Hamon Martin Quintet, qui coule de source

Le Hamon Martin Quintet (photos Jérôme Sevrette)
La plupart des groupes folk des années soixante-dix firent grand collectage de chansons et airs à danser, certains dans des livres jaunis, d’autres auprès des anciens, pour nourrir leurs répertoires. C’est là la différence avec les groupes trad’ d’aujourd’hui qui, peu ou prou, ne chantent et ne jouent plus que des créations, souvent dans un grand respect de la tradition.
Nous avons déjà parlé ici du Hamon Martin Quartet, exemplaire groupe de musique à danser de Basse-Bretagne. Groupe à danser, de fest-noz donc, tout autant que groupe à écouter : la qualité de l’interprétation de Mathieu Hamon et le grand intérêt des textes en font un ensemble apprécié, réputé. C’est un groupe « de danse » aussi intéressant en scène que passionnant sur disque.
En formule duo, Erwan Hamon (bombarde et flûte traversière en bois) et Janick Martin (accordéon diatonique), tous deux originaires du pays de Redon, se produisent depuis presque trois décennies. Duo que rejoint rapidement Mathieu Hamon, au chant. Le trio devient quartet en 2001 puis quintet trois ans plus tard. Le duo d’origine compte quatre albums (dont un avec Annie Ebrel et l’Orchestre symphonique de Bretagne) ; le groupe huit albums, dont ce dernier, Et si l’idée coulait de source.
Si Clameurs, leur précédent opus, puisait dans le répertoire de la chanson francophone (de La Chanson de Craonne au J’ai planté un chêne de Gilles Vigneault), celui-ci n’est fait, à un titre près, que de créations. La chanson-titre donne le ton, sonne l’urgence, sur le thème de l’eau et de l’agriculture. « Quel est le malappris / Qui a pris l’eau du dessous / Dénudés sans un sou / Il fait sauver l’eau à tout prix / Et si l’idée coulait de source… » Un titre dont la genèse sont ces manifestations contre les mégabassines à Sainte-Soline : l’engagement est consubstantiel de l’art de notre quintet. Une autre chanson, Aydinlar, évoque le retour d’un pêcheur en Ouzbékistan, là où la mer d’Aral s’est définitivement retirée, cause à la culture intensive du coton : autre histoire d’eau, autre criminelle folie de l’Homme…
Pilé menu, bal et rond paludiers, mazurka, laridé, ridée, an dro, l’art du vivre et danser ensemble est porté ici à un de ses sommets par la voix assez inégalable de Mathieu Hamon, un peu l’égale dans ce groupe d’un Christian Olivier au sein des Têtes Raides. Ou, plus proche encore, d’un Sylvain Giro…
Le Hamon Martin Quintet ne chante pas que pour passer le temps, que pour danser. Sa poésie de tous les instants, ses textes bien charpentés (deux ici viennent de Paul Fort, d’autres de Melaine Favennec, Julie Bonnafont, Denis Flageul, Abanday Tajimuratov, de Mathieu Hamon et une issue de la tradition comme cet entêtant rond de Saint-Vincent qu’est Vingt-sept à la dizaine composé d’effectivement vingt-sept couplets) est son autre atout. Notre quintet est parmi ce qui se fait le mieux dans l’actuelle et foisonnante chanson bretonne, qui augure bien de l’avenir, qui annonce bien d’autres lendemains qui chantent.
Hamon Martin Quintet, Et si l’idée coulait de source. Artfolk/Coop Breizh 2024. Le site de Hamon Martin Quintet, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de ce groupe, c’est là.
« Et si l’idée coulait de source » :
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