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Barjac 2018. Les élucubrations de Lantoine

Loïc Lantoine à Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

Loïc Lantoine à Barjac (photos Anne-Marie Panigada)

28 juillet 2018, Esplanade Jean-Ferrat à Barjac,

 

Eric Frasiak en ouverture de Barjac, ça ne peut que faire l’unanimité. Quant à Loïc Lantoine… Faut-il que le public de ce festival ait à ce point changé pour réserver un tel accueil à ce toujours et plus que jamais trublion de la chanson, de cette « chanson pas chantée » comme Loïc le disait lui-même naguère, et qui n’a guère changé ? Si ce n’est que, toute musicale qu’elle était, par sa voix même rugueuse, sa poésie décalée et je ne sais quoi en suspension dedans, elle a gagné en instruments. Considérablement. Ce n’est plus la contrebasse déjantée de François Pierron mais, là, dix-huit musiciens dont plus de la moitié faisant dans les cuivres : The Very Big Experimental Toubifri Orchestra. Ça dépote, ça récure, ça régénère nos neurones. C’est étonnant, détonnant.

Ça vous dit déjà que la scène de ce château, qu’on croyait grande, eh ben elle est toute petite. Que nos musiciens, tous habillés, costumés, déguisés pas pareils, ont bien du mal à y entrer, si ce n’est au chausse-pied. Qu’on n’élira pas la plus belle tenue, la plus folle ; on se dira seulement qu’il est loin le temps où les musiciens des fanfares étaient tous habillés d’un même uniforme (les valeurs se perdent !), comme celui qui, en début du concert, nous est venu en éclaireur, costume digne d’un militaire soviétique sans les médailles, pour nous chanter, nous souffler des ritournelles ici impies : du Hallyday, du Sardou… Déjà de la provocation.

0c LL 0162Lantoine invite son orchestre improbable à voir ce qu’est un public de bonne chanson française. Lui-même en fait, et c’est là, seulement là, que le public de Barjac pourrait objecter. La chanson est certes bonne, mieux même (quand il chante Pierrot, nous sommes au sommet de la poésie ou je n’y entends rien) mais difficile à comprendre et ce n’est pas faute à la sono. Lantoine fait souvent dans la sonorité, le grognement, l’à peu près, n’a pas particulièrement le souci de bien articuler, ou alors il a un abcès dans la bouche, toujours est-il que… Quand il chante cette monumentale éloge de Johnny (encore lui !), ce Nny, on aimerait bien entendre ses arguments saillants. Ça et le reste de ses chansons pas vraiment chantées. Dommage. Il n’est pas sûr que ça donne envie, après coup, de se faire sur Youtube une séance de rattrapage pour qui n’aurait pas tout à fait tout compris.

Bon, il y a Lantoine, qui élucubre mais, cause à qu’on ne comprend pas tout, a du mal à nous emmener avec lui dans sa poésie, son délire. Et ces dix-huit autres, musique au cordeau, à l’unisson, instruments ou musique corporelle, d’un rappel ahurissant et beau, d’une ivresse qui ne doit à rien d’autre qu’à l’aventure collective d’une fanfare sans tabou. Un spectacle idéal à Barjac, au sens qu’il bouge les lignes, qui « tue les bisons en short » comme se plait à le dire Lantoine. Chapeau, dirait Frasiak ! Rien que ça peut et doit emporter l’estime. Et tenir cette soirée comme un grand moment de Barjac. Parce que, qu’on le veuille ou non, ça l’a été.

 

Le site de Loïc Lantoine, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

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Une réponse à Barjac 2018. Les élucubrations de Lantoine

  1. Franck Halimi 1 août 2018 à 11 h 59 min

    Oui, cette soirée fut exceptionnelle à plus d’un titre.
    - Parce que la poésie de Loïc Lantoine est celle d’un cheval fou, qui n’en finit pas de ruer aux étoiles quand on croit qu’il agonise.
    - Parce que la musique du Very Big Experimental Toubifri Orchestra est d’une précision de chirurgie vasculaire, que ces vassaux sans gain parviennent à distiller et à instiller avec un tel bonheur échevelé et taquin qu’ils emportent tout avec eux.
    - Parce que l’idée de Grégoire Gensse (génial musicien fondateur du Very Big, disparu il y a 2 ans) de réunir ces 2 entités atypiques est d’une impensable justesse.
    - Parce que cette réunion -devenue union libre et consentie- donne au drôle de chant qui en (dé)coule dans nos (dé)veines une énergie folle, source de bien des émotions.
    - Parce que ces 19 humains-là n’oublient jamais d’incarner ce en quoi Grégoire Gensse croyait plus que tout (et qu’il avait ressenti et compris à Bali) : l’intérêt d’impliquer différents talents et des singularités multiples en un unique corps collectif.
    Pour faire de tous ces éléments a priori hétéroclites un patchwork harmonieux, créatif et libre.
    EXCEPTIONNEL !

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