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Ricet Barrier, faire vivre son savoir-vivre…

(photo François Bellart)

Laurent Malot, Delphine K et Michel Boutet au service de Ricet Barrier (photos François Bellart)

21 juin 2017, Forum Léo-Ferré, Ivry-sur-Seine,

 

Ricet Barrier fait partie de la cargaison de découvertes de la fin des années cinquante… Qu’on se rappelle, ils furent nombreux à cette époque à sortir leur premier « 45 tours » ou leur premier « 25 cm »… Il y avait foule pour solliciter un jeune porte-monnaie dégarni : Serge Gainsbourg, Guy Béart, bientôt suivis de Boby Lapointe, Anne Sylvestre, Claude Nougaro et quelques autres, venaient s’ajouter à Brel, Brassens, Bécaud pour assécher nos finances… Et ils nous ont tous tellement enthousiasmés qu’on n’a pas perdu une miette de leur trajectoire : leurs chansons ont ponctué les événements de notre vie et ils sont devenus, à leur corps défendant, d’irremplaçables complices. Lorsqu’ils sont partis, ils nous ont amputés d’une partie de nous-mêmes. Ricet Barrier fut de ceux-là avec son inénarrable Servante du château en 1958. Et quand, quelques 250 chansons plus tard, le 20 mai 2011, il s’est éclipsé au paradis rejoindre la place chauffée par Brel et Brassens pour les faire rigoler en racontant « les conneries qu’on voit en France », on a eu du mal à se marrer.

LeSavoirVivreDeRicetBarrierPhotoFrancoisBellart20Heureusement, sur les rayons d’une discothèque débordante, et avec son timbre de voix perché et nasal inimitable, il nous a laissé le trésor de ses chansons qui nous redonnent le sourire. Mais l’insidieux oubli guette et il faut à l’occasion un petit rappel au souvenir pour réactiver l’envie d’y retourner ! Bernard Keyruel l’a fait  avec son livre Le savoir-vivre de Ricet Barrier, et c’est ce que fait sur scène une petite bande de fidèles dans un spectacle éponyme, encore en création. Sur la scène du Forum Léo-Ferré, ils sont cinq : Laurent Malot et Delphine K au chant, Michel Boutet au chant et à la guitare, Franck Steckar au piano, à l’accordéon ou à la trompette, et Christophe Devillers à la contrebasse et au trombone à coulisse. Ils proposent une première mouture de leur spectacle après quatre jours de répétitions sous la houlette de Gérard Morel. Un Ricet Barrier nouveau est arrivé, avec ses textes et ses musiques reconnaissables dans de beaux arrangements originaux, mais une robe, un nez, un goût, une saveur, une longueur en bouche et un fruité différents et séduisants. D’abord, exit les titres paysans, qui l’ont un peu abusivement cantonné dans une veine populaire restrictive, place aux chansons poétiques, aux audaces et aux petites merveilles de construction. Ensuite, un regard, une mise en scène et en musique décapants, hauts en couleur, à des kilomètres du petit sucré-salé charmant que Ricet avec sa guitare ou son banjo nous proposait en concert. Enfin, un vrai spectacle, dans lequel les perles-chansons sont embrochées sur un fil rouge qui rappelle régulièrement sur tous les tons que « La vie à trois / C’est délicat / Mais quand ça réussit / Quelle belle vie ».

280 pages pour retrouver tant le bonhomme Ricet Barrier que tout une époque, avec le sens de l’anecdote, du superflu qui prend toute son importance, de la pécadille aussi précieuse qu’une judicieuse ponctuation… Voilà l’autre grand’œuvre de Bernard Keryhuel, qui fut jadis l’inspiré créateur des Chant’Appart. C’est un bouquin depuis longtemps entamé, longuement cogité, aux mots passés au trébuchet de l’amitié. On ne sait si ce livre trouvera un important public mais il fallait qu’il existe. Pour que, en plus de ses chansons consignées sur disque ou plus sûrement dans nos têtes et nos cœurs, on en sache plus et mieux sur le papa de Stanislas et l’employeur de La servante du château. Un très agréable ouvrage qui nous affranchit de beaucoup d’ignorances. Seul regret, le mode d’impression de l’éditeur ne rend pas justice aux photos reproduites au fil des pages de ce livre… Bernard Keryhuel, La savoir-vivre de Ricet Barrier, L’Harmattan 2016, 280 pages, 29 euros.

280 pages pour retrouver tant le bonhomme Ricet Barrier que toute une époque, avec le sens de l’anecdote, du superflu qui prend toute son importance, de la peccadille aussi précieuse qu’une judicieuse ponctuation… Voilà l’autre grand’œuvre de Bernard Keryhuel, qui fut jadis l’inspiré créateur des Chant’Appart. C’est un bouquin depuis longtemps entamé, longuement cogité, aux mots passés au trébuchet de l’amitié. On ne sait si ce livre trouvera un important public mais il fallait qu’il existe. Pour que, en plus de ses chansons consignées sur disque ou plus sûrement dans nos têtes et nos cœurs, on en sache plus et mieux sur le papa de Stanislas et employeur de La servante du château. Un très agréable ouvrage qui nous affranchit de beaucoup d’ignorances. Seul regret, le mode d’impression de l’éditeur ne rend pas justice aux photos reproduites au fil des pages de ce livre…
Bernard Keryhuel, Le savoir-vivre de Ricet Barrier, L’Harmattan 2016, 280 pages, 29 euros.

C’est sûr : dans l’écrin des musiciens, les trois chanteurs réussissent un « faire-vivre Ricet Barrier ». Nous savourons ces élégances rares du Puceron et l’orange, des Prisonniers de Verlaine ou de Belle qui tient ma vie a capella, en bis, avec Ricet s’inscrivant au dos de leurs feuilles de chorale. Nous rions de ces portraits empathiques qui étaient sa spécialité, La servante du château qui a le blues au propre comme au figuré, le beau mec (enfin, dans la chanson !) qui finit par épouser une aveugle, Stanislas qui se prend un râteau d’une autre facture que celui des Frères Jacques, la belle fille qui attend son prince charmant ou celui qui se laisse prendre au charme des poupées rétro. Nous admirons la double chute, la première concluant la chanson de façon attendue, et la seconde ouvrant toutes grandes les fenêtres de la réflexion métaphysique. Ainsi l’amoureux transi de la poissonnière « pêche dans les eaux troublantes / De l’incommunicabilité » ou l’amateur de pissenlits envisage le néant après la mort. Oui, tous les cinq, avec brio, avec leurs voix  « posées entre deux chaises« , font, Putain, le beau métier de baladins qui réactivent les chansons et font apprécier à nouveau toutes les richesses du répertoire extraordinaire de Ricet Barrier. Chapeau les artistes !

Ce spectacle est encore en construction, il y a des réglages à affiner pour équilibrer le son, quelques fissures de mémoire à colmater et encore quelques chansons à travailler qui viendraient s’ajouter à cette première quinzaine. Une seconde résidence de quatre jours serait nécessaire. Avis à tout festival désireux de faire vivre le répertoire et de proposer un spectacle original et brillant. Déjà, de celui-là, on sort avec des étoiles dans les yeux !

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