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Boris Santeff, 1953-2025

SANTEFF Boris 1977La fourrure s’en va bosser
Le sang qui lui tord le ventre
La fait pleurer
Il est huit heures onze
Le bus va pas tarder
C’est un mariage tous les matins
Avec la machine à machin
La journée viendra divorcer
Sur les coups d’cinq heures passées

La Milly, 1977

Boris Santeff, né Serge Santeff est à l’origine pianiste. En 1977 il fait la première partie d’Alain Souchon à l’Elysée-Montmartre et se fait remarquer au Printemps de Bourges. Il sort alors ce premier album chez RCA, avec des chansons  dans la mouvance cabaret, chantant le Paris de la nuit au piano et à l’accordéon de Marcel Azzola, comme dans Rue Blondel, ou avec une orchestration plus rock et synthé d’époque, évoquant de façon désabusée sa banlieue avec Bétail et Béton ou Banlieue West infantile « Moi je bois mon café à Argenteuil chez Henri », loin des rêves californiens, et des textes qui racontent la vie sans tabou, comme L’amour seul, ou contestant le monde actuel via Prévert « Prémort est vert »… Beaucoup d’autodérision aussi sur l’artiste en devenir avec Pour 25 balles, satire du showbiz.

1978 Printemps de Bourges 350 x3521979 Regarde ma ville RCA Paroles et Musique 350x350Jean-Louis Foulquier contribua beaucoup à l’époque à sa reconnaissance sur les ondes. 

En 1978, il figure avec La Milly sur le double vinyle compilatif du Printemps de Bourges avec Renaud, Alain Meilland, Areski et Brigitte Fontaine, Gérard Pierron, Mama Béa, Michèle Bernard, Ricet Barrier, le belge André Bialek, Font et Val…

Un nouveau disque paraît en 1979 chez RCA dans la collection Paroles et Musique (sans rapport avec la revue) – collection où l’on trouve également publiés Philippe Chatel, Yves Simon, Jean Vasca, Alain Souchon, Mama Bea,  Jean-Michel Caradec, le suisse Jean-Pierre Huser… – avec cet hommage à Ferré, Musique, Monsieur Léo, son maître à chanter « Si j’avais la moitié d’ton verbe et le sang qui coule sous ta peau / Je deviendrais l’homme de ma vie. » Un album malheureusement introuvable sur les plateformes (mais que l’on peut se procurer d’occasion).
Son premier titre est Regarde ma ville qui évoque sans concession sa ville de naissance Argenteuil : 
« Regarde, regarde ma ville, regarde-la pousser / Regarde, regarde ma ville, écoute-la tousser / Pour un touriste, c’est pas terrible, y’a pas grand-chose à photographier / Seulement ici, question usines, on n’est pas mal organisés. » Et puis ce mélancolique regard sur sa Mémé

En 1981 Renaud cite, avec Capdevielle,  Santeff comme son chanteur contemporain préféré : «  Dans les gens moins connus, y’a un mec que j’adore : Boris Santeff. On le compare souvent à moi, parce qu’il chante aussi la zone, la banlieue, le béton, la société dans laquelle il vit, tout ça, mais c’est complètement différent. C’est pas le même langage, pas la même écriture, pas les mêmes mélodies. Il a un style vachement accessible… vachement populaire, quoi, tiens ! »

1982 Déjà qu'on est pauvres...350x351Suit en 1982 « Déjà qu’on est pauvre, si en plus faut s’priver », d’Heureux, amoureux, jusqu’à Pas encore célèbre, d’où est extraite la phrase-titre de l’albumen passant par Les gros n’ont pas le droit d’être tristes, le tendre Soutien-Lolo (comprenez soutif), ou Erotica Palace traitant de cette Marie qui s’exhibe au peep-show Boulevard de Clichy « strip particulier pour mendiant d’amour tenace ». Le ton est contestataire, irrévérencieux et facétieux, comme tout l’album, mais dissimule une certaine tendresse « Car devant la demoiselle son cœur a soudain lâché / Il tomba amoureux d’elle sous les néons artificiés ». Écoutez le legato final… Cité Joliot-Curie, portrait de toute une enfance prolo est carrément nostalgique sur son beau jeu de piano. Son titre La nouvelle chanson anglaise figure en 1983 dans une compilation « Y’a d’la chanson dans l’air » avec tout le gratin de la pop-rock de l’époque, les frères Lalanne, Gainsbourg, Sheller, Ribeiro, Bashung…mais aussi le suisse Pascal Auberson ou le futur Carme Pierre Eliane… 

À cette époque Boris  Santeff fait des premières parties de Renaud, et ayant vu Sarcloret au Faux Nez à Lausanne, chante quelques unes de ses chansons qui l’ont séduit  et en parle à Renaud. S’ensuit l’album Les premiers adieux de Sarcloret sorti chez Polydor en 1983, que Sarclo renie pour les arrangements bricolés par les musiciens de Renaud mais dont il chante toujours les chansons, réarrangées à son goût.

1984 Toutes les chansons parlent de partir... Moi j'veux rester 350x3531990 Femme structurée Martine vinyle côtes du Rhûne Productions 350x350Santeff sort en  1984 un mini album, Toutes les chansons parlent de partir (l’un des titres) sous-titré (Moi j’veux rester). Avec ce très poignant Tenir le temps…
Peu de traces de Santeff jusqu’en 1990 où on le retrouve au Club de Jazz La Spirale à Fribourg en novembre et en tournée avec Sarcloret. Qui lui rend la monnaie de sa pièce en publiant chez Côtes du Rhône Production, la société qu’il a créée, un 45 tours deux titres, Femme structurée (1990). Mais le caractère particulier de l’artiste ainsi que les changements du milieu de la chanson l’entraînent dans une longue éclipse… 

En 2018 Santeff revient pour quelques concerts en région parisienne, avec Hervé Duchâble, ou en solo au Connétable, ou à La librairie anarchiste Publico ; il était aussi question d’un album…  Si les medias ont cessé de s’intéresser à Santeff, nombre de ses pairs et amis témoignent de ce caractère marquant, parfois surprenant mais qui savait trouver les mots justes, dépeçait la cité et la société tout en pouvant parler des choses de la vie avec tendresse. Musicalement, un surcroît d’énergie pour mêler  les cuivres au piano, à l’accordéon ou aux synthés.

(Presque) toutes les chansons disponibles de Santeff sont écoutables sur cette playlist. On peut encore l’écouter lire d’une façon si passionnée et passionnante des extraits littéraires (Daudet, Duras, Yasmina Reza…), sous forme de conférence, durant le Salon du livre et des lecteurs 2025 au Presse Papier à Argenteuil ici ou  (Les décibels en littérature). Ce 10 août la maladie l’a emporté et il a été inhumé le 18 à Pantin… avenue Jean Jaurès. Il nous reste quelques chansons, et ces récentes vidéos pour découvrir ce personnage atypique.
 

« La Milly », 1977 Image de prévisualisation YouTube
« Cité Joliot-Curie », 1979 Image de prévisualisation YouTube
« Tenir le temps », 1984 Image de prévisualisation YouTube

 

 

2 Réponses à Boris Santeff, 1953-2025

  1. Georges LATRIVE 5 septembre 2025 à 17 h 09 min

    Boris SANTEFF, j’ai bien entendu toute sa discographie mais j’ai aussi, en plus le concert qu’il a donné au Festival d’Artigues en 93 (sur K7, oui cela existe encore)…

    Répondre
  2. Patrice Fortin 8 octobre 2025 à 2 h 54 min

    Félicitations, beau travail de recherche sur un artiste que je connaissais (malheureusement…) peu !

    Répondre

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