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Mouhet 2025. Liz Van Deuq, question de caractère

Liz Van Deuq (photo Béatrice Bodin)

Liz Van Deuq et sa cocotte en papier (photo Béatrice Bodin)

7 juin 2025, Festiv’en Marche, Mouhet,

 

Retour dans cette grange à Mouhet pour Liz Van Deuq, pas mal de temps après sa première venue, il y a une dizaine d’années… De quoi constater si ses Traits de caractères (c’est justement le titre de son nouvel album) se sont plus encore affirmés. C’est un enjeu car le risque est grand de séduire puis d’être gommée, oubliée, congédiée par l’artiste qui assure sa seconde. Une toulousaine je crois, dont le prénom est son vrai nom de scène, une ogresse, une Juliette.

Allez, je vais vous la faire courte : malgré la ronde à lunettes, on se souvient sans mal (et pour l’instant) de la prestation de Liz Van Deuq, de son nom, d’une partie de ses chansons, surtout si on a eu l’intelligence d’acheter son (excellent) disque à l’entracte.

JULIEN, LE RÉTROPÉDALEUR DE CHANSONS Cette photo est de Pierel Duval, superbe mais qui ne raconte pas tout à fait l’attraction que fut ce « Pedalo Cantabille », karaoké acoustique et mobile (c’est un drôle de vélo) imaginé et animé par Julien Chené, un fou de chansons qui est à lui seul la mémoire de cet art. A vélo et surveillant de son rétroviseur ce qui se passe dans son dos, tout en jouant de sa guitare et chantant, il rétropédale pour faire défiler en grand le texte de la chanson. Et ça fait grand succès tant c’est irrésistible. Ce n’est pas la première fois que Julien est invité au Festiv’en Marche. Il a l’espoir d’y revenir l’an prochain mais cette fois-ci comme candidat au tremplin, avec ses chansons à lui. A forcé de chanter les autres, il veut pousser de la voix sur ses propres mots, ses propres émotions.

JULIEN, LE RÉTROPÉDALEUR DE CHANSONS
Cette photo est de Pierel Duval, superbe mais qui ne raconte pas tout à fait l’attraction que fut ce « Pedalo Cantabille », karaoké acoustique et mobile (c’est un drôle de vélo) imaginé et animé par Julien Chené, un fou de chansons qui est à lui seul la mémoire de cet art. A vélo et surveillant de son rétroviseur ce qui se passe dans son dos, tout en jouant de sa guitare et chantant, il rétropédale pour faire défiler en grand le texte de la chanson. Et ça fait grand succès tant c’est irrésistible. Ce n’est pas la première fois que Julien est invité au Festiv’en Marche. Il a l’espoir d’y revenir l’an prochain mais cette fois-ci comme candidat au tremplin, avec ses chansons à lui. A force de chanter les autres, il veut pousser de la voix sur ses propres mots, ses propres émotions.

Un air de fausse timide qui emporte la sympathie, impression qui vite s’estompe et disparaît : Liz est d’une efficacité sans pareille, menant tambour chantant son petit commerce de chansons. Son album recèle parfois une dimension pop pas dégueu ; ici sans musiciens, seule à son quart de queue, elle fait vivre ses chansons autrement, les bulles sont différentes mais le pétillant toujours fait son œuvre : « Danser de pieds libres, dans cet équilibre / Et là, danser le pas ». Un dansé de pieds sur les pédales d’un piano, c’est fortissimo. Des titres dont les mots et les notes éclatent, des paroles plus intimes à d’autres moments, quand « je tombe amoureuse d’un peu tout l’monde », Liz développe son monde, son art, avec chaque fois des chansons surprenantes. Comme quand, sur un joli texte de Patrice Mercier, elle nous dit, sur un ton mélancolique, que « Quelques fois quelques fois / Les enfants les plus durs à coucher / Sont ceux qu’on a pas ».

Complice ou pédagogue, elle nous instruit de son métier où il faut être tout à fois. Personnifie son piano, ici nommé Stanly, qui est tant son psychanalyste que son psychiatre : « Moi je chante, lui il prend des notes ». Elle nous explique tout, le contenu, le contenant. D’autres artistes en scène qui parlerait tant et plus, on pourrait s’ennuyer. Pas d’elle, si prompt, si nature, si fraîche. Il ne lui a pas fallu deux titres pour copiner avec nous, nous lâcher de fausses confidences. Elle peut ensuite tout nous chanter, même des trucs parfois plus légers, comme ce poème-minute d’une naïveté qu’on oubliera mais fait du bien. Excusez-là, [sa] carrière est en chantier : « Pot de colle, vernis ou peinture / C’est une question de choix mais faut passer deux fois / Des fois la couche, pour que ça dure ». Et parfois des trucs gigantesques (Ce n’est qu’une eau) que si ça passait en radio ça ferait d’agréables et efficaces tubes, mais les programmateurs sont tous nuls.

Il y a enfin cette cocotte en papier qu’elle lance dans le public à la manière d’un Boeing, d’une confection fragile donc : « Jetée dans cette lettre / Nous deux c’est plié / Nous deux couchés c’est mieux / Nous deux c’est mieux sur le papier ». Voilà, le concert aussi c’est plié. La dame a séduit, avec raison. Jamais deux sans trois : à un de ces quatre, donc, à Mouhet !

 - Michel KEMPER

 

Des mots, des notes et du caractère

VAN DEUQ Liz 2024 Traits de caractère 500x500Onze titres pour cet album de Liz Van Deuq sorti au printemps 2024. Si toutes les musiques ont été composées par Liz, qui vient du conservatoire et se joue de son piano comme d’un vieux compagnon – enrichissant ici les nombreux instruments des musiciens (Claviers, vents, cordes, percussions) d’arrangements électroniques en collaboration avec Marie Daviet et Bertille Fraisse – deux textes viennent d’autres auteurs.
Patrice Mercier parle de l’absence d’enfants « Quelques fois / Les enfants les plus durs à coucher / Sont ceux qu’on n’a pas » et des excuses qu’on se donne à soi-même plus encore qu’aux autres : « Alors on se dit que c’est un choix / Et puis à quoi bon leur naissance / Dans la grande déliquescence ». Paradoxalement la chanson qui évoque le plus les chansons passées de Liz.
Et Marie Daviet, dont la métaphore poétique se développe doucement en bourgeon et bouton de fleurs, une rose et son épine qui sert d’indice, se jouant des mots « Un bruit qui tue mon humeur » pour donner à la fin une clé qu’on ne voudrait pas ouvrir : « Piquant comme un oursin / Une trace qui fait tache / Sur la photo / De mon sein ». Deux thèmes, la vie, la mort, que la pudeur de Liz ne lui interdit pas d’interpréter mais dont elle a préféré laisser l’écriture à d’autres.

Le registre de Liz est souvent distancié, satirique -les gens qui dorment la nuit peut faire paraître une jalousie d’insomniaque, mais plus encore est critique des indifférents au monde que rien ne peut empêcher de dormir – ou moqueur – la maniaque qui prend soin de définir les moindres faits et gestes que doivent, ou ne doivent pas accomplir ses invités. Un humour qui naît de mots qu’elle pousse dans leurs extrémités « Ton écriture et l’encre tient, je t’ai / Jetée dans cette lettre ». Pour autant l’émotion s’y fait sa place, qui « ruisselle au contour de la joue », une eau qui ouvre l’album.

Traits de caractères, c’est celui qu’elle a au singulier, la toujours singulière Liz sous sa voix douce, et aussi au pluriel, ces caractères d’imprimerie qu’elle recompose comme le meilleur typographe, pour en faire jaillir les idées. Compter les jours jusqu’au jeudi où elle n’ose dire l’Amour, où elle a peur d’en dire trop, ou doter de parole une cigarette. Une Chanson autant de parole que de musique… et de caractère.

- Catherine LAUGIER

Liz Van Deuq, Traits de caractères, 2024. 

Le site de Liz Van Deuq, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là.

 

« Ce n’est qu’une eau » : Image de prévisualisation YouTube

« Les Pas » : Image de prévisualisation YouTube

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