Christopher Murray, résonances d’une vie

Christopher Murray (photo Dominique Marchiset/Les Polysons)
Le premier contact avec un album, c’est quand on l’on ouvre délicatement, comme un cadeau : sa couverture, sa pochette et son livret. Disque qu’on lance ensuite sur sa platine… Il y a dans cette manière de faire (à l’ancienne) loin d’une plateforme, la joie de tenir l’objet et d’aller de découverte en découverte. J’aime le côté vintage de cette belle couverture de Lune et cris de Loup. Cette photo rappelle l’Écosse de ce stéphano-britannique d’une soixantaine d’année qu’est le sympathique et talentueux Christopher Murray.
Trente ans qu’il compose, lui qui s’est formé aux côtés d’Allain Leprest ou d’Anne Sylvestre et a croisé sur ses chemins du beau monde de la chanson francophone : Michèle Bernard, Romain Didier, Sarclo, Gabriel Yacoub, Amélie-les-Crayons, Pierre Lapointe, Léopoldine HH et tant d’autres.
C’est un album qui saisit par « l’emballage » que sont ses premier et dernier titre : un extraordinaire texte d’Allain Leprest, Le noir, un halo, le mystère : « Pile au rendez-vous de la vie / On dit que c’est une naissance / Peut-être il pleure peut-être on rit / Il ne sait pas ce qui commence ». Qui conclut l’album, en miroir, se terminant par ces mots qui avaient commencé l’album : « Il va vers un autre rivage / Tout fripé ridé il attend / Des voix saluent son long voyage / Faiblement parviennent des bruits/ C’est le jour il quitte la mer / Il est au bout il pousse un cri / Le noir, un halo, le mystère. » Voilà qui est loin de nous laisser indifférent sur le mystère de la vie qui traverse cet album.
Si, dans le livret, Christopher Murray remercie Leprest d’« avoir tant partagé de son talent et de ses œuvres », cela ne doit pas nous faire oublier son propre talent d’écriture et sa complicité avec ses musiciens : Christophe Garaboux à la basse, Christophe Durand à la batterie et aux percussions, et Emmanuelle Da Costa à qui on doit le caractère très organique qu’ont apporté ses discrètes mais très belles suggestions électro-acoustiques.
Un album où on se délecte de chaque titre car on se reconnaît dans les inquiétudes des sorties nocturnes comme parents (Elle vit entre les mondes) ; les leçons qu’on reçoit quand on visite à l’hôpital (J’ai vu Luis) ; la résilience (Dans la boue) ; l’adolescence dans ce flash-back de l’horreur de la guerre et ces souvenirs qui aident à ne « pas devenir fou dans cet enfer », Les filles de Marlhes ou encore nos quêtes du présent (Lune et cris de loup).
Si le cœur de l’album, la sobriété du livret et le visuel du CD mettent en valeur en diverses saisons un hêtre, le chêne d’Angel Oak nous touche également par ses références à Strange fruits de Lewis Allan et Abel Meeropol chanté par Billie Holiday.
Quand je vois les prénoms et noms de la dernière page du livret, je me dis qu’il y a comme un lien généalogique dans cet album. Il pose à la fois tant les racines que les ramifications familiales et amicales. Dans les lecteurs de Leprest je suis réjoui d’y lire ces « enfants devenus si grands » que sont Lucie, Tom et Léna mais aussi son extraordinaire paternel Pat et ses sœurs Linda et Wendy avec qui j’ai fait un petit bout de chemin dans le passé et qu’il m’amuse de reconnaître en dernière piste.
Comme quoi la nostalgie des photos, de la musique et des paroles ne sont jamais loin de nos vies réjouies par tous ceux qu’on a eu la chance de croiser plus ou moins longuement dans nos vies. Merci à Christopher et à tous les autres de l’album.
Le site de Christopher Murray, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
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