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Bobin, poing et contrepoint

(La Talaudière, 3 octobre 2009)

Set resserré, tronqué, mais amplement réussit pour Frédéric Bobin en première partie de Carmen Maria Vega : une demi-heure seulement pour faire connaissance, pour s’imposer… L’artiste se doit alors de déployer d’autres stratégies, tout revoir, même l’orchestration, pour une prestation qui plus est orpheline de batterie. Retour à la case départ presque pour le chanteur et son guitariste, Jonathan Mathis, forcés à retravailler à deux le dernier album, Singapour, dont presque tous les titres étaient extraits. C’est là que se lit plus encore la complicité entre eux, dans ces échanges de notes, dans cette conversation musicale appuyant parfois le propos du chanteur, en prenant aussi souvent l’utile car nécessaire contrepoint : un rien d’ukulélé sur l’ignominie d’une brutale délocalisation, c’est toujours ça de gagné sur le moral.

Jonathan Mathis et Frédéric Bobin (photo Maxime Esnault)

Jonathan Mathis et Frédéric Bobin (photo Maxime Esnault)

Car, de cette impeccable prestation se dégage une étrange impression. On peut ne tirer du répertoire de Bobin que cette persistance de noirceur, de triste nostalgie, ce rien de déprime, parfois d’ennui, qui nimbe l’essentiel de ses textes. Le monde n’est pas beau et il le chante tel quel, sans fioriture ni excès. Ici on se s’évade pas par la chanson, là où la misère serait moins pénible au soleil. Non, le ciel est gris en ce bas monde qui tombe toujours plus bas. C’est colère et désespérance. Et pourtant… Il y a dans l’art de Bobin et de Mathis cette manière d’évoquer le grave en une musique fluide, en une interprétation qui est tout sauf souffreteuse, pleureuse. Il y a une énergie qui nous dit l’espoir, entre les mots, entre les notes. Il y a du bonheur qui pointe, comme perce-neige. Comme l’amour au détour d’une chanson. Comme l’insolite sur les rails de la vie, ces « maisons qui défilent dans les vitres des trains / petits points qui scintillent / dès que le jour s’éteint ». La chanson de Bobin est entre toutes lumineuse.

Sur NosEnchanteurs, on lira aussi l’article C’est beau, Bobin : c’est au bout du bout de ce clic.

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