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Francesca Solleville… et celui qui meurt d’aimer

Francesca Solleville, vendredi 28 octobre 2011, 5e Rencontre de la Chanson francophone, salle des fêtes de Prémilhat,

Francesca Solleville (photo Catherine Cour)

Bien plus qu’un répertoire, c’est un florilège : Allain Leprest, Jean Ferrat, Anne Sylvestre ; aussi Gilbert Laffaille, Jean-Max Brua et Véronique Pestel, que des auteurs dont le nom est à jamais gravé au Panthéon de la chanson. Que des grands. Et cette rebelle-là, la Solleville, pour les porter avec force, détermination, rare élégance. Et des moments plus forts encore. Comme ce Nuit et brouillard chanté sans emphase, avec calme, sans nulle colère, la voix posée : d’autant plus efficace, impressionnant… Comme Vanina, comme Sarment, comme… Etonnante femme, vraiment, dans la fulgurance de la voix, du geste, qui convoque à elle la beauté du monde et la dignité de l’humain. Je ne suis qu’un cri chante Francesca, et c’est ça. On a tout dit d’elle, et sans doute pas assez, en tout cas rien d’équivalent à son talent : le vocabulaire s’épuise devant une telle femme, tout superlatif est superflu. Alors disons que c’était un récital de Francesca Solleville et on aura déjà tout dit. Si, ajoutons la prépondérance des textes de Leprest et de Ferrat, deux de ses frères d’Antraigues et d’entraide, de chanson et de vie. Eux sont partis, elle est restée.
C’est dire le cadeau de cette chanson inédite de Leprest, Le tami. Et de cette autre, l’ultime d’Allain, la der des ders, toutes guerres cessées, toutes luttes vaines, comme un dernier cri. Qu’il a offert à Francesca en juillet, avant de se pendre trois semaines après. Extrait :
« La langue bleuie, les bras ballants
Pesant l’oubli, le cœur moins lourd,
Trois p’tits tours autour d’un nœud coulant
Fiers capitain’s au long court,
Voyagent en cerf-volant
Priez pour les morts d’amour »

Francesca et Allain, en juin 2010 (photo M. Kemper)

Est-il heureux celui qui meurt d’aimer ? Filiation de grands poètes, ces ultimes vers ont quelque chose de François Villon, de sa Ballade des pendus… Comment vous dire l’émotion de Francesca, dépositaire d’un tel message, si poignant, si bouleversant, de ce devoir de mémoire qui désormais lui échoie ; comment vous dire celle du public découvrant à son tour l’aveu du suicide à venir, qui est venu, que nul n’a vraisemblablement su comprendre, à plus forte raison prendre aux mots ? Salle bouleversée, larmes qu’on peut retenir ou pas. Et ces mots qui résonnent et résonneront longtemps en nous : « S’enlacer, se départir / Pour le pire et pour le pire / Un vol aller, sans retour / Que vivent les morts d’amour. »

Une réponse à Francesca Solleville… et celui qui meurt d’aimer

  1. Joël CARPIER 30 octobre 2011 à 19 h 04 min

    J’avais vu Allain le 12 août à Antraigues, il semblait heureux en jouant aux boules ce soir là, ce matin là : il était 1 heure…Quels mots échangés, des banalités…et puis se reprocher ensuite de ne pas avoir plus parlé avec lui.
    Bien sûr je pense à Francesca à qui Allain a confié cette « der des ders » où tout est écrit…. mais comment croire ces mots…
    Cette chanson est bouleversante et Francesca est merveilleuse dans cette interprétation.

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