CMS

Barjac 2016. Agnès Bihl, en pleine maturité

Agnès Bihl sur la scène de Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

Agnès Bihl sur la scène de Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

La grande scène du Château se rappelle certainement des bonds d’Agnès Bihl sur son revêtement. L’artiste vint y marcher et y sauter en première partie en 2005, et y fit sensation avec les chansons de son second CD et quelques inédits à l’époque dont Touche pas à mon corps qui reste gravé dans ma mémoire comme un moment d’intense émotion. Elle y revint en seconde partie en 2011, grand spectacle là encore, avec un propos plus resserré, plus axé sur l’essentiel. Anne Sylvestre l’avait rejoint pour un duo sur Non tu n’as pas de nom, et on avait eu alors la sensation d’assister à une transmission d’une génération à l’autre du flambeau de la lutte pour la reconnaissance des droits des femmes, et aussi d’un passage de témoin de la défense de la chanson féminine. Je me souviens, à l’issue du spectacle, de l’impression subjuguée du public, autant de la part des habitués que des nouveaux spectateurs.

c0223Cinq années plus tard, Agnès revient fouler ce plancher magique, preuve que la programmation de Barjac s’inscrit aussi dans une continuité, quoiqu’on entende çà et là. Comment monter plus haut quand on a déjà atteint le sommet ? Ce spectacle fut, pour des raisons différentes, aussi émouvant que les précédents, la découverte en moins nécessairement. Et ce plateau de carrière est assumé par la chanteuse qui, comme une sorte de bilan provisoire, nous propose des chansons de tous ses précédents albums et spectacles, y compris L’enceinte vierge de son premier CD. Le support musical est assuré au piano par l’impressionnante Dorothée Daniel, majestueuse, dont les doigts au bout de bras interminables confectionnent un accompagnement subtil, ajusté et pertinent, avec un toucher remarquable ; s’y sont adjoints Sébastien Mathias à la contrebasse pour le contrepoint, et Jérôme Royer à la guitare, essentiellement pour la rythmique – ils sont tous les deux malheureusement peut-être réglés un peu fort ! La voix est juste et assurée. Agnès porte un large pull blanc ajouré qui ressemble à un couvre lit désuet. Il lui va bien, lui donne de l’air et de l’ampleur et elle ne se prive pas, en chantant, des grands gestes et des grands sauts qui sont sa marque de fabrique ! Les chansons traitent de ses thèmes favoris : la recherche du bonheur et les déceptions associées, la relation compliquée aux hommes (Pleure pas Casanova, Son mec à moi), la déprime, l’alcool, la fuite du temps… Et puis aussi ses indignations avec par exemple Le baiser de la concierge qui a dénoncé les juifs, ou l’état du monde en héritage (Merci papa, merci maman). Mais ce que je retiens particulièrement de ce spectacle, ce sont les moments d’intense émotion quand elle raconte comment l’Alzheimer induit une rupture avec la malade pourtant aimée, ou quand, abandonnant un moment la chanson, elle lit une petite nouvelle pleine d’amour et de tendresse pour sa maman qui vit avec souffrances indicibles et joie mêlée le moment de sa naissance où elles vont faire connaissance mutuellement. Très touchant passage écouté dans un silence impressionnant.

Agnès Bihl est une femme dont les chansons et les spectacles disent la maturité et l’humanisme, sans renoncer à son style, son écriture et sa façon d’être.

 

Le site d’Agnès Bihl, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là. Image de prévisualisation YouTube

8 Réponses à Barjac 2016. Agnès Bihl, en pleine maturité

  1. Catherine Laugier 6 août 2016 à 11 h 35 min

    Ses nouvelles écrites sur des thèmes de ses chansons, 36 heures de la vie d’une femme…(2013) sont disponibles à la vente partout sur le net, ce sont des bijoux . Ainsi qu’un roman paru en 2015, La vie rêvée des autres, dont je viens à l’instant d’apprendre l’existence. L’histoire d’une évasion de maison de retraite, ça me dit bien ça !

    Répondre
  2. Irène Kaufer 7 août 2016 à 14 h 09 min

    Agnès Bihl n’a pas une « relation compliquée aux hommes », elle a un regard acéré sur certains d’entre eux. Pas du tout la même chose!

    Répondre
  3. Franck Halimi 7 août 2016 à 19 h 16 min

    Juste pour rendre à ces arts : outre Dorothée Daniel au piano, le vrai nom des acolytes masculins d’Agnès Bihl sont Sébastien Bacquias à la contrebasse et Jérôme Broyer à la guitare.

    Répondre
  4. Maëlle St Pier 8 août 2016 à 19 h 35 min

    Bonjour
    Pour compléter ce que dit Irène, j’ai aussi constaté que les femmes qui contestent n’être qu’un coup à tirer, ou une occasion à sauter, sont considérées comme « avoir une relation compliquée avec les hommes » pour lesquels les choses sont plus simples, on tire, on saute, et yop la boum. On peut voir les choses autrement, ça arrive. Mais il semble que ce ne soit pas la majorité du genre…

    Répondre
  5. François Bellart 9 août 2016 à 21 h 02 min

    A Barjac, il n’y a pas de réseau dans beaucoup de lieux et donc pas de liaisons internet possibles. C’est le cas à l’endroit où j’écris et je dois me déplacer pour transférer le papier une fois fini. Et comme je n’ai pas non plus emmené avec moi ma discothèque, je n’ai rien pour vérifier les orthographes des noms propres. Pour les musiciens, qui ne sont – cette année – pas mentionnés sur le programme, j’ai donc dû me contenter de la phonétique de leur présentation par l’artiste, d’où les erreurs. Merci d’avoir rectifié, et Michel, si tu veux, tu peux corriger dans l’article.
    Par ailleurs, je n’ai jamais et je n’aurais jamais écrit qu’Agnès Bihl « avait des relations compliquées avec les hommes ». J’ai écrit que c’était un des thèmes de ses chansons, parmi d’autres cités. Merci de relire.

    Répondre
  6. Rodolphe Braud 11 août 2016 à 17 h 47 min

    Bonjour à tous. Je – moi le gros méchant forcément macho puisque appartenant à la gent masculine – suis toujours sidéré de constater que le sexisme ne se trouve pas forcément uniquement où on le croit habituellement. Je ne parle bien entendu pas d’Agnès Bihl que j’aime beaucoup, ni de ses chansons que j’aime beaucoup aussi ni de l’article ci-dessus ou de son auteur que je ne connais pas mais que j’aimerais sans doute beaucoup aussi, mais bien de certains commentaires qui précèdent le mien. Sachez mesdames que l’on peut être homme et féministe ! Mais ceci dépasse peut-être votre caricatural schéma de pensée !

    Répondre
  7. Catherine Laugier 11 août 2016 à 20 h 18 min

    J’ai été un peu surprise aussi de voir réagir à l’expression : « Relation compliquée aux hommes ». Mais oui, les relations humaines, et particulièrement entre sexes différents sont complexes, c’est ce qui en fait la richesse. Et pourquoi cette attaque agressive , cette généralisation sur les hommes qui ne sauraient que tirer, sauter ? Je me considère aussi comme féministe, ce qui ne veut pas dire déclarer la guerre aux hommes, et je remercie ceux qui ont fait progresser les droits des femmes, et ainsi leurs propres droits, ceux de l’homme au sens générique du terme (oui, d’accord, c’est agaçant qu’il n’y ait qu’un mot en français).
    Sinon j’adore la façon décomplexée dont Agnès Bihl traite les problèmes humains, sans langue de bois !

    Répondre
  8. Maëlle St Pier 12 août 2016 à 13 h 45 min

    Bonjour
    En réponse à Rodophe et aussi à Catherine, et le « schéma caricatural de pensée » il m’est arrivé de percevoir dans l’actualité quelques faits peut-être caricaturaux,
    - récemment, il a été conseillé à des fillettes de 5 ou 6 ans d’aller en colo en évitant de porter des robes, pour éviter de troubler les garçons….
    - pour les filles en jupe traitées de putes dans certains quartiers, considérons que c’est un épiphénomène local, qui n’a aucun lien avec les députés en rut quand ils voient une femme députée habillée en femme « normale » si on peut dire.
    - dans des cours de vente, il n’est pas rare d’entendre le formateur dire aux commerciaux que parfois il faut violer le client pour le faire signer.. Sous entendu, c’est pour son bien.
    - aujourd’hui, Catherine Sauvage est toujours en prison, son cher pas tendre n’avait à son palmarès que 47 ans de violences conjugales, et les viols de ses filles.
    - même dans le milieu honorable de la chanson, les mots « tirer » ou « sauter » ne sont pas rares en coulisses, et en petit comité, y compris quand des femmes sont présentes.
    - éludons les virilités des chambrées de caserne, je n’ai pas connu, mais on m’en a parlé.

    J’oublie sûrement d’autres détails, mais en effet, les femmes qui chantent ces petites anomalies ont probablement une relation compliquée aux hommes.

    On peut aussi inverser les données, peut-être que des hommes ont des relations compliquées aux femmes, surtout quand elles ont l’insolence d’en parler.

    Répondre

Répondre à François Bellart Annuler la réponse.

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

code

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>

Archives