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Viricelles 2023. Vissotsky, O’sman : guerre guerre, vente vent [2/2]

Lise Martin et Valentin Vander (photos Nadine Le Roscouet)

Lise Martin et Valentin Vander (photos Nadine le Roscouet)

29 avril 2023, Festival Enchant’Emoi à Viricelles, 

 

« Je vais mourir, l’ouragan me fauchera comme un épi / À l’aube un traîneau me halera dans la neige / Chevaux, je vous en prie, ralentissez un peu le pas / Étirez mon dernier voyage jusqu’à mon dernier cri… »

À plus de deux mille kilomètres de là, des gens qu’on bombarde, qui ne verront pas le jour d’après. Et d’autres, de l’autre côté, qu’on embrigade de force pour massacrer contre leur gré. Nous, dans la pénombre d’une salle, d’une scène qu’éclairent moult bougies, des chansons nous parlent de guerre, de peur et de mort. Des chansons d’un fameux poète russe interdit à son époque d’avant perestroïka qui, s’il vivait encore, serait au mieux dans un lointain et froid goulag, égrenant les décennies qui lui restent à purger ses crimes de lèse-majesté, d’envie de paix, d’amour et de liberté.

L’auteur d’une œuvre puissante, humaine et intemporelle, dont suinte à l’évidence la dimension politique, d’une brûlante et tragique actualité. « Je n’aime pas l’issue fatale / Jamais l’existence ne me lasse / Et je n’aime pas ces instants-là / Ces instants où je souffre, où je bois… »

C’est loin l’Ukraine, loin la Russie, mais étonnament palpable, tangible. C’est dire si ce récital de chansons de Vladimir Vissotsky ne peut que nous parler, étrangement nous enchanter.

Vissotsky 3Sur scène Lise Martin et Valentin Vander. Ce spectacle, « Presque un cri… », fut à l’origine une commande. Comme Lise avait quelques titres de Vissotsky à son répertoire, un directeur de salle plus avisé que d’autres lui proposa d’en faire toute une création, que Lise proposa à Valentin de partager. Depuis, la Toulousaine et le Parisien sèment et parsèment les vers de ce soviétique interdit de son vivant.

« Juste avant la mitraille / Avant que la bataille ne reprenne / Au son des canons / Juste avant le vacarme… »

Valentin est à la guitare, Lise parfois à l’ukulélé. Les deux chantent, en alternance, parfois ensemble. La voix de Valentin est forte, sentencieuse. Étonnante, insondable, la voix de Lise est à elle seule profondeur de chant. De champ de bataille… Une voix comme un mystère qui fait écho au poète qu’elle chante. Lise et Valentin se complètent, s’ajustent, partagent l’immense tâche de vulgarisation et de beauté qui est la leur : faire connaître Vissotsky, cette voix des peuples qui tutoie l’universel. La tâche est plus nécessaire encore depuis que, de son bunker moscovite, un fou fait feu de toute arme pour anéantir tout un peuple. Se réjouir des vers de Vissotsky n’est pas les instrumentaliser contre Poutine : c’est simplement opposer l’intelligence et la sensibilité à la barbarie.

Ce fut, n’en doutez pas, le grand moment de ce festival certes petit mais dense, aux mots chargés mais aux rimes jolies. Ce duo-là, Lise et Valentin, frise la perfection. Et, dites, qu’elle est belle la poésie de Vissotsky !

 

 

Louise O’sman : Hommes et éléments…

Osman 1Est-ce effet d’optique, ou simplement son art qui la grandit, Louise O’sman fait immense en scène, la pleine mesure de son talent. Un chromatique, un banjo transparent et ces trucs, ces samples, qui démultiplient une voix claire, résolue, parfois saccadée, doublent voire décuplent son chant… tout est prêt pour un concert organique et onirique, à mille lieux du côté sombre, en pleine lumière, par petites touches d’une jolie et inventive poésie. L’inspiration est végétale, minérale, amoureuse. C’est peu dire que la prestation de Louise O’sman tranche en ce festival, comme une clairière en pleine forêt, « au milieu des chênes lourds / dans la forêt qui t’appelle / tes feuilles parlent d’autres jours / frêle, frêne ». Il y a l’O’sman des villes et celle des forêts, des rivages. Ses chansons sont paysages, panoramiques. N’en reste pas moins que, derrière des vers bien troussés, son propos est lui aussi inquiet, le nourrissant d’incertains. Les saisons défilent dans ses chansons, qu’on sent contrariées. Et d’appeler « que les pluies diluviennes engendrent / les moissons / dorant les blés, l’orge et le son ». Hommes et éléments partagent les chansons de Louise, équitablement, harmonieusement, musicalement… Ne voulant pas faire trop redite, on lira ce que j’avais écrit d’elle en novembre dernier, lors du festival des Oreilles en pointe. Je n’y retouche ni retranche le moindre mot.

 

Le facebook de « Presque un cri… » c’est ici ; ce que NosEnchanteurs en avait déjà dit, c’est là.

Le site de Louise O’sman, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

 

Lise Martin et Valentin Vander « La Lettre » : Image de prévisualisation YouTube

Louise O’sman « Tandem live session » : Image de prévisualisation YouTube

2 Réponses à Viricelles 2023. Vissotsky, O’sman : guerre guerre, vente vent [2/2]

  1. Marie-Liesse Beauvarlet de Moismont 16 mai 2023 à 16 h 11 min

    Ce moment avec Lise Martin et Valentin Vander a été bouleversant de beauté, d’émotions….un grand moment comme je les aime ! Bravo à eux !

    Répondre
  2. Anne-Laure Girardot 16 mai 2023 à 16 h 12 min

    Merci Michel de ces mots que je partage à 100%. Tant sur le bouleversant et nécessaire Presqu’un cri de Lise Martin et Valentin Vander que sur l’onirisme de Louise O’sman qui m’a beaucoup touchée malgré l’inexorable fatigue de fin de soirée…
    Bravo à eux trois !

    Répondre

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