleuse Amie.
    Je suis malheureuse comme une pierre tombale, mais je pleure ton départ autant que je souris pour tout ce qu’on a vécu. Mon coeur est aussi vide de toi qu’il est rempli de nos fous rires, nos chansons, nos spectacles partagés avec Nathalie, Dorothée, Yves, Bernard, Gérard et les autres Irréductibles…on s’en est payé des nuits blanches à discuter jusqu’au matin autour d’un verre ou douze !
    Il parait que tu es née il y a 86 printemps mais ton coeur est adolescent, je te revois encore sur le port de Paimpol me raconter fièrement que sur un bateau du temps de Glénands, tu valais bien 3 hommes…tu as toujours été si forte…
    Fragile aussi bien sûr…mais pas comme une tasse en porcelaine ou un vase en cristal, oh ça non. Plutôt comme de la nitroglycérine. A manier avec précaution, ça fait partie de ton charme et de ta merveilleuse humanité.
    Qui vais-je appeler maintenant pour lire la primeur de mes nouvelles chansons? Avec qui vais-je jouer aux dés ou me faire des soirées Fromages – Bourgogne en refaisant le monde de jolies chansons?
    Anne,
    Je sais qu’on ne se verra plus, mais je sais aussi que tu es vivante. Ecrire pour ne pas mourir n’est pas seulement une de tes plus belles chansons, c’est surtout ta manière à toi de ne jamais partir pour de bon. Je te connais Carcasse, tu es juste allée te faire une grande ballade au paradis des chanteurs, et entre Leprest Brel et Brassens, ça ne doit pas boire que de l’eau bénite. Je vous fais confiance.
    Tu vas me manquer ma chérie, ma source, mon arbre. Mon amie. Ma toute belle. Je me sens orpheline de ma mère spirituelle et j’ai les yeux rongés de larmes.
    Mais je te sais par coeur, pour toi vivre est une idée fixe et têtue comme tu es, j’imagine en ce moment tes si beaux yeux verts briller comme 2 nouvelles étoiles, naissantes et gourmandes de ciel.
    Tu vois,le spectacle n’est pas fini mon Anne…écoute…on t’applaudit encore…
    On t’applaudira toujours.

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  16. NosEnchanteurs 1 décembre 2020 à 22 h 31 min

    Lu sur facebook ce post d’Yves Jamait :

    Anne Sylvestre n’est plus…
    Triste nouvelle encore, Anne s’en est allée dans les bras d’un automne qui n’en finit pas de me transir de tristesse. Une ribambelle de souvenirs qui se bousculent… Sa voix… Ses mots… Il va falloir naviguer sans fard… Le lac St Sébastien s’est tu pour toujours.
    J’ai eu, comme beaucoup, cette chance de partager de nombreux moments avec elle, principalement sur scène.
    Lors des “Bar à Jamait” dont elle faisait partie du “noyaux dur” avec Nathalie Miravette, Bernard Joyet, Agnès Bihl et Gérard Morel.
    Ensemble nous formions, avec les musiciens et les techniciens, une équipe, l’espace d’une représentation nous étions une troupe.
    Ensemble on accueillait d’autres chanteuses et chanteurs.
    Elle était curieuse de chacune et chacun et je sais que ça la rendait heureuse, que c’était là, sur scène, qu’on avait le plus à partager.
    Et on en a profité !
    Avant, pendant et après le spectacle, trois heures durant à rire, danser, manger, boire et chanter… Vivre quoi…
    Elle m’avait aussi, à deux reprises, invité à venir la rejoindre sur sa scène. J’en avais été très ému. À tel point que, même si je faisais le mariole, je ne crois pas avoir été très bon ces deux soirs-là…
    Je me souviens de l’accueil que lui avait fait le public lorsque je l’avais invité à venir partager une chanson avec moi au zénith de Dijon… De son entrée… De mon émotion… Et de ma fierté aussi…
    J’ai tout ça et plein d’autres instants aussi bouillonnants de vie qui grouillent dans ma tête et inondent mon corps. Je suis plein d’elle aujourd’hui… et tellement vide pourtant…
    Sur le dernier SMS qu’elle m’a envoyé elle a écrit : “Merci Yves pour ta pensée ! moi aussi j’ai hâte qu’on se retrouve pour faire de la musique… et de l’amitié !
    Bises Anne”.
    J’ai été heureux de faire de l’amitié avec elle et je ne sais pas si je lui ai assez dit merci…
    Il fait gris dedans et dehors le ciel est raccord.
    …Une pluie de peine…

    Répondre
  17. NosEnchanteurs 1 décembre 2020 à 22 h 35 min

    Lu sur facebook ce post de Christopher Murray et Les 3 Becs :

    Anne nous a quittés et notre peine est grande. Nous garderons le souvenir de son émotion et des mots échangés à la fin du spectacle « La centième nuit » au Forum Léo Ferré en février 2015. Ce soir-là, en petite forme, j’avais eu des trous de mémoire, fait des erreurs de texte. De la salle Anne me soufflait ou me corrigeait, d’un air faussement sévère et indigné. Souvenir rieur parmi tant d’autres, de ceux qu’on garde au fond du coeur et qu’on évoque sourire aux lèvres. Au revoir Anne, merci. Nous continuerons de te chanter.
    Christopher pour Les 3 Becs

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  18. NosEnchanteurs 1 décembre 2020 à 22 h 44 min

    Lu sur facebook, ce post de Serge Le Vaillant :

    Anne Sylvestre est morte et la France entière lui rend hommage. Qui achetait ses disques de son vivant? A part les fabulettes qui lui valent éternité auprès des plus petits. Les plus grands la recevaient-ils dans leurs émissions de radio ou de télé? Que dalle… Elle méritait pourtant d’être entre Brel, Brassens et Férré dans le triptyque de Leloir. Mais à l’époque on la surnommait encore « Brassens en jupons ». Dans les commentaires FB des professionnels de la profession, je vois beaucoup de larmes de cannibales qui sucent les os de leur mère. Quand je la recevais sur Inter, alors qu’elle faisait l’effort de chanter en direct à 1 heure du matin pour la petite planète des auditeurs de nuit, le lendemain la direction me reprochait de n’avoir pas mitigé l’émission avec des titres de la play-list… Bande de cons ! Anne, il fallait lui prouver qu’on l’aimait du temps de son vivant.

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  19. Druelles Jean-Paul 2 décembre 2020 à 12 h 51 min

    Et ce matin là, chez Léa Salamé sur France Inter, en 2018, quand Jean-Louis Murat nous interprêta « Un mur pour pleurer » pleine d’émotion… Merci Anne & JLM…

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  20. Marie Wilhelm 2 décembre 2020 à 13 h 18 min

    Merci pour cet hommage. Nous sommes nombreux à pleurer.

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  21. NosEnchanteurs 2 décembre 2020 à 19 h 45 min

    Lu sur facebook, ce post de Francis Debieuvre :

    J’ai souvenir d’une nuit à Barjac… Il était plus de minuit et j’étais avec Nathalie Lillo. Nous rentrions des scènes ouvertes avec ma voiture et regagnions une maison louée à plusieurs en lisière du village. Nous roulions le long de la grande place arborée.
    Nathalie me dit soudain « c’est Anne, arrête toi! »
    Ce que je fis. Anne Sylvestre qui marchait toute seule en pleine nuit sur le trottoir, monta à côté de moi, sans doute que Nathalie, lui avait laissé la place pour la circonstance, et nous l’avons ramenée à son gîte.
    Je me souviens, avant de la laisser sur le pas de sa porte, de son remerciement mais surtout de son regard profond et lumineux qui valut à ce moment là tous les trésors du monde…
    J’ai revu Anne Sylvestre dans cette maison que nous habitions nombreux, le temps du festival…
    J’y plantais ma petite tente igloo dans un morceau de pré adjacent.
    Beaucoup de gens venaient souvent y passer un moment, plonger une tête dans la piscine, partager un repas, principalement des chanteurs et chanteuses, mais pas seulement…
    Anne Sylvestre fut invitée un jour à l’un de ces repas.
    Avant les agapes, nous nous retrouvâmes à très peu, assis sur les canapés du salon, avec elle.
    Je me souviens de ce moment très touchant où Vincent Barnich, chanteur belge, lui joua une chanson qu’il avait composée en son hommage, évoquant son enfance et les « Fabulettes ». Elle en fut profondément émue.
    J’ai pu, à cette occasion aussi, la remercier de tout le bonheur qu’elle m’avait procuré quand, passant de classes en classes, en tant qu’instituteur, je chantais ses chansons, accompagné de ma guitare. C’était dans mes années ariègeoises…
    Je lui parlai particulièrement d’une chanson qu’elle avait écrite pour les enfants et que je trouvais extraordinaire, tant le message et le thème était pour moi d’une grande profondeur.
    Cette chanson s’intitule « Veux-tu monter dans mon bateau… », la mélodie, toute simple, en est très belle également. Elle raconte un enfant capricieux invité à monter dans un bateau et qui rechigne, en disant qu’il n’est pas assez beau pour lui, jusqu’au moment ou par caprice toujours, il trépignera, cette fois, pour embarquer. Mais là, et sans complaisance, l’accès lui en sera refusé.
    Quelle belle leçon pour cet enfant… ! Quelle possibilité pour lui de s’édifier à travers l’exigence d’un milieu dont le dépassement de soi et l’humilité sont les valeurs essentielles et avec lesquelles on ne transige pas…. Valeurs pour lesquelles, un bateau, sorti des ateliers, peaufiné avec soin, patience et attention, revêt quasiment un caractère sacré…. En profondeur et dans cette chanson, il y a tout cela et c’est pour cette raison qu’elle touchait tant les enfants quand je l’interprétais, car au delà des mots, ils en saisissaient le fondement.
    Anne Sylvestre me raconta que cette chanson provenait justement de sa rencontre avec un constructeur de voiliers, dont elle me dit le nom et qui se trouvait, je crois, dans le Finistère….

    Voilà donc le récit de ces quelques rencontres furtives avec cette grande dame de la chanson.
    J’ai le regret à ce jour, bien sûr, de ne pas l’avoir connu d’avantage. Mais, c’est ainsi….et cela se mérite sans doute… Mais cependant ces instants, aussi brefs qu’ils furent, n’en demeurent pas moins des plus précieux….
    Vous mes amis chanteurs et chanteuses qui l’avez fréquentée bien d’avantage et qui furent leurs ami (e)s, je sais combien elle a compté pour vous et je m’associe grandement à votre tristesse.
    Je pense à Nathalie Lillo, à Coline Malice, à Vincent Barnich, Martine Scozzesi, Viviane Boris, Flavia Perez, Gilbert Lafaille, Bernard Joyet, Gérard Morel et bien d’autres personnes encore……car la liste serait bien longue. Pardonnez-moi de ne pas vous citer tous.
    Je pense aussi à Maï et Marc, de l’Arthé Café, qui adoraient ses chansons et dont l’un des derniers cadeaux de Noël (pour Maï) fut l’intégrale de son oeuvre. Je les sais aussi dans le chagrin…. et les embrasse bien fort…
    Pour définir Anne Sylvestre en tant que femme voici ce qu’écrit Gérard Morel ce matin et qui choisit, pour cela, le présent.
    « Elle si forte, si belle et fidèle, elle si généreuse et courageuse, exigeante, intransigeante, râleuse, rigoureuse, si talentueuse, sensible, accessible, disponible, irrésistible, rebelle et re-fidèle, élégante, délicate, combattante, indulgente, populaire, solidaire, pugnace, cocasse, rieuse, moqueuse, attentive, attentionnée, elle, la glaneuse inventive, la poétesse incisive, elle la fidèle, si fidèle… va nous manquer tellement ! Nous l’aimions tant !
    A cela Viviane Boris répond avec tendresse.
    « Oui, elle est tout ça et même plus encore et même pire. Oh Anne, je t’aime tant… !»
    Voilà dans vos nombreux et précieux témoignages, ce qui me conforte et m’éclaire sur l’idée que j’avais d’elle. Un être dans toute sa richesse, aux multiples facettes, pourvu d’une grande attention aux autres, transcendant ses blessures et son extrême sensibilité par une écriture sublime….
    Pour finir, je reprendrai cette formule de la chanteuse Flavia Pérez, qui fait écho en moi car elle laisse des portes ouvertes sur une espace plus vaste que notre chagrin bien légitime….. Elle s’adresse à Anne en disant « Tu t’absentes, mais je crois qu’on ne meurt pas… ! »
    Bonne journée à vous tous en pensée auprès d’elle….

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  22. NosEnchanteurs 2 décembre 2020 à 19 h 47 min

    Lu sur facebook, ce post de Gérard Morel :

    Quelle gueule de bois ce matin ! Le cœur tout barbouillé…
    Elle si forte, si belle et fidèle, elle si généreuse et courageuse, exigeante, intransigeante, râleuse, rigoureuse, si talentueuse, sensible, accessible, disponible, irrésistible, rebelle et re-fidèle, élégante, délicate, combattante, indulgente, populaire, solidaire, pugnace, cocasse, rieuse, moqueuse, attentive, attentionnée, elle, la glaneuse inventive, la poétesse incisive, elle la fidèle, si fidèle… va nous manquer tellement ! Nous l’aimions tant ! Nos sanglots auront beau faire, ils ne noieront pas notre chagrin.

    Répondre
  23. Kaly 4 décembre 2020 à 11 h 50 min

    Quelle chance j’aurai eue moi aussi de côtoyer Anne de son vivant, en stage d’écriture à Pourchères ! Tant d’artistes ne sortent de l’oubli des médias qu’au moment de leur mort, pour y retomber illico, dans l’oubli !

    Je reprends à mon compte quelques mots de Serge Le Vaillant, dans les commentaires ci-dessus : « Je vois beaucoup de larmes de cannibales qui sucent les os de leur mère » : j’applique bien sûr ces paroles à tous ces faiseurs de radio bla-blaz-bla, qui encensent une personne non pas pour son talent, mais pour meubler. Ou parce qu’elle disparaît, parce que quand même…

    Heureusement que je peux retrouver ici un public et des artistes d’une toute autre trempe.

    Radio-Zinzine vient de republier une longue interview, une vraie, avec des chansons, des silences, le respect mutuel des personnes qui se partagent le micro. Anne s’y raconte beaucoup, depuis le début :
    http://www.zinzine.domainepublic.net/?ref=5399

    Ciao Anne, que tes chansons continuent de vivre, maintenant que tu as passé cette porte que nous devons tous franchir un jour.

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  24. NosEnchanteurs 9 décembre 2020 à 10 h 16 min

    Lu, sur facebook, ce post de Guillaume Aldebert :

    Tellement triste d’apprendre le départ d’Anne Sylvestre ce matin en pleine répétition, immense dame de la chanson pour enfants, pour adultes … de la chanson tout court.
    Gracieuse et toujours libre. A celle qui m’a accompagné de près ou de loin depuis ma plus tendre enfance, du premier vinyle des Fabulettes ramené par mes parents à la maison, quand j’étais tout p’tit, jusqu’à la scène de l’Olympia, et qui nous avait fait l’honneur de compter parmi les premiers invités de l’aventure Enfantillages. Une pensée également pour tous les amis et les copains qu’elle a fédérés tout le long de sa carrière

    Répondre
  25. Hervé Lapalud 6 février 2021 à 16 h 26 min

    Chère Anne,
    Certains oiseaux blessés apprennent à voler sur le dos,
    et incitent tous les autres à lever la tête.
    C’est la phrase qui m’est venue ce matin en pensant à toi.
    J’ai pris mon stylo bleu ciel pour te parler. Tu vois.
    On ne s’est jamais parlé beaucoup, on ne s’est jamais parlé longtemps, mais l’on s’est croisé souvent, et l’on a partagé des chansons dans le mitan de la nuit. Quand j’entonnais « La Petite Maison » de Roger Riffard, tes yeux brillaient et tu enchainais avec « La Margelle ».
    On faisait partie de cette même confrérie, j’aimerais dire « consoeurie », d’ailleurs je le dis. Et tu en fais partie bien sûr encore, même si tu es un peu moins tangible, depuis un jour ou deux.
    D’autres que toi porteront tes mots, ta voix. D’autres s’intéresseront demain à la chanson, et découvriront stupéfaits qu’un Riffard… qu’un Dimey… qu’un Mathieu Côte… qu’une Anne Sylvestre…
    Ils endosseront ton costume de plume et se sentiront légers pour quelques instants. La chanson appartient à celui qui la chante, je crois, à celui qui la fait vivre, qui l’apprend et la transporte, qui l’apprend par le cœur.
    Sais-tu Anne, non je ne te l’ai jamais dit je crois, qu’une des premières chansons que j’ai entendues dans la bouche, sur les lèvres de mon amie Réjane, c’étaient une des tiennes ? La Valse Marine, elle s’appelle. Je ne connaissais ni son titre, ni ton nom. Mais Réjane la fredonnait souvent :
    J’ai le souvenir d’une nuit sans lune
    Où nous effeuillâmes quelques goémons
    Où nous nous promîmes et pas pour des prunes
    Amour éternel, merveilles et monts
    Amours maritimes et volontiers rustres
    Dont le vent du large accroit l’appétit
    Hélas, ce n’étaient qu’des amours lacustres
    Vous aviez mon cher cœur sur pilotis
    Vous aviez mon cher cœur sur pilotis
    « Cœur sur pilotis », j’aurais bien aimé écrire cela, mais puisque cela existe, je le fais mien, je le porte dans mon cœur. J’entends la voix de Réjane qui se mêle à la tienne, qui se mêle à la mienne, au bout de mon stylo bleu ciel.
    Tu as semé des vagues, tu as semé des flots, tu as jeté tes cailloux de petit poucet rêveur dans l’eau et l’onde atteindra la rive bientôt. Des chansons rares remontent parfois du fond de la mare et sauvent un ou une qui se noie.
    Tu aimais la chanson, Anne, comme peu, comme Claude l’aime.
    Tu aimais la chanson au-delà des tiennes, au-delà des chapelles,
    tu aimais que chacun sculpte son singulier pour fabriquer de l’universel.
    Tu allais voir et entendre tes ami(e)s de longue date, ou les nouvelles pousses, et tu écoutais, non comme un professionnel qui distribue des subventions, qui octroie des programmations, qui sait ce qui est beau et bon, et « in » et « tendance ».
    Non, tu écoutais avec tes yeux qui brillent et ton cœur d’Enfance.
    Van Gogh dit à son frère Théo dans une lettre « Trouve beau tout ce que tu peux, on ne voit jamais assez le beau ». Tu ne jugeais pas une voix ou une écriture, tu recevais l’humain, te demandais juste s’il était assez « lui »,
    si elle était assez « elle ». Et c’est ce que tu offrais j’imagine dans ces ateliers d’écritures auxquels je n’ai jamais participé mais dont j’ai eu de nombreux échos.
    « Est-ce toi ? » « Est-ce suffisamment toi ? »
    « Qu’y a –t-il là dedans qui ne t’appartient pas ? »
    Tu n’as cherché rien d’autre, Anne, dans ton chemin de mots, être toi, accorder ton âme à ton « dire », accorder ton âme à ta lyre. Ecrire ces petits objets insignifiants que sont les chansons, mais dans lesquels on peut se blottir seul(e) les jours de pluie, ou qu’on peut brailler en bande dans le mitan de la nuit.
    Certains oiseaux blessés apprennent à voler sur le dos,
    et incitent tous les autres à lever la tête.
    C’est la phrase qui m’est venue ce matin en pensant à toi.
    Hervé
    3 12 20

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