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Le français sonne moins bien que l’anglais, disent-ils

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Laïus récurrent, on se plaint souvent que les chanteurs-compositeurs-interprètes hexagonaux préfèrent chanter dans la langue de Trump plutôt que dans la langue qui les a élevés (le français ?).

« L’anglais, ça sonne mieux », entend-on en effet. À ne pas négliger non plus les questions d’audience, car of course, une chanson en anglais va toucher plus de monde (mais est-ce bien vrai ? Quand on voit le succès de Zaz ou Stromae à l’étranger, je n’en mettrais pas ma main au feu).

Si l’hypothèse comme quoi l’anglais sonne mieux que le français n’a pas encore été vérifiée à ce jour ; ce qui est certain, c’est que, dans la chanson, les paroles ne sont pas que du texte, mais aussi du son. Mais alors, la chanson française serait-elle donc plus exigeante dans ses textes et inintéressante dans ses mélodies ? Claude Lemesle disait encore dans L’Art d’écrire une chanson (2010): « Les auteurs français sont moins habiles à faire sonner leur langue que leurs confrères étrangers – quand ils n’y répugnent pas. » Il est certain que si l’on ne s’y exerce pas, on ne risque pas de les sonner – les cloches, à notre chère langue.

Test ultime, je crois que le meilleur et unique recours est finalement de comparer des titres d’une langue source (anglais/français) à leur adaptation dans la langue cible (français/anglais). Ainsi, Quatre-vingt-quinze pour cent sonne-t-il mieux chez Pierre de Gaillande que chez Brassens ? Et Knocking on heaven’s door serait-il vraiment mieux chez Dylan que chez Lavilliers et Aufray ? Enfin, Grace Kelly de Mika est-il plus écoutable en anglais ou en français ?

Grandes questions, isn’t it. Pourquoi en effet ne pas trouver réponse à cette interrogation bien subjective dans l’entre-deux des langues, à savoir dans l’art de la traduction de chanson – autrement nommée adaptation ? Et je ne parle pas ici de sites comme La coccinelle… qui ne risquent pas de nous faire voir le français comme une langue qui sonne.

Non, venez fourrer plutôt votre nez et oreille chez le Tradapteur ! Si démontrer que le français peut tout aussi bien sonner que l’anglais n’est absolument pas son but ultime, celui-ci nous explique en un coup de cuillère à pot – et quelques tutos drôlement bien ficelés – que les deux langues ne disposent tout simplement pas des mêmes outils pour ce faire, grâce à un vrai décorticage des paramètres formels (métrique et rime, découpe, accent tonique, etc.). Non seulement, on y comprend mieux le talent de ceux et celles qui ont adapté des chansons d’une langue à l’autre, mais on y comprend mieux aussi le mécanisme d’une chanson et celui de notre beau français (et on y constate que la pop reste de la pop des deux côtés…).

Et, chose non négligeable, on s’oblige à replonger dans certaines adaptations à l’étranger de notre patrimoine francophone, comme La vie en rose par Louis Amstrong ou encore Amsterdam par Scott Walker et David Bowie, au plus grand bonheur de nos oreilles (j’ai moi-même un petit faible pour Belle en coréen). Alors la chanson franco, elle sonne si mal que ça pour qu’on l’adapte même en coréen ?

 

Le site du Tradapteur, c’est là ; pour en savoir plus sur la tradaptation, c’est ici. Sur le même sujet, lire « Je chante faux en français » sur NosEnchanteurs.

Un tuto de tradaptation : Image de prévisualisation YouTube

Et son résultat, « Chandelier » : Image de prévisualisation YouTube

2 Réponses à Le français sonne moins bien que l’anglais, disent-ils

  1. Patrice Caumon 26 novembre 2021 à 1 h 35 min

    Cher Michel, je me permets d’ajouter mon point de vue dans ce débat.
    Alors, oui, la langue française est plus difficile à manier, notamment à cause de ce satané e muet !
    Si notre vers se termine par un e muet, sur le mot table, par exemple, on risque de devoir appuyer celui-ci « sur la tableuuu », et c’est plutôt vilain… Alors qu’en anglais, ce sera une syllabe forte « on ze taybeuuul ».
    La syntaxe est aussi plus coûteuse en mots dans la langue de Molière qu’en anglais. Par exemple, nos « que » peuvent être un peu lourds, à force.
    Il y a aussi l’accent tonique, on peut choisir les temps forts de la langue sur les temps forts de la diction chantée (Brassens est un maître absolu sur ce point), ou pas (un exercice moins facile qu’il n’y parait).
    Enfin, notre langue est peu chantante (à vérifier sur un piano, entre le québécois et le français, c’est évident). Les espagnols, quand ils nous imitent, nous le montrent très bien, ils font un truc dans ce genre, tout droit, sans chant : « ahquelejepeuje, olala, quepeuje, etc », – ce qui sonnerait mieux à l’oral, bien sûr !
    Amitiés du 47

    Répondre
  2. JEAN HUMENRY 26 novembre 2021 à 15 h 22 min

    Et s’il suffisait d’écrire …
    Et non pas de vouloir être à la mode
    Ne pas singer
    Ne pas faire comme certains qui se donnent un genre
    Et s’il suffisait avec nos mots de partager des vies, des émotions.

    Répondre

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