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Béa Tristan, nul ne la rattrapera

Béa Tristan, 21 octobre 2011, Viricelles,

Benoit Boulianne et Béa Tristan (photo Serge Féchet)

Ce furent pour certains les retrouvailles avec la belle et rebelle, chanteuse insoumise qui, jadis, il y a longtemps, claqua la porte au métier qui s’apprêtait à la porter aux nues, à condition que… Béa Tristan n’aime pas les conditions. Pas plus que les rétroviseurs. « Et je suis sortie de cette vie / Comme on sort de prison. »
D’autres ne la connaissent que de ces dernières années, par l’étonnante chanson qu’elle distille à nouveau, sur des routes sans plus de concessions. A la marge. Une chanson étrange, qui vous pénètre, un blues qui vous bouleverse comme rarement.
On pourrait croire à une musique toujours recommencée, longue litanie, envoûtement, hypnotisme… Il y a des concerts dont on ne retient que le chanteur et c’est déjà ça. Et ce récital-là, dont on retient l’ambiance, les paysages, l’odeur de gas-oil, de rutilantes carrosseries, et ces visages tourmentés où se lisent des vies. Et ces autres, radieux, qui n’en sont pas moins secrets. Des kilomètres de routes qu’on se refait. Et ces arbres, ces fleurs qui bordent le bitume, bougainvilliers et pivoines, ces goûts de thé et d’alcools forts. Ces atmosphères parfois légères, souvent lourdes, poisseuses parfois, vies d’hommes et de femmes au croisement des routes. Ces sentiments vrais, ces amours furtifs. Tout y est profond, tout y est bouleversant.
La contrebasse du québécois Benoit Boulianne, aussi discrète que précieuse, sculpte plus encore l’ambiance, fait ponctuation, pleins et déliés, soulignant avec délicatesse la voix ferme et rauque et cette femme, dont la gorge fait insolite caisse de résonance.
J’ai déjà écrit sur Béa Tristan. J’écrirais encore. Il y a des artistes sans mystère dont on a vite fait le tour : y’en a plein mon garage. Et d’autres, dont elle, qui laisse « son odeur comme on laisse un pourboire. » L’odeur est enivrante, entêtante. Qui déjà s’est enfuie, loin sur la route : « Trouves-moi une bagnole / Qui roule vite, vite. » Nul ne la rattrapera, pas même moi.

Le site de Béa Tristan.

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