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Frasiak : Béranger au participe présent

Eric Frasiak (ph collection personnelle Eric Frasiak)

Eric Frasiak (photo collection personnelle Eric Frasiak)

L’une des qualités d’Éric Frasiak, et pas la moindre, est la fidélité. Quand il égrène le nom des chanteurs qui lui ont donné le goût de lui-même chanter, il cite toujours François Béranger en premier. Ce Béranger à la grosse voix, aux chansons de tendresse toujours gauche, à celles de colère toujours de gauche.

Fidèle, à tel point qu’il en a fait des disques de reprises : « J’avais envie de remettre dans ma voix et dans ma guitare ces chansons qui m’ont donné l’envie d’écrire, de composer et de chanter ». Un premier disque : c’était il y a six ans, dix-huit titres, de Tranches de vie à Tous ces mots terribles. Ce n’était sans doute pas encore assez pour en être quitte avec le père François, si tant est que Frasiak puisse l’être un jour. Voilà le pourquoi de ce second volume, dix-sept nouveaux titres, puisés au plus lointain de son répertoire : des albums Le clown, La chaise, L’alternative et Le Monde bouge. Du temps des grandes messes sans curés, de ces scènes gigantesques des fêtes politiques : « Vous, tout là-haut dans vos bastions / A gouverner cités et nations / Ne voyez-vous pas qu’il est trop tard / Que le monde se fera sans vous ou contre vous ». Le monde bouge, Les oiseaux mécaniques, Plus je me pose des questions, Magouille blues, L’alternative… trois décennies après, ces textes sont d’une brûlante actualité, d’une rare pertinence, d’une acuité qui souvent manque aujourd’hui à la chanson. Ça, c’est le Béranger contestataire qui ne saurait toutefois passer sous silence (pas avec Frasiak, c’est sûr) le Béranger tendre, amoureux. Mêmes mots, mêmes notes, et pourtant le Dis-moi oui (le Je pourrais dire aussi) de Frasiak est comme différent et permet une autre lecture, presque. Comme quand on restaure, on nettoie un tableau pour retrouver les couleurs d’origine. Un peu de ce rouge aux joues que Béranger aimer cacher… Bravo le restaurateur !

(pour commander ce disque, cliquez sur la pochette)

(pour commander ce disque, cliquez sur la pochette)

Pas de copié-collé ici. Non, ça n’aurait d’ailleurs que peu d’intérêt. Frasiak investit à sa manière l’œuvre de son illustre aîné. Avec cette douceur que Béranger ne montrait pas plus que son cul, cachant pudiquement la tendresse des mots derrière l’âpreté de sa voix.

Mine de rien, le travail de Frasiak (celui aussi de Trévidy et de Sansévérino qui, eux aussi, ont consacré des albums au père François) permet à Béranger d’être toujours présent alors que ses disques ont déserté les bacs depuis longtemps. Ces trois-là, chacun à leur manière, font de Béranger une persistance dans le temps, un peu beaucoup de cette mémoire qui désormais rame, qui s’étiole.

Y aura-t-il un troisième album d’Eric Frasiak, notre Barisien sera-t-il à Béranger ce que Glenn Gould fut à Bach, ce que Le Forestier est à Brassens ? On aimerait bien, l’Histoire nous le dira…*

J’insiste, loin de l’hommage ce disque est à conjuguer au présent, au participe présent. Frasiak ne chante pas un monde passé, mais bien plus le choix d’un monde en difficile devenir. Mine de rien, Béranger avait tout compris, bien avant tout le monde.

 

*Allez, en exclusivité, NosEnchanteurs peut vous annoncer que, oui, il y aura effectivement un troisième « Béranger » par Frasiak.

Éric Frasiak, Mon Béranger 2, Crocodile Production 2020. Le site de Frasiak, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

« Sous les pavés » : Image de prévisualisation YouTube

« Elle voyage » : Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à Frasiak : Béranger au participe présent

  1. babou 13 novembre 2020 à 16 h 47 min

    Belle chronique Michel pour un superbe album de l’ami Frasiak

    Répondre

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