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Philippe Guillard, un après Ferré affairé

philippe guillard cd« Je reviens d’entre le point et la virgule / D’entre le zéro et la bulle / D’entre le clou et le marteau / D’entre le crâne et le cerveau… » Nous l’avions laissé dans l’émotion d’un récital Ferré qui nous avait estomaqués, plus que ça même. Nous savions, bien sûr, qu’il était aussi auteur compositeur interprète, et qu’un jour ou l’autre nous aurions rendez-vous avec Philippe Guillard sans autre tutelle que lui-même : lui et ses mots, son art, sa voix encore et toujours déchirante que des rasades de rock et de rage ne sauraient totalement assouvir.

Parce qu’il a osé chanter Léo, les croisés de la chanson tenteront de lui faire la peau, par principe, parfois par bêtise. Mais le cuir de ce gaillard de Guillard est épais et sa chanson puissante impose le respect. Pour parler de lui – comment faire autrement ? – on convoquera le souvenir d’illustres artistes dont il s’inscrit dans la filiation : des Ferré, oui, Leprest, Arno, Bashung, Léotard, Brel parfois. La crème oui, mais c’est dans cette famille génétique qu’évolue Guillard, cousin pas si germain que ça. L’exercice sera donc difficile d’y exister pleinement, de s’y faire reconnaître.

Les ambiances musicales électriques, les textes, souvent sombres, poisseux, ciel gris et pluie d’ici, la voix grave, éraillée, ruinée de tabac, tout concoure à une dramaturgie épaisse, consistante, toute en relief, en poings et en déliés. Ici s’étalent seize tableaux lumière fin de nuit, aube qui tarde à poindre. Sa chanson sent le vin, sent la vie, les désirs autant que les regrets, sent les gens, sent l’amour, ses « vies sans toi où je m’endors / Dans une vie de mandragore / Enseveli dessous l’humus. »

On savait l’interprète, on sait désormais l’auteur qui nous arrive. C’est une bonne nouvelle pour la Chanson. Il lui faudra d’amples scènes pour que s’installe son bazar, ses mots tordus qu’il redresse, ses vers qui grouillent, ses plaies et ses moments de tendresse, sa Lilith et ses peintres : Vincent le jaune et De Staël. Ils ne sont pas si nombreux que ça nos chanteurs à colorer leurs vers d’autres palettes chromatiques, piquant les couleurs aux tubes de peintres, à transcrire un peu une œuvre, une vie, des toiles. Guillard fait stèle à De Staël et arrose les tournesols du dur de la feuille.

Donnez-moi d’autres vies, chante Guillard, les convoquant à lui, les tirant du Grenier de sa mémoire. Il s’empare, il s’en pare. Dans ses malles, il y a des trésors d’intelligence et de sensibilité. D’émotion et de retenue aussi : écoutez Mon papa, vous comprendrez.

 

Philippe Guillard, Quand on me demande, Blanc Musiques, 2014. Le site de Philippe Guillard, c’est ici.

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6 Réponses à Philippe Guillard, un après Ferré affairé

  1. Danièle Sala 2 décembre 2014 à 11 h 32 min

    Une filiation prestigieuse, une sensibilité à fleur de mots, une voix d’écorché vif qui crie  » donnez moi d’autres vies », qui a soif de  » flaques d’azur aux portes de la nuit » , qui fait surgir  » les ombres des visiteurs du soir  » du grenier de sa mémoire, et qui s’envoie promener hors piste quand les culs-de-sac lui bouchent l’horizon . On reçoit ses chansons comme un alcool fort qui brûle et laisse un goût d’amertume et de tendresse , et on a envie d’en reprendre .

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  2. Claude Fèvre/ Festiv'Art 2 décembre 2014 à 12 h 16 min

    Entre les mots de Michel et ceux de Danièle si finement choisis, des mots qui font de l’effet (nos lecteurs ont, pour certains, un sacré talent d’écriture !) j’ajouterais que cette famille à laquelle appartient Philippe Guillard est de celle qui égratigne, cogne et bouscule… je l’ aime en littérature aussi… j’ajouterais Miossec, non ?

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  3. catherine Laugier 2 décembre 2014 à 14 h 06 min

    Je ne pourrais pas dire mieux, mais j’ai déjà donné mon avis.

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  4. Cuffi Georges 2 décembre 2014 à 19 h 30 min

    Comme au moins Michel connait mon avis (négatif, on en a même parlé en MP) je me bornerais à dire que ce panégyrique me semble pour le moins exagéré, surtout après le massacre à la kalachnikov de l’avant dernier interprète de Ferré chroniqué ici, lequel était d’une sobriété minimaliste à côté de mr Guillard. Je ne résiste pas au plaisir de dire que vraiment, il y a Depoix deux mesures (elle est bonne, non?) Mais bon, ici, il s’agit des chansons de Guillard, donc chacun son avis, car là, il est maître de son interprétation puisqu’il ne trahit les textes de personne.

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  5. martine 2 décembre 2014 à 21 h 59 min

    touchant , sensible, servi par une orchestration que l’on pourrait souhaiter plus discréte parfois, mais percutante , comme les mots qui viennent du coeur.. Il nous dit l’urgence d’aimer. Touché_coulé, dans une bataille du coeur qu’on lui souhaite sans naufrage(s)…

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  6. Norbert Gabriel 7 décembre 2014 à 2 h 27 min

    photo de son spectacle d’auteur compositeur interprète..

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