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Bartleby, chanteur rêvaliste

Bartleby au Jam Photo ©Jossuah Théophile

Bartleby au Jam Photo ©Jossuah Théophile

Bartleby, ce nom vous évoque sans doute quelque chose. Le héros d’une nouvelle d’Herman Melville, l’auteur de Moby Dick, écrite au XIXème siècle, adaptée de nombreuses fois au Théâtre et au Cinéma tant au XXème qu’au XXIème siècle. Son héros, obscur et discipliné scribouillard dans une étude de notaire, décide un jour d’abandonner son travail de copiste, le jugeant sans doute sans intérêt, sans toutefois justifier sa décision. Il dit simplement : « I would prefer not to », Je préfèrerais ne pas (le faire). Rien ni personne n’arrive à casser cette résistance passive. Toutefois, il reste présent à son bureau, le squattant même, jusqu’à ce que son patron ne le renvoie, causant à terme sa mort. De nombreux psychologues, sociologues, philosophes, voire politiques se sont penchés sur cette « démission silencieuse » qui devient un mouvement d’ampleur à notre époque post covid, soulignant la distance entre les aspirations à l’épanouissement personnel, à l’utilité sociale et aux échanges humains que le travail est censé apporter, et les tâches répétitives, sans intérêt voire nuisibles imposées plus que composées avec les entreprises, s’accompagnant d’un manque de reconnaissance tant morale que financière.

Mais revenons à notre Bartleby – dont le nom de scène n’a rien d’une coïncidence – cet artiste sélectionné parmi les finalistes du Prix Georges Moustaki, Florent Lebel qui se définit comme faisant de la chanson rêvaliste, avec son EP « L’amour réaliste », sorti à mi 2022. « Son truc, c’est de ne jamais vouloir faire ce qu’on lui demande : puisque « l’anglais ça sonne mieux » il chante en français et comme « l’électro c’est ça qui marche » il s’accompagne à la guitare acoustique. Bartleby n’écrit pas tout ce qu’il pense mais pense tout ce qu’il écrit. ». En 2019 il reprenait La vie ne vaut rien, de Souchon, qui donne une idée de sa sensibilité. Originaire de Montpellier, il s’est formé au piano puis à la guitare, a co-fondé plusieurs groupes locaux qui ont su se faire une place sur des scènes-chanson nationales, La Cigale, les trois Baudets…, et s’est formé à l’écriture dans les ateliers de Claude Lemesle, au Studio des Variétés à Paris et au Jam à Montpellier.

Florent Lebel écrit et compose ses chansons, et a confié les arrangements et la réalisation à Daran, qui l’accompagne à la guitare baryton, à la basse et au rhodes, rencontré à Astaffort en 2019. Signe de la qualité à laquelle cet « homosépia au cœur éponge, une espèce en voie de disparition qui descend du songe » aspire. Raphaël Chassin est à la batterie sur l’album. 

Son album, financé par une campagne participative, comprend cinq chansons délicates, sur des musiques pop-folk mélancoliques ou joyeuses. De sa voix douce, il nous parle avec pudeur de couples qui se défont (C’est pas comme si « j’avais / Foutu en l’air ma paire d’ailes / En voulant m’envoler / Trop près de ton soleil »), s’ennuient (L’amour réaliste : « Tous les mots doux sur le frigo / Se sont changés en to-do list / Juliette écrit à Roméo / Sur des morceaux de post-it », s’entrechoquent : « On file une belle idylle / Mais bon elle est si malhabile / Qu’un beau jour j’en ai bien peur / Elle me cass’ra le cœur » ou se reforment (Il faudra bien que quelqu’un l’aime). Thème moins souvent traité de la paternité choisie, quand l’amour dépasse les gènes et accepte l’enfant d’un autre, un bijou de chanson : « Quand on ne trouvait plus les mots / Pour se dire « Je t’aime » / Ce gars là t’a fait un marmot / Il faudra bien que je l’aime ». 

Il milite aussi pour un autre progrès, plus humain « Si dans un futur proche / Nous vivons le remake / D’une fiction catastrophe / Signée Houellebecq / Qui pourra dire encore / Sans l’ombre d’un regret / C’est l’envers du décor / On n’arrête pas / Le progrès » (n’a-t-il pas composé une chanson pour faire la « vélorution », Je suis l’un des deux). Lebel rebelle, rêveur et tendre, l’humour en plus, on en reparlera. 

Rendez-vous au Prix Georges Moustaki à mi-février avec d’autres talentueux candidats pour le vote du Public. La finale aura lieu le 9 mars au Centre international de conférence Sorbonne Université, campus Pierre et Marie Curie.

 

Bartleby, L’amour réaliste, Simple silence/Kivive, 2022. Le site de Bartleby, c’est ici. Sa page facebook, là. Ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, ici. 

L’amour réaliste Image de prévisualisation YouTube
Le progrès Image de prévisualisation YouTube
Il faudra bien que quelqu’un l’aime Image de prévisualisation YouTube

 

 

 

 

 

 

 

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