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Serge Lama, le temps de la rengaine…

Du haut de quarante ans de carrière, il est tentant de mettre en perspective ses chansons, d’en faire pâte à modeler une histoire que d’aucuns prendront pour autobiographie. Ce papier exhumé remonte à avril 2004, lors d’un récital au Cinéma-Théâtre Le Majestic, à Firminy.

"C'était le temps où les chanteurs avaient d'la voix" (photo DR)

Archive. « J’ai pas eu de ballon rouge / Quand j’étais gosse dans mon quartier… / J’ai rien d’mandé / J’ai rien donné / J’ai rien reçu… » Par un florilège de ses tubes, Serge Lama fait comme chronologie romancée. D’abord l’enfance et Mon ami, mon maître pour exemple. Là, Lama fait gamin, élève appliqué. Le gosse, « puceau qui a de si beaux yeux », grandit vite. C’est presque comme la jeunesse de Casanova, initiatique libido : « Ne t’en fait pas, c’est toujours comme ça, la première fois. » C’est l’époque où « les illusions on les dansaient sous les lampions » ; c’est « le temps de la rengaine (…) où les chanteurs avaient d’la voix. » Lama tétonne, juponne, braconne. Puis se fait L’Algérie. Le voici artiste, qui sacrifie son cachet pour offrir des fleurs à cette chanteuse qui a toujours vingt ans. Libido encore, il découvre la femme, aime plumes et plumards : « Admirez-vous vos seins / Les caressez-vous ? Dessus, dessous ? » Vient L’Enfant au piano. Et, de suite, Chez moi, chef d’œuvre de construction, bijoux d’interprétation : « Viens, laisses un peu tomber tes poupées… » Puis Les Glycines, autre joyau, Superman, Le Gibier manque et les femmes sont rares, Les P’tites femmes de Pigalle… En fait, l’homme toujours face à la femme, en éternel amoureux, en patenté Misogyne
Tout est Lama, tout est probant dans cette image qu’on peut se faire de lui et qu’il s’amuse à entretenir. Le rire masque l’émotion contenue, mais c’est le bon vivant, l’épicurien qui est là, au plus près de son public, dans un spectacle qu’il veut comme un remerciement, une reconnaissance, un cadeau.
Le récital se nomme Accordéonnissi…Mots, qui voit le chanteur en tête à tête avec un seul et unique musicien, accordéoniste. L’occasion est belle, pense-t-on, d’une épure bienvenue, celle qui nettoie les têtes de lecture, allège de trop lourdes orchestrations qui ont pu fatiguer à outrance des chansons. Là, disons que c’est surprise que cet accordéon génétiquement modifié qui vous fait orchestre, batterie, qui se fait piano, qui sait cloner tous les instruments. Qui, parfois aussi, a la sagesse de n’être qu’accordéon. C’est bel ordinateur sonore qui fait la notable économie d’un groupe constitué. Séduisant, oui… mais autrement gênant.
Reste qu’on a Lama, en salle petite, à portée de soi. Qui, même s’il fait d’un récital un pot-pourri, même s’il ne semble donner qu’une partie de lui, même s’il tronçonne à outrance ses chansons pour mieux papoter dedans, est déjà bon à prendre. Ces rengaines populaires font partie de notre histoire. On regrettera seulement qu’une telle sélection occulte la partie la plus récente de l’œuvre de l’artiste, décennie semble-t-il assagie, qui n’émarge pas dans ce mémorandum d’un pucelage depuis longtemps perdu.

Le site de Serge Lama.

2 Réponses à Serge Lama, le temps de la rengaine…

  1. Marie-Christine 13 janvier 2011 à 12 h 12 min

    Ravie de voir que mon chouchou Serge Lama soit parmi vos « enchanteurs », et ravie de voir que vous le racontez si joliment. Si Serge est un enchanteur (et il en est un, croyez-moi), vous en êtes un, vous aussi et je vous remercie de ces si exquis mots (oh, ce jeu de mot n’est pas de moi, je voudrais bien, c’est bel et bien de lui !!!). Je vous souhaite aussi une excellente année 2011, pleine d’enchanteurs et bien entendu, pleine de mots aussi délectables que ceux-ci, cela va de soi !!!!

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  2. Gral 13 janvier 2011 à 18 h 10 min

    Belle évocation de la carrière de Serge Lama, merci à vous.

    Répondre

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