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Arthur H, pour l’amour infini de la vie

Arthur H Document Rising Bird Music

Arthur H Document Rising Bird Music

En ces temps difficiles, désabusés, déshumanisés, ces temps de grandes inquiétudes et de grandes solitudes, après cette désenchantée parenthèse qui nous a volé trois années de rencontres et de vie, bien difficile d’écrire un hymne à la vie. Sans jamais tomber dans la facilité ou la pédagogie, c’est pourtant ce qu’a fait Arthur H dans ce douzième album, vibrant, aux mélodies jazz qui à la fois portent sa patte, ces rythmes récurrents qui vous incantent , vous dansent, vous rassurent, vous dérangent, et en même temps se renouvellent. L’album, enregistré au Triton aux Lilas a été mixé à Montréal au Québec, réalisé avec sa compagne Léonore Mercier qui co-écrit les textes et canalise la folie d’Arthur. Elle sait tirer le fil d’une chanson sans perdre la spontanéité de son inspiration, avec sa vue d’artiste à la fois plasticienne, réalisatrice et compositrice. On retrouve également le complice de toujours, Nicolas Repac aux arrangements de cordes somptueux. Les cordes et les samples se fondent avec des instruments anciens, intemporels comme la guimbarde, ou créations récentes, les Ondes Martenot et le Cristal Baschet dont il s’est déjà fait accompagner en concert, et qui ne sont pas si loin de la harpe.

Le message – qui ne semble pas voulu comme tel, mais ressort à l’écoute des titres – est réconfortant, basé sur l’attention à l’autre, l’ami qui vous aide ou que l’on aide dans les méandres de cette vie qui peut se faire difficile, voire dramatique : « Ce cauchemar glacé qui te surveille / Tu l’envoies valser et tu te rappelles / Qu’à l’origine, une caresse te traverse / Qu’un regard t’éclaire et te protège ». Voix rauque et murmurée, rassurante, rythme balancé, chœurs en fond, puis s’élève la clarinette qui donne ce côté oriental, tel un duduk, pour nous donner La route à prendre : «  Depuis si longtemps tu attends ce qui ne vient jamais / Chasseur d’ombres, chasseur de fantômes / Ce que tu attends, tu le prends ». C’est un grand frère, presque maternel – et d’ailleurs sa voix se laisse souvent emporter dans les hauteurs – qui nous berce ainsi, au gré de la beauté, des éléments. Dans toutes les chansons d’Arthur H reviennent depuis longtemps ces divinités tutélaires, le soleil, la lune, les étoiles et le vent. Qui vous font ressentir l’appartenance à un grand tout, qui vous protègent et vous élèvent. Cet océan qui efface derrière vous la trace des pas dans le sable, vous agrandit le cœur : « Tout ce qui me pèse, me tire vers le bas / Oh je le dépose / Sur le sable rose ».

ARTHUR H 2023 La vie 264x264Cette fois-ci, il n’y a pas vraiment de chanson d’amour dans l’album, à part un amour qui s’en va, avec cette conclusion de vide à la Anatole France : « Toi, tu t’en vas / Moi, je demeure » (Cet amour me tue). Ou cette folle déclaration d’amour à sa Fontaine, sa Belkacem et son accumulation de qualificatifs « ma délicieuse, ma redoutable, ma séditieuse » et plus inattendu « mon ver de terre » ou « ma pomme de terre », ces mots qu’il aime laisser couler, comme une écriture automatique, comme le faisait aussi son père Jacques Higelin. « Sorcière, je t’aime » parce qu’elle est justement et depuis longtemps son phare, son port d’attache, autant guerrière que fragile , « Tu ne sais que tomber / Sur ton matelas de soie ». De son père, il dévoile Le secret, transcrivant avec une infinie pudeur l’aveu qu’il a tenté de faire de son vivant, incompris, et qu’il a transmis à son fils, «  Alors cette histoire qui me tue / Révèle-la, libère-moi / Et laisse-moi te prendre dans mes bras / Je partirai avant toi », sur une musique à la Satie. Mais toujours, le même message : « De l’océan, les vents chassent la pluie ». Écoutez la chanson, lisez l’autobiographie d’Higelin de 2015 co-écrite avec Valérie Lehoux, et son récent « Car toujours le silence tue », ne regardez pas les vidéos people, soi-disant révélations pour voyeurs.

Si Arthur H est sans colère dans ce poème, il s’élève avec une virulence nouvelle contre tout ce à quoi on nous a rendu accro, pourtant rien d’indispensable. Avec toutes ces voix, enfants, femmes, hommes « Je suis accro à l’addiction » qui montent, vous envahissent, vous agressent. Et aussi cette Folie du contrôle, dystopie quasi réalisée où se mêlent les injonctions contradictoires, déshumanisantes : Repousser ses limites – Obéissance citoyenne – Infantilisation – Autocensure – Désinformation – Normes – Intelligence artificielle – Idéologie – Algorithmes… Un texte parlé sur une musique angoissante, contemporaine, cinématographique : «  Surveiller, contraindre, contrôler , punir ». Et puis la voix s’élève, nous donne une piste : « Invoque la beauté / Et la liberté / Le pire est possible / Le meilleur aussi ».

L’amour, avec un grand A, inonde cet album, ouvre nos ailes, il est plus fort que la mort. Jusque sur le Titanic, le musicien nous le dit : « Je joue pour l’amour infini de la vie ». Et sur des notes célestes, « Je suis une rose qui s’ouvre / C’est mon parfum qui t’enivre / Je suis une graine que tu sèmes / Et déjà l’arbre qui te couvre », Arthur nous conduit vers l’inaccessible étoile.

Arthur H, La vie, Naïve Records, 2023. Le site d’Arthur H, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs a dit de lui, . En tournée de concerts, prochaines dates le 4 mars 2023 au Thor, le 29 mars à Sochaux, le 27 mars au Trianon à Paris, autres dates sur le site. 

« L’Océan, La vie », Carte blanche sur Totémic, France Inter, 9 décembre 2022 Image de prévisualisation YouTube
« Divin blasphème », Symphonique Orchestre Pasdeloup @ La Seine Musicale Mise à jour mars 2023 Image de prévisualisation YouTube

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