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Vincent Truel avec Emma Daumas « Le soleil a raison »

TRUEL Vincent 2019 Indicible innéQuelques absences ont brouillé ma vision
Tes mots ta voix, adorable prison,
Des rêves rouges ont muré ma raison
Mes lèvres bougent, sage indécision
Et si le doute inonde ma maison
Chacun chez soi, le soleil a raison

Vincent Truel avec Emma Daumas

Illustration pochette Ursula Caruel

Paroles et Musique Vincent Truel. Extrait de l’album « Indicible Inné » (2019)

Un album majoritairement instrumental de ce pianiste auteur-compositeur  avignonnais que nous avions rencontré à Aix-en-Provence accompagnant le slameur Dizzylez, dans un spectacle aussi créatif musicalement que poétique. 

Vincent Truel n’a guère besoin de mots pour créer de la poésie, nous transporter dans un paysage d’émotions, dans un voyage où s’enchaînent les morceaux d’un parcours de vie… L‘indicible est-il inné chez lui, ou bien l’inné ne trouve-t-il pas de mots pour s’exprimer…. C’est une musique qui met le corps en émoi autant que l’âme, pas pour remuer en rythme, plutôt pour trouver en soi  des parcours, des questionnements, développer des souffles, des ailes, voguer  dans le courant … Sur la longue plage de neuf minutes, tout monte, souligné par de brèves ponctuation de trompettes, en mouvements itératifs à la Philippe Glass, avant de se poser en notes qui coulent comme du Satie. 

Samples créateurs d’atmosphère, entêtantes répétitions, on se cherche, Sage indécision, on doute, on s’ensoleille, et la voix aérienne et pressante d’Emma vient confirmer l’indicible. Parfois le piano se promène Rue de la Garance, comme une musique de film dont l’auteur aurait longtemps écouté Ravel ou Debussy.
Quelques fois ce sont des mots qui inspirent la musique, comme ce poème, Les cris vains du roumain Ghérasim Luca, juif libéral proche du surréalisme, dont le corps faisait poésie avec ses mots, et qui se suicidera en 1994, terrorisé par le retour des mouvements racistes et antisémites. « Personne à qui pouvoir dire / que nous ne faisons rien / que nous ne faisons / que ce que nous disons / c’est-à-dire rien ». Les notes du piano y déferlent en tourbillons insistants, en flux et en reflux.

Truel sait mêler aux  notes de piano des samples discrets de sons de la vie créateurs d’atmosphère, chants d’oiseaux, lointaines sonnailles, sons abîmés de vieux vinyles ou cassettes, et aussi  cuivres et cordes…  Le violon et le violoncelle d’A Saint-Jean, dissonants et déchirants, évoquent d’étranges processions.

Deux chants-poèmes, Je suis né aujourd’hui de l’écrivain-poète-slameur Julien Delmaire, à la voix et aux mots brûlants (recueil Rose-Pirogue, 2016) : « Je suis né aujourd’hui / J’ai pu mourir hier / Je suis à l’exacte dimension d’une tornade » et Lovebirds, du slameur anglo-français Dizzylez, chanté par Malika Alaoui et Romain Castera aux superbes voix de velours, avec contrebasse, batterie et sax : « Honey I need you tight… / Yes you went too far, did not follow no rule / And if sky is the limit, then you reached the Moon » sont deux magistrales chansons jazz qui achèvent de rendre cet album exceptionnel et indispensable. 

L’album a été enregistré sur trois pianos différents ayant chacun leur propre couleur sonore, Kawai, Steinway et Pleyel aux pays du soleil… Chapelle des pénitents gris à Villeneuve-les-Avignons, La Buissonne à Pernes les Fontaines, et  Studiomatik à Gordes. Plusieurs musiciens, chanteurs et poètes ont fusionné leurs talents pour ce résultat de grande classe, que je vous conseille d’explorer même s’il s’éloigne un peu de la chanson française. 

 

Emma Daumas sort un album le 22 janvier 2021, L’art des naufrages, dont Les jeunes filles en fleur est le premier extrait. 

 

 

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