Le Machin à remonter le temps
Oh, je vous parle d’un temps que… C’était en fin des années soixante-dix, au paroxysme du mouvement folk de nos peuples de France. Ou juste après, avant la grande chute. Il y avait Mélusine. Et Malicorne. Et entre les deux la grande fracture des folkeux, le motif d’impitoyables guerres fratricides. En gros les z’authentiques contre les n’importe quoi. Je bouffais aux deux rateliers, trouvant un égal plaisir dans ces tendances qu’on disait opposées. J’aimais la bande à Guilcher, Dutertre et Baly autant que j’adulais celle, électrifiée, à Yacoub. C’était l’époque des bals folk. Un candidat à l’élection présidentielle allait bientôt sortir un autocollant qui disait « Mes baskets votent écologistes ». Les miennes étaient toutes vertes qui faisaient tournoyer les filles en des scottishs pas possibles et des bourrées sans éthylotest. C’est dans la danse que je les épuisais, que je les finissais… En ces moments-là un groupe entre tous atypique est venu troubler le jeu, jouant de l’ancien au seul prétexte que ça avait le vent en poupe. C’était Machin, des franc-comtois relax et décomplexés : Moi je suis un folkeux qu’ils chantaient dans une sorte de néo-folk, ou de folk d’après, d’avant-garde, de « folklore contemporain », les historiens trancheront un jour. Ces quatre-là étaient un jour folkeux et le lendemain accompagnaient un chanteur tout aussi étrange, longues bacchantes, qui distribuait des cacahuètes aux spectateurs à la fin de son concert, un qui chantait La Cancoillotte et La Fille du coupeur de joints. Ces branques musiquaient chez Thiéfaine pour grossir leur compte en banque. Machin c’est toute une époque, musicale certes, mais pas que. Une odeur, une insouciance et forcément des lendemains qui chantent, du moins le croyait-on. Ils ont déchanté. C’est dire un peu la nostalgie en nous réveillée quand, pas loin d’un quart de siècle plus tard, en 2003, les Machins se sont retrouvés pour reprendre du service (c’est d’ailleurs l’Hubert-Félix qui les a bien incité, dès 1998, en leur offrant Bercy pour se reconstituer une première fois). Et quitte à faire d’abord se compiler. Puis s’exposer à de nouvelles scènes et même refaire un live, deux ans plus tard, quitte à en modifier quelque peu le flacon et les vers : « Moi j’étais un folkeux / Maint’nant il faudrait que je me relookeu ».
L’un des quatre, le guitariste Jean-Pierre Robert, s’est même il y a peu fendu de deux disques à lui tout seul, tout beaux tout bons, qu’il vous faut découvrir sous peine de louper quelque chose.
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