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Les vingt-cinq ans de Chanson plus bifluorée

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Richardot, Cherrier et Puyau (photo d’archives DR)

Au moment même où sort en bac leur nouvel et étonnant opus, « sélection originale de textes choisis parmi les plus inspirés de la poésie française » (Victor Hugo comme Maurice Carême, Charles d’Orléans comme Charles Baudelaire…), c’est paradoxalement à un tout autre répertoire qu’ils nous convient sur scène : rien que le leur, pastiches inclus ! Mieux encore, le best-of de leurs vingt-cinq ans de carrière un rien déjantée. Les festivals Alors, chante de Montauban et Paroles et Musiques de Saint-Etienne viennent d’avoir cette semaine la primeur de cette superbe compile scénique, sans aucun doute le spectacle le plus maîtrisé, le plus revigorant du moment, un music-hall habité, réhabilité, pour plus de deux heures d’absolu plaisir.
Oh, bien sûr, tout n’y est pas, ni leur Petit Pasqua noël ni leur Aimé (ce dernier pourtant créé dans le vert footballistique de Saint-Etienne), ni leur parodie de Cabrel ni José Bové… C’est pas l’intégrale. Mais il y a bonne mesure, bon poids. Et franches rigolades. Le tout mené tambour battant. Tant que c’est avec la parodie du succès d’Il était une fois, Moi je fais la vaisselle, – image mémorable de Sylvain au clavier et ses deux copains juchés sur le piano à queue – qu’ils débutent ce récital qui devrait faire date.
Tout y est réglé au quart de poil, chansons et interventions, gestuelles, lumières… Une précision millimétrée qui fleure le bon temps autant que le Montand. Qui prouve, s’il le fallait encore, l’exceptionnelle maîtrise des Sylvain Richardot, Michel Puyau et Xavier Cherrier, ces maîtres es-éducation populaire qui vont instruisent en chansons tant des sciences et techniques (Le moteur à explosionLes micro-ondes, L’informatique), d’ethnologie (Ah, le tango corse, D’Georges Bouch’) que de mœurs et de pratiques particulières (Peler les noixToi), de l’histoire de la chanson (L’internationale inclue), comiques-troupiers et turlutte inclus, de l’histoire de la musique (Purcell et Offenbach), de l’histoire tout court ; qui, entre deux pochades, vous entonnent un cinglant et salvateur Quand un soldat (c’est du Lemarque et ça se remarque) ; qui, en parfaits chansonniers qu’ils savent être, ancrent leur art dans l’instant, avec ou sans Ségolène. Ils font feu de tous bois, feu de dieu, dans un récital sans temps mort, qui vous scotche à tout jamais. Tous les tics, les tocs et les tocades, les jeux, leurs shakers, les comiques de situation, tout ce qui a fait un jour ou l’autre Chanson + bifluorée est là, donc un peu de ces Ipo i taï taï yé qui aiment à se substituer aux paroles d’immortels tubes. Même cet inénarrable numéro de ventriloque, c’est dire.
Dans une chanson actuelle où on terre facilement le bon pour promouvoir le n’importe quoi, Richardot, Puyau et Cherrier nous rappellent au pur talent, à l’exigence, au plaisir. Belle et utile leçon non pour célébrer le quart de siècle passé mais pour envisager l’avenir. Comme une chanson plus plus.

Le site de Chanson + bifluorée c’est ici ; Poèmes, 2011, EPM (existe en deux présentations différentes, dont une dans la collection « Les voix de la poésie » dirigée par Bernard Ascal).

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