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Cyril Mokaiesh, du rouge au noir

cover-cyrilmokaiesh_clotureIl était, en 2011 sur son premier album, fier et rouge porte-drapeau ; il est, en ce nouvel opus (le quatrième) lanceur de slogans sur noirs panonceaux, comme les pavés d’une révolution avortée.

Des chansons poing levé, dont une en duo avec le camarade Lavilliers, où ils fustigent de concert La loi du marché : « On vous laisse la tribune les honneurs du pouvoir on vous laisse voler la victoire ». D’autres où la Rose s’est évanouie, où la fasciste blonde s’invite au débat (« Quelle promesse à tenir pour que demain ne dessine rien en bleu marine ? ») et un seul cri : rester libre, rester digne ! Puis, au-delà de sombres tableaux et de terribles envies d’espoir, s’invitent quelques paysages où une histoire d’amour s’enfuit, où la belle Ostende donne des envies de vagabondage, où on se promène à travers la vie, simplement…

Un très joli duo avec Elodie Frégé (Houleux) pose, encore, un regard sombre sur la marche du monde : « D’accord tout lasse et tout casse, d’accord on a perdu la trace, ok le temps nous assombrit… » Notre terre est houleuse, les certitudes s’estompent, le bateau ivre tangue. Il faut tenir la barre. On y croit !

La voix est douce et engageante, et de justes mélodies accompagnent et égrènent la vie, avec un regard d’ado furieux, d’amoureux nostalgique, de touriste égaré, de Doisneau photographe, d’adulte exaspéré, de papa Petit Prince, de citoyen angoissé, de poétique révolutionnaire, de copain en question…

RETOUR SUR "NAUFRAGÉS" Le disque remonte à il y a plus d'un an, en 2015. Revenons-y. Après deux albums solo séduisants mais criards de bout en bout, l'un agité de passion politique, l'autre secoué de passion amoureuse, Cyril Mokaiesh a semblé faire ses classes, ses gammes, donné des gages à tout amateur sincère de chanson. Et au passage commencer à apprendre à chanter la nuance, le ton plus juste même s'il reste souvent criant : non pas forcément la justesse dans la voix, mais celle de l'émotion. Naufragés est un disque d'hommages, de reprises. Dont on ne peut que saluer les choix : Jacques Debronckart et Allain Leprest (chacun par deux fois), Jehan, Bernard Dimey, Serge Reggiani, Mano Solo, Pierre Vassiliu, Philippe Léotard, Daniel Darc. Que des "naufragés" de la chanson, des marginaux de la rime, des cœurs saignants. Qui plus est des chansons restées dans l'ombre. Sauf peut-être celles de Leprest, mais en ce cas c'est l'Allain qui tout entier est resté dans l'obscurité des lumières, dans l'antichambre de la reconnaissance publique. C'est un piano-voix, dialogue entre un interprète et un pianiste, Giovanni Mirabassi (dont le nom est mis à égalité, même corps, même typo, avec le chanteur sur la pochette). Eux et une quintessence de paroliers par cette formule agréablement revisités. Les étals de disques sont plus réduits qu'autrefois et les CD ne restent pas bien longtemps à la vente. Si vous n'avez pas celui-là, si vous ne le trouvez pas chez votre fournisseur habituel, commandez-le : il a sa place dans chaque discothèque perso. C'est un témoignage beau et singulier où Mokaiesh dévoile son intime, analyse son ADN. Bon sang ne trompe pas. MICHEL KEMPER

RETOUR SUR « NAUFRAGÉS »
Le disque remonte à il y a moins de deux ans. Revenons-y. Après deux albums solo séduisants mais criards de bout en bout, l’un agité de passion politique, l’autre secoué de passion amoureuse, Cyril Mokaiesh a semblé faire ses classes, ses gammes, donné des gages à tout amateur sincère de chanson. Et au passage apprendre à chanter la nuance, le ton plus juste même s’il reste souvent criant : non pas forcément la justesse dans la voix, mais celle de l’émotion. Naufragés est un disque d’hommages, de reprises. Dont on ne peut que saluer les choix : Jacques Debronckart et Allain Leprest (chacun par deux fois), Jehan, Bernard Dimey, Serge Reggiani, Mano Solo, Pierre Vassiliu, Philippe Léotard, Daniel Darc. Que des « naufragés » de la chanson, des marginaux de la rime, des cœurs saignants. Qui plus est par des chansons restées dans l’ombre. Sauf peut-être celles de Leprest, mais en ce cas c’est l’Allain qui tout entier est resté dans la pénombre, l’antichambre de la reconnaissance publique.
C’est un piano-voix, dialogue entre un interprète et un pianiste, Giovanni Mirabassi (dont le nom est mis à égalité, même corps, même typo, avec le chanteur sur la pochette). Eux et cette quintessence de paroliers…
Les étals de disques sont plus réduits qu’autrefois et les CD ne restent pas bien longtemps à la vente. Si vous n’avez pas celui-là, si vous ne le trouvez pas chez votre fournisseur habituel, commandez-le : il a sa place dans chaque discothèque perso. C’est un témoignage beau et singulier où Mokaiesh dévoile son intime, analyse son ADN. Bon sang ne saurait mentir.
MICHEL KEMPER

Clôture fourmille de tant de regards, posés sur des angoisses, sur une situation politique alarmante, sur une époque de doutes et de révoltes, de solitude et de poésie. Et, malgré la gravité de certains sujets traités, de constats implacables, il en sort une impression de quiétude et de douceur, à l’écoute d’un album noir et blanc. Avec du rouge dedans et des pavés qui fusent : « Le capitalisme a tué l’existence en la privant de son humanité, seuls quelques bandits y trouvent leur compte en nous réglant le nôtre » et même « chez Lidl, le pack de bières a des pulsions suicidaires » ! Heureusement, au 32 de la rue Buffault, on va voir « si les gaufres au chocolat soignent tous les p’tits bleus que t’as ».

De révoltes en espoirs, de luttes en coups de cœur, de ballades en affront, Cyril Mokaiesh nous entraîne à travers la vie, « Une vie pour me connaître, pour te connaître, voir ce qui nous relie »… Et, ici, son talent nous relie.

 

Le site de Cyril Mokaiesh, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

 

 

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Une réponse à Cyril Mokaiesh, du rouge au noir

  1. Catherine Laugier 4 février 2017 à 17 h 19 min

    Bien d’accord avec l’analyse de Pierre, c’est une totale réussite que cet album où, sans jamais abandonner la façon directe d’exprimer ses révoltes sur le monde tel qu’il nous est fait, Mokaiesh mêle, tisse et retisse ses interrogations intimes. Ecoutez ce Seul qui commence en satire politique pour finir en chanson de rupture et d’autodérision : « Et comment ça « ta gueule »/ Avec ta chanson/ Tes violons » . Petites citations indirectes « Noir c’est noir / Y a plus d’histoire » (allusion au titre adapté par Georges Aber d’un hit anglo-saxon pour Johnny Hallyday dans l’album La génération perdue, il n’y a pas de coïncidence). Ou « C’est quoi cette histoire de vie qui défile sans qu’on puisse jamais l’arrêter » qui rappelle la chanson de Debronckart récemment interprétée, Ecoutez, vous ne m’écoutez pas.
    L’album est aussi une merveille musicalement, où le rock n’a jamais tant mérité son nom, par ce balancement puissant mêlé de chœurs lyriques, jusque dans les chansons les plus engagées « Reste et vibre / Pour la France (…) Pour que demain ne dessine / Rien en bleu marine ». Mokaiesh arrive à nous bercer, nous consoler tant dans ses chansons intimes (Blanc cassé, Une vie) que dans les chansons de plus tristes circonstances, telle Novembre à Paris. Il nous y fait dresser le poil sans appel à la haine, dans cette plainte, ce cri « Oh, qu’est-ce que c’est / Ce vol noir de corbeaux » , dans ce « Aux armes » qui n’est qu’un murmure. Pas de titre faible dans cet album que je ne me lasse pas de redécouvrir à chaque écoute.

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