Les Oreilles en pointe 2025. Ponteix, lointaine francophonie
Ponteix (photo Shanti Loiselle pour Wikipédia)
12 novembre 2025, festival Les Oreilles en pointe, Le Firmament à Firminy,
Les oreilles pointues de ce festival atypique aiment à dénicher ce qui, pour nous, est inédit, pas encore vu, pas entendu. On ne compte plus ses « trouvailles » mémorables. C’est là que l’helvète duo Aliose s’est produit la première fois en France. Comme l’incroyable québécois Martin Deschamps. Comme en fait beaucoup d’autres, des Stéphane Côté, Edgar Bori, Danny Boudreau et qui sais-je encore, en déjà trente-quatre ans de bons et loyaux services. En ses déambulations de chanteur, sur le vieux continent comme aux Amériques, Tibert fait nombre de découvertes. Qu’il s’empresse de cafter à l’autre Tibert, célèbre redresseur d’oreilles devant l’éternel.
Ponteix (Mario Lepage de son vrai blaze) est canadien francophone. Québécois donc ? Que nenni, à l’exact opposé même, trois mille kilomètres de Québec, une paille. Il habite une ferme de Saint-Denis, dans le Saskatchewan, complètement à l’Ouest, « au milieu de nulle part », minuscule village gaulois (trente habitants au dernier recensement) qui encore et toujours résiste à l’envahisseur linguistique, à l’anglo-saxon. Qui contre vents et marées fait vivre sa francité. « La résilience est une force humaine » nous confie avec expérience le chanteur. Même s’il est allé voir ailleurs s’il y était : « Je croyais venir à la terre mère / J’en rêve depuis que je suis petit / Mais c’est p’t’être mon destin / De vivre le “no man’s land” / De mon autre vie / Dans les plaines à St. Denis ».
Là, sur scène, Ponteix ressemble à un de ces mousquetaires qu’on voit au cinéma, longs cheveux un peu ondulés et barbe si caractéristique. Pour saisir ses chansons, paroles et sens, il faut se frayer un difficile passage à travers le son et son délicieux accent. Passé deux ou trois titres de fait sacrifiés, on s’accoutume, s’acclimate, les pénètre. Bien entendu qu’il a envie de nous parler de son chez-lui, de profiter de cette salle pleine comme un œuf pour s’en faire le modeste mais efficace ambassadeur.
A l’autr’ bout qu’il est du Canada, il semble chanter la même chose ou presque que son compatriote et confrère Gilles Vigneault : son village et les gens qui le peuplent. Sa famille notamment : sa tante Germaine dont il redoute ses réactions à ses chansons, à la culpabilité catholique qu’il y exprime ; sa grand-mère, notoire incroyante qui enregistrait ses lettres sur K7 et les expédiait par la Poste. Ses histoires consignées sur ruban aident Ponteix, l’oreille collée aux cassettes, à « remonter le temps ».
Concert-confidences aux oreilles d’un public attentif, vite acquis à cet artiste d’emblée si attachant, si naturel, si vrai. Gros son, oui, tonalité rock (grooves hypnotiques mêlant habilement la psyché-pop électronique à la mélancolie du RnB et du indie rock, à en croire son site) contrasté par l’extrême douceur du propos, dont on perce les notes, décrypte les vers, pour plus apprendre de ce chanteur à l’évident charisme, autoproclamé Canadien errant (c’est la chanson-titre de son récent et troisième album).
Bonnes nouvelles de cette lointaine francophonie donc, exprimées par ce « projet fransaskois », « expérience électrifiante » qui, par Ponteix, nous livre un peu beaucoup de nous.
Le site de Ponteix, c’est ici.





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