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« Souchon dans l’air », hélas sans trop de relief

souchon dans l'air aura son disque 2Pour faire comme on cause désormais, afin de ne pas passer pour ringard, on parlera de « tribute ». Pour respecter notre langue, on dira simplement « hommage » : c’est dans le dico. Deuxième hommage discographique du vivant de l’ami Souchon, en fait la seconde partie d’un disque paru à l’automne dernier. Avec son lot d’artistes bankables (c’est comme ça qu’on dit, aussi) : il ne viendrait pas à l’idée d’une major d’y faire venir un chanteur plus intéressant artistiquement mais moins connu : chez ces gens-là, monsieur, on ne fonctionne que dans l’entre-soi. De fait ça rend le résultat nettement moins intéressant. Entre-soi et quasi inceste : qu’on y fasse chanter, qui plus est en duo, les fils Souchon (Pierre et Ours, qui s’y partagent La p’tite Bille elle est malade) à plus forte raison qu’ils sont les coordonnateurs des deux albums, ça peut faire plaisir à tout le monde, au papa Souchon en particulier (qu’on a dit réticent à cet hommage de son vivant), sans cependant apporter quoi que ce soit de plus à l’œuvre, simplement signer une parenté. Mais y faire venir des artistes dont l’art et le timbre se rapprochent de Souchon, à tel point qu’on les compare souvent au maître, comme Mathieu Boogaerts, Albin de la Simone, Vianney, même Katerine (si encore il pétillait, comme à l’accoutumée…), c’est faire inutile doublon, d’autant plus que jamais (c’est une habitude sur les tributes produits par des majors, ou alors c’est rare) il n’y a vraiment de travail d’interprétation, de réappropriation des chansons retenues par les repreneurs : programme minimum, on n’a pas dû louer le studio d’enregistrement pour longtemps…

Tout est pas trop mal, presque probant, mais rien n’est emballant, a fortiori enthousiasmant. Nous disions la même chose du premier volume et c’est plus que dommage : c’est du gâchis, presque donner de la confiture à des cochons. Qui certes ne cochonnent rien mais ne font que le minimum requis : ils chantent, ils reprennent chacun un titre (trois d’entre eux sont récidivistes, qui étaient déjà présents sur le premier volume : Katerine, Mathieu Boogaerts et Arthur H) sans plus l’habiter que ça. Comprenons-nous : Boogaerts ou De la Simone, c’est beau, très beau, mais c’est du sous Souchon, c’est inutile redite, ça n’apporte rien. Pareil pour Infinite Bisous. Notons que nous sommes quand même dans l’un des répertoires les plus enviables de la chanson française : Souchon, c’est pas rien, c’est important, c’est du premier choix, du caviar. Qu’ici on caviarde.

Au premier volume, les dames sauvaient l’honneur (Jeanne Cherhal à l’évidence, haut la main, mais aussi Izïa et Vanessa Paradis). Là elles sont très minoritaires. La voix fragile de L sauve l’apparence, guère plus.­­ Et Camille…

Qui a-t-on envie de sauver de ce disque plat ? A l’évidence Maxime Le Forestier, pour L’amour en fuite. Mais on le sait depuis longtemps, Le Forestier est la plus belle voix de la chanson, le meilleur interprète. Lui et Camille, presque en état de grâce, mais c’est l’habitude. A les écouter, on en oublie Souchon, ce qui est pour moi un compliment. Saluons Vianney et Delerm, désolons-nous de Gaëtan Roussel, de Keren Ann et de Yael Naim. Et demandons-nous ce que vient faire ici Adrien Gallo, chanteur de BB Brunes, qui nappe d’une fade pop une interprétation très conforme et si convenue d’On s’aime pas.

 

Notons que ce disque rassemble, dans l’ordre d’entrée « en scène » : Katerine, Maxime Le Forestier, Mathieu Boogaerts, Adrien Gallo, Keren Ann, L/Raphaële Lannadère, Arthur H, Albin de la Simone, Infinite Bisous, Vianney, Vincent Delerm, Gaëtan Roussel, Alex Beaupain, Ours & Pierre Souchon, Camille, Yael Naim.

 

Souchon dans l’air Disque 2, Polydor/Universal 2018. Ce que NosEnchanteurs a dit du Disque 1, c’est ici. Pas de vidéo sur une de ces interprétations, mais on retrouve Le Forestier et Souchon ensemble sur celle-ci : Image de prévisualisation YouTube

Une réponse à « Souchon dans l’air », hélas sans trop de relief

  1. Joël Luguern 4 avril 2018 à 12 h 49 min

    « A les écouter, on en oublie Souchon, ce qui est pour moi un compliment. »
    Michel Kemper a très bien défini le seul intérêt d’une reprise: c’est quand on oublie l’interprète d’origine de la chanson.
    Ce qui arrive très très rarement dans les « hommages ».
    A cette aune, je dois dire, quitte à en faire sursauter quelques uns et quelques unes, que le meilleur « repreneur » a jusqu’à présent été Johnny Hallyday. Quand on écoute son interprétation de « Ne me quitte pas », « Et maintenant » ou « L’hymne à l’amour », c’est d’une telle intensité qu’on en oublie Brel, Bécaud et Edith Piaf.

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