Mouhet 2025. Mathilde Kaori, la lauréate

Mathilde Kaori la veille, lors du tremplin (photo Didier Kovacs)
6 juin 2025, Festiv’en Marche, Mouhet,
Tremplins chanson ou concours, il y en a pléthore dans l’Hexagone. Celui du Festiv’en Marche, intitulé « Chansons de parole », a cette particularité que le lauréat* vit sa récompense dès le lendemain, assurant alors la première partie du premier concert. Cette année, ce fut le « lever de rideau » de Guidoni, impressionnant donc.
Voici donc la lilloise Mathilde Kaori (un pseudo qui, en japonais, signifie tissu parfumé), seule en scène comme elle le fut la veille. Certes, une partie du public était présent au tremplin d’hier et sans doute a voté pour elle. Mais ce soir est autre paire de manche : Mathilde est revenue, certes, mais cette fois-ci c’est toute une salle, plus exigeante encore, qu’il va falloir convaincre. Tenant sa guitare bien haut, Mathilde égrène ses chansons sur une tonalité légère, presque aérienne : les vers virevoltent en un mini-récital probant, plaisant, digne de celui qui suivra.
Hasard ou destinée, c’est la deuxième fois qu’elle vient en cette région. Et nous offre Revenir, une chanson écrite il y a peu de temps, de retour d’un premier séjour pas loin d’ici, à Pommier.
Il y a grande force en elle, faisant de chacun de ses textes des séquences follement habitées, chaque fois de trois à cinq minutes où le spectateur est happé par le propos et sa mélodie.
Des propos de tendresse, de mélancolie, d’empathie, des paroles sûres d’elles-mêmes, qui montent crescendo, d’une chanteuse qui, par son aspect, semble fragile. Il y a des ombres masculines qui parfois remontent à loin (« Du temps de nos jeunes amours / On taisait les secrets inavouables / Puis ils éclataient au grand jour / Détruisant nos châteaux de sable »), des idéaux de liberté (« Je peinais à croire en mon rêve / D’amour et de liberté / L’idée met tout le monde à l’aise / Mais est loin d’être aisée »), des espoirs d’avenir (« Viens contre moi sécher tes larmes / Car je te promets un grand avenir / Mais défends-toi et affûte tes armes / Sans laisser nulle ombre t’affaiblir », la permanence des choses (« Si loin de nos terres d’origine / Si profondes nos racines / Mais d’aussi loin que l’on vive, que l’on vienne / La lune restera la même »), des souvenirs voisins, comme La Vieille de la courée qui « erre, erre / comme une âme en peine / dans la courée silencieuse » et ces désirs tenaces qui se conjuguent à la révolte, « sur le feu de nos idéaux »…
Tour de chant élégant, probant : il fallait les tenir ces quarante minutes sans ses musiciens, juste avant l’entrée en scène d’une légende. C’est réussi, madame !
Délicate attention, solidarité d’artistes, Mathilde Kaori invite, en rappel, sa consœur-concurrente d’hier Sophie Gontier pour un duo. Pas grand-chose pour apaiser le malheur de Sophie, mais la preuve d’une fraternité. C’est plutôt rare dans ce métier par nature individualiste. Moi qui, chanceux, ai passé toute la matinée avec les trois candidates de la veille, je puis dire que l’amitié n’est pas un vain mot.
* Pour trois sélectionné[e]s en finale (sur plusieurs dizaines de postulant[e]s), un[e] seul[e] gagnant[e]. Cette année : Sophie Gontier, Lou Nell et la lauréate Mathilde Kaori.
Le site de Mathilde Kaori, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.
Allez, soyons fous (et folles !), plutôt que « fraternité », osons le joli mot de sororité…