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Spa 2017. Michel Sardou, impérial, tout simplement

Michel Sardou (photo d'archives DR)

Michel Sardou (photo d’archives DR)

Francofolies de Spa, 20 juillet 2017.

 

Fiers qu’ils étaient, les organisateurs des Francos, d’avoir pu mettre à l’affiche de leur édition 2017 une immense star, qui plus est peu encline à courir les festivals. Une exclusivité et une ultime occasion aussi, puisque l’artiste a décidé (mais tiendra-t-il parole ?) de mettre un terme à sa carrière de chanteur pour ne plus se consacrer qu’au théâtre. D’où cette tournée d’au-revoir, intitulée La dernière danse.

L’artiste en question, vous l’avez deviné, c’est Michel Sardou. Et pour ses adieux à la chanson, il a mis les petits plats dans les grands et sorti la grosse artillerie : un orchestre de 31 musiciens (j’ai pas compté, mais ce devait être ça) pour l’accompagner, dans un dispositif scénique costaud (light-show très impressionnant, écran géant…). De quoi ravir tant les curieux de la dernière heure que ses admirateurs qui le suivent depuis toutes ces années.

A 21h30 précises débarque donc l’armada de musiciens affrétée pour l’occasion. Smoking pour les hommes, tailleur noir pour les femmes. Classieux. L’écran géant placé en fond de scène, qui accueillera durant le spectacle diverses projections illustrant les chansons, s’illumine alors d’un petit film rétrospectif de prestations télé vintage ou de pochettes de disques. La chanson de circonstance pour l’ouverture (Salut) débute des coulisses. La voix précède l’homme et quand celui-ci apparaît, la partie est gagnée.

Comment pourrait-il la perdre d’ailleurs ? Pendant une heure et demie, nous n’aurons droit qu’à des tubes, des succès, des scies, des indéboulonnables. Le répertoire de l’homme semble inépuisable en la matière : La java de Broadway, Les vieux mariés, Je vais t’aimer, Le France, La maladie d’amour, Je vole, Les lacs du Connemara… Tout cela sera à l’affiche et d’autres encore, un peu moins populaires sans être pour autant méconnues (Il était là, Io Domenico, Le bac G, L’an mil…). Et encore a-t-il fait l’impasse sur d’autres titres de gloire (pas de Villes de grande solitude, de Fille aux yeux clairs ou d’Accident, par ex.). Un juke-box en direct, qui très souvent se transforme en karaoké géant, forcément.

Bien sûr, les tenants de l’intimisme pourraient trouver à redire. Sardou est porté à la grandiloquence et quand il a un orchestre comme celui-là à sa disposition, il peut en profiter à plein. C’est parfois limite pompier (les chœurs sur Vladimir Illitch…), ça n’en est pas moins impressionnant et irrésistible. Tout en se permettant de sortir à l’occase des sentiers battus (Les ricains à la sauce New-Orleans, un Musulmanes aux relents africains, une reprise de l’Aigle noir en hommage à Barbara qui l’a conseillé à ses débuts…).

Sur scène, Sardou est conforme à son image. Le geste sobre et ne souriant que rarement. Sans en être dupe : ne nous a-t-il pas révélé sa méthode infaillible pour draguer, se mettre au bout du comptoir, faire la gueule et attendre que ça morde ??? Si le poids des ans se fait certes un peu sentir sur son physique (son élégant smoking a quelques difficultés à cacher son embonpoint), il en jouera avec complicité, comme lorsqu’il nous fait part, à force de mimiques, de ses difficultés à chanter aujourd’hui Femme des années 80, qui demande un souffle qu’il a un peu perdu dans le temps. Humour que tout cela : à 70 ans, la voix de l’artiste est intacte et d’une puissance qui force l’admiration.

On peut évidemment ne pas aimer Michel Sardou. Inutile de revenir sur les multiples polémiques qui ont émaillé sa longue carrière. On l’aura taxé de conservatisme, de misogynie, de racisme, de pousse-au-crime… Dans un milieu artistique porté sur la gauche (du moins en apparence), le caractère droitier et entier de l’artiste ne pouvait que lui valoir des inimitiés. A l’heure d’éteindre les lumières sur son activité de chanteur, il faudra bien un jour remettre les pendules à l’heure et le considérer pour ce qu’il est vraiment : un très grand professionnel, qui a su s’entourer des meilleurs pour se construire un répertoire solide comme un roc, ayant trouvé le chemin du cœur de millions de personnes. Assister à son concert permet de s’en rendre compte : qu’on le veuille ou non, nous connaissons par cœur les paroles de ses grands succès, comme un athée est capable de réciter le Notre-Père. Si ça ce n’est pas faire partie de la vie des gens ! Le reste n’est que bavardage…

 

Le site de Michel Sardou, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

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7 Réponses à Spa 2017. Michel Sardou, impérial, tout simplement

  1. marc gicquel 22 juillet 2017 à 16 h 41 min

    merci Pol pour ce papier, car, moi aussi, j’aime Sardou, je vx dire que j’apprécie son parcours artistique et j’emmerde les gendarmes de l’artistiquement correct de « gauche »

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  2. Etienne Goupil 22 juillet 2017 à 18 h 34 min

    En tant que musicien, j’ai pris un pied monstrueux à jouer par ex La java de broadway en orchestre et appris par là-même comment faire sonner et groover cette chanson ! Après il y a le Sardou professionnel ACI et l’opposition évidente entre deux ou trois idéologies qui peuvent nous séparer ! Le talent de ce mec est évident en deçà de ces murs (et donc sans commentaires injurieux, trop facile sur les réseaux-canapés).

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  3. Olivier Sol 22 juillet 2017 à 18 h 35 min

    Bel article. Pour ma part, j’ai réussi à ne plus détester Sardou à partir du dossier qui lui avait été consacré dans SCHNOCK, la revue des Vieux de 27 à 87 ans.

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  4. François Charpentier 22 juillet 2017 à 18 h 39 min

    Je n’ai jamais aimé Sardou. J’ai toujours vécu ses chansons comme le triomphe de la beauf-attitude, du machisme crasse, sans parler des opinions politiques, personnellement à l’opposé des miennes. Mais bon, on pourra juger du pire (surtout) et parfois du meilleur : La java de Broadway, c’était joli, j’avoue, c’était bien écrit, mais sa dernière apparition publique en télé me laisse à ma première impression. Souvent la bonne.
    « Il me laisse dire merde, je lui laisse dire amen » disait le poète :) Pour ma part, Sardou appartient pourtant à la mouvance esthétique musicale avec laquelle j’ai grandi entre autres, et que je continue à aimer. Pour le travail des arrangeurs, et aussi celui des auteurs et compositeurs. Après, c’est une question de personnage et de goût, de famille musicale aussi. A la maison, on écoutait Gérard Manset, Lavilliers, Higelin, Jonasz, et on regardait les variétés. Certaines nous dégoûtaient tant elles étaient tartes, et d’autres comme Sardou, étaient agressives à nos oreilles de gauchistes. On avait pas l’impression qu’il s’adressait à nous, mais plutôt contre nous. Pour ces raisons-là, j’ai du mal avec Sardou, encore aujourd’hui, je ne me reconnais pas en ces chansons. Enfin, sa voix, son interprétation sont exactement le contraire de ce qui me remue les tripes. C’est épidermique, mais c’est authentique.

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  5. Alain Jacquin 22 juillet 2017 à 18 h 42 min

    Sardou n’a jamais été un chanteur engagé comme certains le proclament mais ne bougent pas leur cul. Il fait des chansons, le public suit et ça emmerde des gens. Si vous n’aimez pas, n’écoutez pas.
    Et penser qu’il est raciste parce qu’il chante Le temps des colonies (écrite par qui ?) faut pas exagérer ! La seule qui me branche c’est Les villes de grande solitude ; pour le reste j’écoute du rock, du blues et beaucoup de chansons françaises

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  6. Yann Malau 13 mars 2018 à 9 h 33 min

    Sans jamais avoir été fan, j’a toujours pensé qu’on avait de la chance d’avoir de la variété de qualité avec Sardou, Delpech, Johnny et plein d’autres. Il a des ACI et producteurs qui lui sont fidèles depuis plus de 40 ans. Et j’aime son dernier album « Le choix du fou » et les très bon travail de Pierre Billon.
    Beau papier de Pol que j’avais lu et apprécié à sa sortie.

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  7. Michel Kemper 13 avril 2018 à 12 h 36 min

    Il a tenu parole.

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