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Imbert Imbert, mordu de vie

Imbert Imbert photo d'archive au Bijou à Toulouse (photo Stéphane Mommey)

Imbert Imbert,  photo d’archive au Bijou à Toulouse (photo Stéphane Mommey)

 Imbert Imbert en duo, Le Petit-Duc, Aix-en-Provence 9 décembre 2017,

 

C’est un duo en complicité majeure. Presque un duel parfois, à coup de contrebasses comme certains font des duels de tchatche. Tout les oppose. L’âge, la corpulence, le style.

A ma gauche – aucune connotation politique – Stephen Harrison, la force de l’âge, l’enveloppe généreuse, l’humour british (il l’est), le costume croisé rayé style années 30.

A ma droite Mathias Imbert, crête de punk tendre et tenue assortie, avec son pull qui lui fait scintillante côte de maille, coupé au bras gauche pour plus d’aisance à jouer, sourire mutin (au vrai sens du terme), la mélancolie heureuse, s’en fout la mort parce que « faim des jours qui nous sont comptés »

Un peu plus d’un an depuis son dernier passage en Provence, à la MJC de Venelles. Là c’est coup double, Marseille puis le Petit Duc dans le même répertoire de vie, d’amour, le seul qui sauve de la mort, du temps qui passe, et des cons. Thèmes qu’il décline depuis Débat de Boue (2007) jusqu’à Viande d’amour (2016), avec une maturation de sa musique de plus en plus intense, comme de ses textes vers une épure poétique : « Faut du courage pour aimer / Le courage de savourer / La portée de l’abîme / La douceur du poison / Et de gagner son temps / A perdre la raison ». Sexe, drogue et girolles fait l’objet d’une superbe impro vocalisée et de légers glissements et pincements qui en font une chanson douce pleine de rêves « sans flic, sans fric…sans bagnoles ».

Beaucoup le découvrent, et cette petite assemblée lui fait un triomphe, reprend le « Beurk » du refrain du Cancer des gens soumis, ou le « Je me touche » de Je con vit. C’est qu’il ne ressemble à personne, Mathias Imbert. Capable de s’exprimer avec cette liberté crue qui est tout le contraire de la vulgarité, une inventivité poétique où les mots se bousculent. Incarnent les mouvements de son corps et de son âme qui ne font qu’un, les humeurs charnelles qui circulent, jutent, se boivent, se lèchent, ventent des odeurs triviales, brûlent de feux ardents – le cœur, le con, le vit ou la queue, le cul, tout ne fait qu’un : « Car ça brûle au fond de moi / D’un feu de joie dans le bide / Je bouillonne à petit feu / Comme pour une insolation ».

Le temps passe, L’ado le sent, allégé par le banjo dissonant, épuré en un vrai chemin de vie; ou « Je biberonne / A la gorge du temps / Les gouttes d’heure / Les perles de secondes ».

Les contrebasses, boyaux pour Stephen, cordes pour Mathias, chantent, gémissent et pleurent, sous les caresses de l’archet, les claques des mains calleuses à force de battre et de pincer. Elles n’en finissent pas de résonner, de rythmer, de bercer. Hésitent entre rock, jazz, parfois country quand se mêlent banjo ou ukulele. Servent de partenaire de danse, de joie aussi, d’égaliseur d’humeur.

Quand la tension est trop forte, Stephen se sert de son instrument pour faire des  poids et haltères. Avance, balance la contrebasse, bat les cordes les doigts en marteau dans un bruit de claquettes, long passage musical qui  crée le suspense « Alors c’est d’accord / Pour qu’on vive encore / Accordés à corriger la mort / S’envoyer aux nues / Lui cracher dessus / Jamais repus »  
Ou improvise un cours de technique musicale, deux accords, une petite phase plus compliquée, une « syncopation », et on va exorciser en chœur ce cerveau générateur d’idées négatives parasites « Mais sois mort et tais-toi / Que j’m’en mette plein la joie/Que j’en crève / Que j’morde encore à l’amour / A la lumière du jour / De mes rêves… »

La mort est omniprésente, mêlée intimement à la vie sans qu’on puisse les séparer, de La vie mord à « J’veux m’sentir mourir / A tous les instants (…) J’veux qu’le cœur me brûle / Que j’ la sente passer / La vie qui m’encule / Et le temps passer » tout au ukulele, et par moment sans micro.

Imbert Imbert en répétition au Petit Duc (photo DR)

Imbert Imbert en répétition au Petit Duc (photo DR)

En rappel petite séance de chant collectif en vocalises pour introduire Ni déesse ni maîtresse et Faut qu’j’l’oublie de ses premiers albums.

 

Le site de Imbert Imbert c’est ici. Ce que NosEnchanteurs a déjà dit d’Imbert Imbert c’est là.
Outre ses tournées Imbert Imbert en duo, Mathias Imbert participe à Bancal chéri avec Nicolas Jules, Dimoné, et Roland Bourbon qui sortent un album début 2018 ; et à Boucan avec Piero Pepin à la trompette et au bugle, et Brunoï Zarn à la guitare et au banjo qui se produit depuis le début de l’été 2017. Les musiciens écrivent et composent ensemble dans leurs groupes respectifs.

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2 Réponses à Imbert Imbert, mordu de vie

  1. André ROBERT 12 décembre 2017 à 9 h 49 min

    Bel hommage à ce ciseleur de mots et de notes si attachant

    Répondre
  2. Or Évier De Cuisine 15 mars 2021 à 13 h 49 min

    Bon article. Bonne journée.

    Répondre

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