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Les Filles du Canal : Garance / Gaëlle Vignaux

Garance (photo DR)

Garance (photo DR)

C’est Noël avant l’heure sur la Scène du Canal en cette nuit quasi hivernale… Mais… Mais… Quelles sont ces lueurs chaleureuses qui nous attirent en ces lieux, quel est ce phare dans la nuit, seraient-ce les quilles du fanal ? Que nenni, ce sont be(les) et bien les Filles du Canal ! Nous ne reviendrons pas davantage en ces lignes sur la convivialité retrouvée des lieux, sachez simplement que la salle n’était pas loin d’afficher complet, et qu’il y avait du beau monde pour applaudir nos deux petits elfes chantants… (elles me pardonneront l’image, enfin, je l’espère !)

Aut.GaranceC’est donc Garance qui attaque les hostilités, seule en scène avec sa guitare, pas bégueule, bardée de son bagage de beau bagout. D’emblée, le contraste est saisissant entre son apparence frêle, presque sage, et son abattage impressionnant quand elle monte dans les tours, scandant sa passion telle un fruit acide qui agacerait les dents en donnant envie d’en gouter d’avantage encore… Le jeu de guitare est volontiers percussif et rentre-dedans, les mots, agilement portés par d’altières allitérations, sont au service gagnant de foisonnantes idées rock et folk… La force des chansons de Garance est de savoir sembler légères au premier abord, avant de dévoiler une profondeur cachée à même de vous faire perdre pied au beau milieu du gué. Les bien belles amours émaillant les textes sont sans œillères, mais pas sans œillades, et vont droit au cœur en faire vibrionner les ventricules comme sur le très poignant De retour de Saigneu, moderne et déchirante histoire de rupture par texto, dans laquelle l’esprit de Renaud n’est pas si loin (entendons-nous, hein, du Renaud qu’on aime…). A noter aussi la belle interprétation hargneuse de « J’n’écrirais pas de chanson sur toi » (Jour de poisse), implacable réquisitoire contre le harcèlement de rue, contre le harcèlement tout court d’ailleurs, le genre de superbe chanson qui ne nous fait pas sentir spécialement fier d’être un garçon, aussi civilisé soit-il… Et lorsque la belle tombe malencontreusement dans un (petit) trou de mémoire, elle s’en sort à merveille, mettant sans coup férir le public dans sa poche-revolver, arme de séduction massive s’il en est. C’est ce qui s’appelle se donner accords et armes.

Gaëlle Vignaux (photo DR)

Gaëlle Vignaux (photo DR)

Après voir vidé intégralement le bar échangé quelques civilités d’ordres artistiques en compagnie de l’accorte société présente ce soir, nous retrouvons après quelques laps et avec grand plaisir la pétillante et pétulante Gaëlle Vignaux. Imaginez un petit bout de femme des plus volontaires, faussement maladroite et follement attachante dans son humanité froissée. Quelle belle présence ! Quelle belle énergie ! Guitare électrique, violoncelle, trompette et percussions forment un écrin vigoureux et sensible à ses textes ciselés comme autant de petits bijoux pas si fragiles qu’il n’y parait… Un extrait de La Consolante d’Anna Gavalda sert d’exergue au splendide Satanée thanatophobie, bouleversant coup de pied au cul à la Camarde. Je l’ai déjà dit, je le redirais, cette chanson est tout simplement l’une des plus belles, tous artistes confondus, écrites ces dernières années. Aut. GaelleEt puis les précédentes aussi, tiens… Tiens donc, mais ne serait-ce pas monsieur Nicolas Jules lui-même, en chair et en tignasse, venu nous offrir Notre ombre, le duo gravé sur l’album ? Chouette ! Il faudrait citer tous les excellents titres de ce set, et je sais bien, chers Enlecteurs, que vous avez vos paquets-cadeaux à envelopper et la dinde à fourrer (pauvre bête…), aussi aurais-je pitié de votre emploi du temps surchargé… Un mot encore sur cette très belle version des Epaves, savamment déstructurée et chavirante, dépouillée et saisissante. Un dernier morceau en forme de feu d’artifice, avec La ronde des fâchés : les bottines volent, et c’est bien campée, pieds-nus sur les planches, que Gaëlle, pas fâchée, lâche les fauves qui étaient sous le capot d’astres…

Une soirée forte et entière, de belles émotions partagées sans compter, sans artifices : ces demoiselles nous le prouvent avec brio et maestria, aujourd’hui, la chanson française bande encore, et de bien belle façon !

Et demain est un autre jour…

 

Le facebook de Garance c’est ici, ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là. Le site de Gaëlle Vignaux c’est ici, ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, c’est là.

http://www.dailymotion.com/video/x20nr1a
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8 Réponses à Les Filles du Canal : Garance / Gaëlle Vignaux

  1. Norbert Gabriel 18 décembre 2014 à 12 h 10 min

    On vérifie chaque jour ou presque que la femme qui chante est une bonne partie de l’avenir de la chanson… Tiens, ça me rappelle quelque chose… Julien Clerc ? Nicole Croisille?? Mireille Mathieu?? Michel Sardou ???

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    • Michel Kemper 18 décembre 2014 à 12 h 31 min

      « Et je n’suis pas bien sûr / Comme chante un certain / Qu’elle soit l’avenir de l’homme » C’est ça ? j’ai trouvé ? Alors c’est Jacques Brel (« La ville s’endormait », que je cite de mémoire). Je sens encore que je vais me faire rentrer dedans…

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      • Norbert Gabriel 18 décembre 2014 à 13 h 01 min

        D’autant que cette phrase « la femme est l’avenir de l’homme » a été trouvée sur des tablettes de Babylone qui ont bien 30 siècles… Aragon avait de bonnes lectures…

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  2. Danièle Sala 18 décembre 2014 à 13 h 24 min

    En tout cas, on s’en fiche pas mal de la dinde, ou tout autre volaille à fourrer, des paquets à faire, et …Mrd ! déjà midi ? Quand on lit Patrick et qu’on écoute ces deux filles là ! allez, qu’on remplisse le bar , c’est l’heure de l’apéro, et vive les filles qui sont l’avenir de la chanson .

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  3. catherine Laugier 20 décembre 2014 à 1 h 03 min

    La prose virile mais néanmoins fleurie de Patrick Engel nous donne bien envie d’aller écouter ces dames qui en ont sous les cheveux (de l’énergie et du talent).
    Mais pourquoi faut-il, alors que la chanson est féminine et qu’il s’agit de filles, nous dire qu’elle bande encore…C’est que messieurs et mesdames, il n’y a pas de terme pour désigner l’équivalent physiologique chez les dames, qui existe bel et bien pourtant. Que dire ? Qu’elle s’épanouit ? Qu’elle fleurit ? Qu’elle éclot, qu’elle se veloute, qu’elle foisonne ? Lançons un concours de mots ! Je n’en vois qu’un qui résume tout cela, mais il est anglais, to bloom !
    Alors, la chanson bloome ?

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    • Michel Kemper 20 décembre 2014 à 8 h 55 min

      Ah, heureux délices de la sémantique. Jusqu’à maintenant, je tenais pour vrai que Léon bloome. Mais la chanson…

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    • Danièle Sala 20 décembre 2014 à 10 h 15 min

      Oui, Catherine, mais si Patrick pensait à Lulu en écrivant ses articles, ce serait moins jubilatoire ! (sourire)

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    • Norbert Gabriel 20 décembre 2014 à 11 h 06 min

      Il y avait bien une chanson qui faisait « Bloom-Bloom tralala »

      Sur un brin de valse lente
      Ou des refrains plus légers
      Partout, des caves aux greniers,
      Tous les jours on chante dans mon quartier.
      Bloom-Bloom tralala, voilà c’qu’on chante
      … etc…

      De Francis Blanche et Rolf Marbot …

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