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Cécile Corbel, sur le dos du dragon

 

Cécile Corbel (photo (C)Gabriel Mercier)

Cécile Corbel (photo (C)Gabriel Mercier)

Le parolier et compositeur (par ailleurs scénariste et metteur en scène) de ce nouvel album de la chanteuse bretonne Cécile Corbel n’est pas, excusez du peu, n’importe qui : « chevalier de l’Ordre des arts et des lettres ; membre de l’Académie des sciences, des arts et des belles lettres de Caen… », mazette. Lui, c’est Laurent Tixier qui, sur l’épais livret de ce CD, se fend d’un long texte didactique pour présenter le pourquoi et le comment de cette création, La Fille du Verseau.

Où on peut se contenter de savourer les quatorze titres, ouverture incluse (qui n’est pas sans faire songer à celle de L’Albatros fou, de Servat et Triskell), de ce nouvel opus. La voix de notre bretonne, sa musique enchanteresse, tout nous est miel en ce treizième album de la Finistérienne.

Mais c’est une toute autre affaire que celle-ci, et la lecture du livret est pour le moins instructive. C’est comme la revendication d’une Nouvelle Armorique qui réunirait Bretagne et Grande Vendée, sur « le dos du Dragon, terre vivante dont la tête situe à Saint-Michel de Braspart, les ailes au Mont Saint-Michel et la queue à Saint-Michel Mont-Mercure ». Saint-Michel n’a-t-il pas terrassé naguère le dragon, si on en croit cette fable religieuse ? « Qui est né sur le dos du Dragon, entend la terre, qui gronde / Et entend le chant des menhirs, et celui des ombres / Et les vieilles chansons d’Armorique ».

Tout concourt ici à ce projet. Même les musiciens (six bretons et quatre vendéens) font union. Leurs instruments ? Claviers, guitares, percussions, violoncelle et violons, alto, flûtes, bombardes de dubuk, luth et théorbe, oud et fauconnier rejoignent la harpe de la chanteuse.

Cecile Corbel La Fille du VerseauOutre cette volonté politique et culturelle d’unir deux régions, La Fille du Verseau se prête à d’autres lectures dont l’astrologie n’est évidemment pas absente. La magie l’est tout autant, Brocéliande n’est jamais loin des traditions bretonnes : « Je parle avec les chimères, les lutins et les crapauds / Les fabliaux, les mystères, n’ont de secret que les mots ». Légèreté et gravité ; les traditions comme l’histoire. Ainsi Coeur de Breizh, dédié à Morvan Lez Breizh, premier roi de Bretagne qui, dit-on, impulsa la révolte de son peuple contre l’envahisseur franc, au 9e siècle. Ainsi les guerres, nombreuses, de cent ans, de religions, de Vendée lors de la Révolution, des tranchées… « On nous prépare la guerre / On nous prépare aux combats / Le cul sur la poudrière / Beaucoup n’en reviendront pas… » On peut songer aussi à une autre et actuelle guerre, à plus forte raison que « qui du couteau, qui du fusil en passant par le nucléaire / notre avenir vire au nucléaire ». Et de revenir, par une longue et tragique complainte (un gwerz), sur le massacre des Vendéens : une des grandes réussites de cet album.

Du médiéval (oh ce Louvetier que n’aurait pas renié Malicorne dans son Bestiaire !) au trad’ celtique, par cet opus paru aux premiers jours de l’été, Cécile Corbel nous propose des titres d’une très grande richesse et de cette beauté qui lui est coutumière. Mais plus encore que les précédents albums, le contenu, le dedans des textes, mérite une écoute soutenue, et pas uniquement du côté de la Vendée. Quand l’Histoire s’allie avec le mystère…

 

Cécile Corbel, La Fille du Verseau, Éditions du Dragon 2023. Le site de Cécile Corbel, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

« La Fille du Verseau » : Image de prévisualisation YouTube

« Extinction » : Image de prévisualisation YouTube

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