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Barjac 2025, Manu Galure, l’exemplaire farfadet de la chanson

Manu Galure trio Photos © Anne-Marie Panigada

Manu Galure trio Photos © Anne-Marie Panigada

« Vertumne », 26 juillet, Barjac m’en chante, Espace Jean Ferrat

 

C’est un spectacle qui débute bien avant l’heure, quand les spectateurs s’abreuvent, piliers de comptoir devisant à l’infini sur le concert d’avant. A leur insu, en une totale impudeur, le décor se monte devant les autres, sans notice Ikea, les doigts dans le nez. La magie première est là, la construction palpable. Et déjà tout intrigue, nous laisse pantois. D’abord ce titre de Vertumne, en fait le nom d’un dieu champêtre et sans reproche.

Est-ce la structure d’un Tournez manège, ou ce qui reste d’un vieux carrousel en partie désossé, dont les chevaux depuis longtemps se sont fait la belle. Là, deux pianos, l’un quart de queue, l’autre droit, échappés d’on ne sait quelles querelles pianistiques, de quelles flammes, et l’outillage d’un atelier de réparation, d’un garage peut-être. On y frappe et retape des pianos pour leur faire sortir d’autres sons, les presser tant qu’ils ont du jus. Eux, qui sur cette scène se sont substitués au Steinway du concert d’avant, ne connaissent l’accordeur que de nom et n’en sont pas moins vrais, prêts et prompts à des aventures extraordinaires.

GALURE AMPanigada 6 490x326Ils sont trois musiciens, l’un chante les autres pas. Eux frappent les instruments à coups de marteaux, de scie, de perceuse, de chaînes pas même stéréos, de fil de fer et d’une disqueuse, de vis et de ruban adhésif, balles, tétines et ressorts, pinces et trombones… Avec eux, la boîte à outils apprend à son tour la musique. On démonte le piano droit, le remonte. Si vous vouez un respect immodéré pour l’instrument, quasi religieux, vous pouvez défaillir sur le champ.

C’est un décor à la Caro et Jeunet, un spectacle un peu à la Lewis Caroll version Tim Burton. Et l’esprit d’un Trenet ou d’un Higelin. Les deux, je crois.

GALURE AMPanigada 5 490x448Précisons, c’est un tour de chant. Même que ce sont les deux derniers de celui-ci, les dernières bosses pour le Petrol P159, ultimes outrages au Yamaha UX qui au pire finiront en bois de cagette, au mieux seront adaptés et adoptés. Là, ils participent à l’industrie du spectacle, à la mécanique de l’art. A l’abstrait, Galure et ses compères (Colonel Chouf et Lorenzo Naccarato) préfèrent la pédagogie du concret. Leur carrousel est une onirique fabrique du réel. Ils y martèlent une intrigante poésie qui puisent ses sources dans la nuit des temps, qui s’amuse et gamine.

Manu Galure est un lutin, un farfadet, un peu le pendant de l’excentrique Wonka, un lointain descendant de Chaplin, le frère utérin d’Higelin qui toujours fait le Jacques.

GALURE AMPanigada 2 490x327Pas de chansons spectaculaires à grand spectacle, à gros effets, mais la persistance dans le temps et l’espace des qui furent troubadours, les cheveux dans les yeux, colportant leur science de l’observation, celle qui nourrit en abondance leurs vers. Ici des sangliers qui te mangent les pieds, là des pluies anciennes qui tombent quand elles sont trop gonflées de tourment. Ici l’apocalypse à venir qu’on attend en mangeant des glaces, là ce village infesté de rats qui, vieille rengaine, rejoue à l’infini le drame de Hamelin.

Les visiteurs du soir y verront une version grand public, ceux du surlendemain une version jeune public. Peu de différences et même esprit. Les rires des enfants sont aussi grands que les yeux écarquillés des grands, ce gamin de Galure est un rêveur tout haut aux délires viraux. On le sait depuis toujours mais pas encore assez. Il redonne à la chanson qui parfois inutilement se hausse du col et se prend pour ce qu’elle n’est pas son côté populaire, instinctif, son art et sa magie, sa grandiose modestie. Manu Galure va très loin y puiser l’essentiel. Ce spectacle sans âge est une des plus belles expressions de la chanson.

 

Le site de Manu Galure chez Cachalot Mécanique, c’est ici ; sa page facebook, là ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, ici.

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