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Loïc Lantoine : very très très bien !

Loïc Lantoine (photo non créditée tirée de sa page facebook)

Loïc Lantoine (photos non créditées tirées de sa page facebook)

27 septembre 2019, Centre culturel, salle Daquin, La Ricamarie,

 

La scène est peuplée d’instruments rutilants, plantée de micros. Patience : le protocole veut qu’un des jeunes talents vienne sur scène faire le beau, faire montre de son art, nous épater, nous appâter. De la fanfare à venir, il sera le seul en costume, galant à galons, ringard. Sérieux pour autant ce Capitaine Sax, qui nous appelle au devoir de mémoire en entonnant l’inénarrable : « La France a besoin d’un homme de courage, de résolution / Votons Jacques Chirac / En avant toute la Nation / Pour tous, Jacques Chirac président… » Vu qu’il est bon en hommage, il enchaîne sur l’idole : va pour Quelque chose en nous de Tennessee. Jamais deux sans trois : Capitaine Sax en déterre un autre, rien que par l’air des Lacs du Connemara : le Toubifri aime anticiper, avoir son train d’avance.

Voici l’orchestre qui s’installe, au grand complet : le Very Big Experimental Toubifri Orchestra, tenues insolites, bariolées. Dix-huit sur scène, dont deux tiers de cuivres. Et le greffon, greffé de poésie, le Pierrot t’chi, qui vient à nouveau mêler ses mots qui tintinnabulent au tintamarre de la fanfare : « Salut la compagnie, c’est la bande à bras cassés, qui n’a même pas de bras, mais qui chante à dents fêlées ! » La musique est folle, les mots sont fous : ils fêtent de concert leur logique hymen. « On joue les gars vivants / En mettant des notes aux vents […] On souffle des nuages / Pour y voir ce que l’on veut / On dit jamais dommage / Et on s’aime à qui mieux mieux. » se contente-t-il de commenter.

C’est du Lantoine démultiplié, un moteur à pistons, six cylindres en V, mais faut savoir ce qu’on vaut et ce qu’on veut : « Quand on veut décrocher les étoiles, on prend une grande échelle ».

Dans la salle, des fans du Lantoine, qui le suivent depuis bien deux décennies, lui qui a fait de Saint-Étienne un de ses repères d’amitié, un deuxième chez-lui. Des abonnés du Centre culturel qui ne le connaissent pas encore et des jeunes du quartier, public entre tous idéal.

Tiens, encore Johnny ! Une de ses grandes chansons, jadis crée à côté d’ici, salle Jeanne-d’Arc. Toujours extraordinaire, empathique, pertinente, plus encore depuis que l’idole s’est exilée à Saint-Barth : « Faut pas dire du mal de Johnny / Nny ! ». Et ce couplet qui, du drame à venir, avait tout deviné : « Qu’on me parle plus de ma fille Laura / Et mon héritage crois pas qu’elle l’aura / Elle aime pas le rock préfère Barbara… » Autre hommage encore, celui aux flûtes à bec qui, chaque année, se font massacrer dans les classes de CM2 : dix-huit flûtes pour musiquer Au clair de la lune, bravo !

23380252_1349611455151112_741792309042015571_nLa dernière fois, j’avais fait le reproche au Lantoine de bouffer ses mots, de n’en laisser rien comprendre, ou seulement par bribes. Là, tout est nickel, articulé ou peu s’en faut. C’est certes fort, mais ils sont foule à souffler dans leur piston, leur tromblon, leur cornet. Dans le creuset de leurs chaudes notes, en dot, les vers de Loïc, son franc parlé, son doux phrasé, ses mots venus de tout là-haut, du Nord, des chicons si blancs, des terrils qui s’accouplent ici avec ceux des crassiers, singulier et sincère cousinage : « On ronde en réunion / Pour parler d’une seule voix / Et nos petites bêtises / Nous sont de grands opéras ».

La chanson de Loïc Lantoine est comme confession : nous sommes dans l’intime du cœur, du corps, de ce qui rassemble les êtres : un fond de verre ou la contemplation des étoiles : « Quand je recompte mes défauts / Et les jours où je siffle faux / Quand j’me sens suant, sale, et seul / Avec la gueule de traviole / Y’a toujours mon copain Pierrot / Qui pose une main en haut d’min dos / Et qui me dit, dans un sourire… » De l’intime ici grossit par la tonitruance d’un orchestre atypique, très jazz dans le fond, pas forcément dans la forme. De l’intime où chaque soir, comme ici Salle Daquin, d’la poésie qui va à confesse, Lantoine prend à témoin un public gourmand, aussi sensible que lui, enclin à s’émouvoir. Et des sentiments : « On s’dit qu’on s’aime / C’est c’lui qui l’dit qui y est ». Ce que chante Loïc a ceci d’universel qu’il s’accorde tant avec les seules cordes d’une contrebasse qu’au contraire avec une assemblée de cuivres bien astiquées : « J’suis mauvais musicien / Mais j’aime l’harmonie / Je ne fous le bordel / Que chez les gens ravis ».

Ravis, c’est le mot exact, le juste prix. Après des tas d’enthousiastes rappels, en rafale, en rasade (« Vas-y patron, sers-moi un rêve… ») on sort les yeux et les oreilles gros comme ça, avec des étoiles nous aussi, et pis beaucoup de confettis. Avec rien que du bonheur. Lantoine en est fournisseur en gros et The Very big experimental Toubifi Orchestra (« mes-copains-que-j’en-suis-fier » dixit Lantoine) double ou décuple la dose.

 

Le facebook de Loïc Lantoine, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

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Une réponse à Loïc Lantoine : very très très bien !

  1. Franck Halimi 28 septembre 2019 à 15 h 35 min

    Oui, ce métissage des mots qui sonnent et des notes qui groovent enfante d’une œuvre originale, protéiforme et déjantée, qui nous enchante et nous élève.

    Et on n’oubliera jamais d’y associer l’instigateur visionnaire de cette folle aventure, le génial Grégoire Gensse…

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