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Les plaisirs de l’Eicher

Stephan Eicher

Stephan Eicher (photo Laurent Seroussi)

Cet homme ne fera décidément jamais rien comme les autres ! Nous étions sans nouvelles discographiques de Stephan Eicher depuis son Envolée de 2012. Bien sûr, il n’est pas resté inactif durant ce temps, puisqu’à la tournée qui a suivi cet album a succédé une série de concerts en solo, où il se produisait entouré uniquement d’automates. Nos Enchanteurs vous ont d’ailleurs rendu compte en son temps de cette prestation aussi magique qu’originale. Mais petit à petit est née chez ses aficionados une soif grandissante de nouveautés…

Vont-ils voir leur pépie apaisée ? Oui et non. C’est que le nouvel opus de notre helvète favori, laconiquement intitulé Hüh !, consiste pour l’essentiel en une relecture d’anciens morceaux. Sur les douze chansons, seulement quatre inédits (dont un instrumental, Chenilles, qui sert avant tout d’ouverture à la chanson nommée Papillons). Une compil déguisée ? Ce serait mal connaître l’artiste que de croire cela.

Entouré d’un orchestre pétaradant de douze membres, les Traktorkestar, Stephan Eicher y revisite quelques morceaux de gloire (Pas d’ami comme toi ou Combien de temps) ou d’autres titres moins connus du grand public (Ce peu d’amour, Louanges, Cendrillon après minuit…), remontant même le temps jusqu’en 1983 avec La chanson bleue et Les Filles du Limmatquai. Toutes ces chansons sont ré-assaisonnées à la sauce « fanfare des pays de l’Est », comme un retour à ses racines yéniches. Cuivres et percussions sont de la fête, pour un résultat réjouissant au possible. Vous aimez les films de Kusturica et les musiques de Goran Bregovic (qui signe d’ailleurs les arrangements de la reprise d’Envolées) ? Ce disque est fait pour vous ! Acoustique, dansant et festif, avec quelques incursions dans le (free) jazz, il n’occulte toutefois pas le sens mélodique imparable de l’artiste. La folie de l’ensemble est maîtrisée et les arrangements délicats (ce n’est pas parce que c’est une fanfare qu’on se retrouve chez Sébastien !). Cerise sur le gâteau : la voix éraillée du chanteur (et son accent inimitable) est intacte et nous replonge instantanément dans ces années 80 où nous l’avons découvert.

HuhLes trois chansons inédites (deux sont de la plume de son complice habituel Philippe Djian, la troisième de Martin Suter) parfument le disque d’une nostalgie langoureuse. Etrange évoque l’évolution des sentiments au fil du temps (avec ce constat amer : Même un ange / N’y comprendrait foutre rien), tandis que Papillons déroule un tapis de cuivres autour d’un souvenir prégnant qui ne quittera jamais le narrateur, et ce Où que tu ailles, où que tu sois. Emblématique : le doux Nocturne qui clôture le disque fait mine de s’achever par un Il fait nuit et tout est dit chuchoté à l’oreille… avant que l’orchestre ne revienne pour une envolée euphorisante ! Ou quand la mélancolie s’avère être l’occasion d’un nouveau départ… Du pur Eicher, quoi !

Hüh ! est bel et bien un nouvel album de Stephan Eicher, tant les réorchestrations de ses chansons les ont ripolinées de neuf. Ceux qui les connaissent dans leur première version apprécieront leurs nouveaux atours, dignes de l’esprit frondeur qui a toujours animé l’artiste. Les autres pourront les aimer tels des titres inédits. Tous y prendront un plaisir intense. Et se régaleront en outre de la belle pochette, clin d’œil complice à celle du Fantaisie militaire de son ami Bashung (avec le même photographe à l’œuvre, Laurent Seroussi).

Confettis pour tout le monde, Stephan Eicher fait un retour en fanfare. Vivement la suite !

 

Stephan Eicher, Hüh !, Polydor 2019. Le site (en v.o.) de Stephan Eicher, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

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