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Hildebrandt, une île et des ailes

Hildebrandt (photo Yann Orhan)

Hildebrandt (photos Yann Orhan)

Trois ans après la bombe Les Animals, revoici le Rochelais Hildebrandt, tout de rouge vêtu et armé de sa nouvelle rondelle, mysté-rieusement
 
intitulée îLeL. Forcément, après un premier essai aussi réussi, c’est avec un peu d’appréhension que l’on part à la découverte de son petit frère : sera-t-il à la hauteur ?

D’emblée, nous sommes en terrain connu. Le premier titre, Docteur, dresse le noir constat de nos angoisses actuelles (Sous les yeux, le gris / Sous la peau, le gras / Confort est confis / Docteur l’est là / Docteur tout le monde a peur), tempéré par une touche d’espoir (Vois les avancées / Sûrement l’homme est lent / A sentir le vent). Le rythme et le chant se placent dans la parfaite continuité de l’opus précédent. Un peu trop, même, au point de craindre le manque de renouvellement.

Fausse alerte, les morceaux suivants nous rassurent ! Hildebrandt a su se diversifier tout en restant lui-même, avec cette voix claire si caractéristique et cette diction impeccable. La pop-rock reste son domaine de prédilection : son album regorge de chansons à la mélodie impeccable, riches de refrains à reprendre en chœur, gonflées aux riffs de guitare, sur lesquelles il est permis de se trémousser sans honte. Il s’en écarte pourtant avec bonheur, le temps de quelques ballades portées par le piano aérien d’Albin de la Simone : Attends, sur le désir de possession de l’être aimé (Ainsi mordre un peu ta vie / Je t’aime un peu plus fort / Quand je dévore), Emilienne, émouvante chanson sur sa grand-mère (Je n’ai pas de photo de toi / Non pas besoin / Tes boucles grises et tes émois / Je les retiens) ou Qui de nous, déclaration d’amour et d’interdépendance à sa gamine (Tu dors bien au creux de ma peau / Je t’abrite au feu de mon flambeau / Oui mais c’est toi qui me protèges).

albumPour le reste, la pochette nous dévoile un double Hildebrandt, à la fois viril dans sa pilosité et féminin dans son maquillage. Le ton est donné. Alors que son premier disque envisageait l’animalité de l’homme, le chanteur explore dans ce second volet les notions de masculin/féminin, assumant et se réclamant de la femme qui est en lui. « Je suis un / Je suis deux / Toi et moi d’une seule voix / Je suis plein / Je suis peu / Reine et roi dedans moi » ; nous avoue-t-il. Et si le genre importait peu ? « Ce qui brûle entre mes jambes / Ne résume en rien mon être ». Si le costume censé nous définir n’était en fin de compte qu’apparence ? « Je ne sais pas / Ce qui me vient, ce qui me prend / Une robe dessous moi / Dedans ». Et pourquoi une déclaration d’amitié ne prendrait-elle pas la couleur d’une chanson d’amour ? « Je n’aime pas les hommes / Je n’aime que les femmes et les chiens / Je n’aime pas les hommes / Mais toi tu n’en es pas vraiment un / Je t’aime autrement que ma femme / Mon frère d’arme ». Autant de frontières à franchir, d’idées à bousculer, de préjugés à détruire…

Mais c’est pour sa femme qu’il préserve intacte sa flamme : « Voilà 20 ans que j’écris / Tes aveux pour mes envies ? Qu’aurais-je été sans tes yeux ici ? ». Ode passionnelle à celle sans qui il ne serait rien (« Je n’avance que si tu me vois »), à la fois muse et soutien (« Je n’ai rien fait sans tes yeux immenses »), passé et avenir (« Et dans longtemps si tu veux / Moi l’amant, l’ami, les deux »). La véritable fusion entre la femme et l’homme réside dans le couple…

On résume donc l’affaire : îLeL est un album aussi emballant qu’intrigant, qu’on l’écoute d’une oreille distraite pour le simple plaisir immédiat de puissantes mélodies pop-rock aux couleurs tribales ou qu’on l’ausculte pour son propos féministe et son intimisme pudique. C’est le deuxième album d’Hildebrandt. Vivement la suite.

 

Hildebrandt, îLeL, AT(h)OME, 2019. Le site de Hildebrandt, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. Image de prévisualisation YouTube

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