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Marie Zambon et sa bande, que du plaisir !

Marie Zambon (photo Ahmed Benyahya)

Marie Zambon (photo Ahmed Benyahya)

La Petite Anna-Tôle, Marseille, 26 juin 2021,

 

Cinq ans. Il aura fallu tout ce temps pour revoir sur scène Marie Zambon. C’est que, même si elle est passionnée de chanson, elle a aussi bien autre chose à faire de son quotidien, au milieu de ses vignobles dont on dit qu’elle tire un nectar savoureux… L’aurions-nous d’ailleurs revue sans l’insistance bienveillante de Gisèle, celle qui tient la Petite Anna-Tôle ? Sans la présence attentive de ses musiciens et complices de toujours ? Rien n’est moins sûr ! « S’ils n’étaient pas là, je n’y serais pas non plus ! », nous dira-t-elle plus tard.

Alors l’émotion est présente dès les premières minutes, imprégnant d’une rare densité cette belle petite salle toute récente à Marseille. On est chez Gisèle, au dernier étage d’un immeuble au fond d’une impasse ; un lieu un peu secret, cosy et chaleureux, qui dévoile une belle scène où se case « la Bande à Zambon ». Les « amies prodigieuses » comme Marie les présentera : Sandrine De Rosa au violon, à l’alto et à la contrebasse, Bénédicte Bonnet au violoncelle, et « l’ami depuis le lycée », Patrick Luirard à la guitare… On les sent heureux d’être aux côtés de Marie Zambon, de ses chansons et de sa guitare ; leur plaisir est communicatif, et on a bien conscience du cadeau immense qui nous est fait là !

Marie arrive sur scène, chemise bleu électrique, sans fard et cheveux courts : « On s’dit des trucs dans les coulisses pour jouer avec le trac, on s’était dit, on va leur dire ‘bonjour Marseiiiille’ ! ». Rires, elle le dit sans le dire et on aime déjà son côté clown. 

Un bel instrumental commence le concert, nous saurons plus tard que c’est la musique de La moindre des choses, c’est dansant, ambiance guinguette, on est bien… Suivent Les brodequins, une des chansons les plus connues de Marie Zambon, ses « chaussures préférées » comme des compagnes du quotidien. Bien placée pour rendre ensuite hommage au Beaujolais, on ressent cette tendresse pour celui qui ne vaut « pas un coup dans les ventes aux enchères » et qui « se boit comme du p’tit lait ». 

Ah, c’est pas avec Marie Zambon qu’on se baladera en collet monté ! On la sent attentive aux laissés-pour-compte avec Au bord d’un monde et avec cette envie de faire bouger le monde encore et encore ! Debout ! nous chante-t-elle ! Des mots toujours d’actualité : « Y a pas le feu mais ça mène / On sait / Au fond des urnes la haine », en étant solidaire et en se battant pour Maurice du Carré 10.

(photo Véronique Marcel)

(photo Véronique Marcel)

Fine chanteuse elle l’est, mais c’est en conteuse aussi que Marie Zambon ponctue son récital de textes : Un regard, Sur la terrasse plus loin, de beaux mots joueurs, de beaux mots émouvants qui vont au cœur sans détour. C’est que, on le devine, on le sent, les circonvolutions c’est pas son truc, à Marie Zambon… Tellement modeste, elle ne dira même pas qu’elle écrit et compose, et vous le chercheriez en vain sur son CD ! Cet album qui tourne si souvent sur la platine (si vous ne le connaissez pas, il est encore temps de le commander !) où on retrouve les chansons aimées, et le plaisir de les entendre enfin ici sur scène, sous le charme des « cordes » magnifiques qui l’accompagnent avec brio !

Des chansons comme Les mains ont comme un air d’éternité : « Pour peu que l’on s’acharne  / A la garder pour soi / Elle vous laisse des larmes / En vous quittant des doigts »… Mots intemporels, comme ceux de Bien sûr qui nous laissent le cœur vrillé d’émotion sur notre chaise : « Bien sûr, tu voudras quitter toutes nos rives / Arracher les pages de nos livres », cette vie en moins qui suit la rupture où on voudrait « déjà être demain ».

« Y a des chansons que j’aurais aimé écrire », nous dit-elle, comme cette jolie Java des haricots de André Marguin, drôle et légère, qu’elle se fait « sacrément plaisir » à chanter, après l’introduction italienne haute en couleurs de Sandrine De Rosa ! Chanson qui fait écho plus loin aux Pissenlits, une chanson de Ricet Barrier, tellement bons rissolés que « C’est un de ces instants merveilleux / Qui font douter de la non-existence de Dieu (…) Et puis les pissenlits, de toute manière / Faut s’en délecter tant qu’on est sur la terre » parce que « Par la racine, ça n’a pas le même goût » !

Et d’ailleurs, tant qu’à parler de terre, ce sont Les fourmis qui sont mises également en vedette, celles qui ont la chance d’habiter sur les aires d’autoroute : buffet ouvert à volonté grâce aux vacanciers ! Mais en écoutant L’étiquette, c’est moi qui jalouse son écriture… Que c’est charmant d’imaginer la vie intime des étiquettes de nos habits : « J’vis en dessous / Je connais tout / De vos manières et de vos goûts » !

Marie Zambon nous parle des petites choses qui font la vraie vie… Cette tendresse d’une vie qui s’envole avec L’oiseau, le cœur d’enfant qu’on veut retrouver avec les p’tits cailloux blancs qu’on Sème, les Drôles de lettres muettes qu’on écrit dans sa tête et qu’on n’envoie jamais : « Mais peut-être les verras-tu passer / Sur ton visage comme un baiser »… Déjà la fin du concert approche, avec L’adieu, l’histoire touchante d’une rupture qui laisse désemparé : « Je ne sais faire que les premiers pas / Les derniers je ne sais toujours pas ».

A quoi tient une chanson ? Sinon à trouver des mots qui réveillent ou émeuvent, sinon à trouver ces notes que nous fredonnerons presque malgré nous, une simplicité apparente, une vraie authenticité… En tout cela, Marie Zambon excelle, elle nous balance entre rire et émotion, dans ce monde si mouvant qu’est la vie, les gens qui passent, les mots qui s’effacent, les mains qui s’enlacent ou pas… On se sent meilleur en écoutant ses chansons !

« Rien n’est gagné d’avance / Est-ce qu’on saura se plaire » ? Avec La moindre des choses qui clôture la soirée, c’est pari gagné pour ce concert intense et délicat, unique à tout point de vue, de Marie Zambon. Dans la rue en sortant, l’air est léger et le pas se fait dansant. Pourvu que d’autres l’entendent bientôt sur scène, on l’aime Tout court, nous aussi… 

 

Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Marie Zambon, c’est là ; la chronique sur son CD « Bien sûr » paru en 2010, c’est ici. Retrouvez sur Facebook les infos et les concerts à la Petite Anna-Tôle.

« Debout » : Image de prévisualisation YouTube

« Les mains » : Image de prévisualisation YouTube

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