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Carmen Maria Vega chante Boris Vian : oui, mais…

Carmen Maria Vega

Carmen Maria Vega

Carmen Maria Vega « Fais-moi mal Boris ! », 5 décembre 2013, Le Majestic à Firminy,

 

Tiens, Vian ! Ça fait longtemps que nous ne l’avons ouï, celui-là ! Et Vega, l’étoile le plus brillante de la constellation de la Lyre, star donc, les hauts-talons bien calés sur les stars in bloc. Carmen Maria déjà fait pause en son itinéraire un peu secoué, un rien déjanté, et s’en va frayer avec l’auteur sulfureux et tendre de J’irais cracher sur vos tombes et du Tango des bouchers de la Villette. Ça doit être bonheur, l’écume des nuits appliquée à la scène…

Appliquée, oui. Trop même. On attend une folie furieuse prenant possession des chansons du Boris, en bouleversifiant le trop bel ordonnancement, en en recomposant les molécules façon Folamour. Mais nous n’avons là, devant nous, qu’une chanteuse bien sage qui fait son Vian façon académie, consensuel et admis. A croire que Carmen a été apeurée par cette tâche, intimidée par l’ombre portée du grand auteur qu’elle reprend. Dommage. Car la combinaison, pour le moins singulière et aguichante, entre elle et lui, nous laissait entrevoir plein de promesses, d’émotions, d’attouchements.

Histoire de budget sans doute : Carmen n’a pour elle que deux musiciens. L’un assis devant sa batterie, qui ne donnera vraiment signe de vie et de folie qu’en fin de récital ; l’autre à la guitare électrique, coincé devant son clavier, désespérément statique. Et elle, rehaussée d’une scène circulaire rien que pour elle, design damier pour dame. Un micro même pas d’époque, un décor et des ustensiles annoncés qui n’ont  pas dû être livrés à temps… C’est vrai qu’on aurait pu rêver d’un méga Vega-Vian façon Jérôme Savary : la diablesse en est capable, elle l’a prouvé, elle est capable de tout. Manque de budget et c’est un hommage de poche, certes honorable, estimable, mais en deçà des attentes, que nous avons devant nous.

Il eût fallu aussi que Carmen ose plus dans l’appropriation des mots, qu’elle les habite, qu’elle en fasse chaque fois pièces d’anthologie. Quand Reggiani chantait La java des bombes atomiques, il ne la chantait pas : il y était, la vivait, l’avivait même. On saura toutefois gré à Carmen de nous avoir restitué la prime version du Déserteur, celle où « je tiendrai une arme et que je sais tirer. » Mais l’interprétation est scolaire, sans défi, sans passion. Or c’est quand même pièce de choix de l’œuvre de Vian certes, mais aussi et surtout de la chanson française, engageante et engagée.  

Déçu ? Oui, un peu. Mais satisfait, toujours, de revoir cette divine diva de Carmen. Et de retrouver un bout de l’œuvre chantée du Boris Vian : c’est tellement nécessaire de se mettre en bouche le patrimoine, le grand classique. Il aurait juste fallu que, tout en l’enlaçant sans ménagement, Boris susurre dans l’oreille de notre Vega « Fais-moi mal Carmen, Carmen / Envoie-moi au ciel / Fais-moi mal Carmen, Carmen / Moi j’aime l’amour qui fait boum ! »

 

Le site de Carmen Maria Véga, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’elle, c’est là. Image de prévisualisation YouTube Image de prévisualisation YouTube

2 Réponses à Carmen Maria Vega chante Boris Vian : oui, mais…

  1. Norbert Gabriel 7 décembre 2013 à 11 h 06 min

    Carmen sans Max ? Damned ! Carmen assagie et sans flamme ?? Est-ce possible ???
    A part ça, et en passant, cette première version du « Déserteur » a un parcours assez flou, Boris Vian lui même n’était pas très sûr de cette première moûture, ci-après l’histoire de cette chanson
    http://postescriptum.hautetfort.com/apps/search?s=histoire+le+d%C3%A9serteur

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  2. Danièle Sala 7 décembre 2013 à 14 h 28 min

    D’un côté on loue la tempérance d’ Yves Jamait  »  » pour chanter Guidoni,  » l’interprète habité fait ici montre d’une retenue qui autorise le verbe guidonien à se poser avec une distinction et une grâce rares, dans un espace qui lui permet de revêtir toute la noblesse du sens qu’il porte. » et on critique Carmen Maria Vega parce qu’elle n’en fait pas assez pour chanter Vian ! quoi , elle n’est pas habitée , elle, en restant sobre ? Bon, faudrait voir, et surtout entendre avant de juger, mais l’oeuvre de Vian est très diverse, et souvent empreinte de mélancolie et elle dit bien dans la deuxième vidéo qu’il y a une diversité chez Vian , et qu’elle l’interprète à sa façon, pas pour faire plaisir aux ayants droit de Vian .

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