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Le petit lit derrière le débit de Boby

Boby Lapointe devant Le Cheval d'or en 1958. On remarquera le nom des artistes figurant alors au programme de ce cabaret, tels Roger Riffard ou Ricet-Barrier (photo DR)

C’est l’histoire d’un gamin dont la maison rétrécit à mesure que la chanson prend de la voix et gagne en public. Nous sommes au cabaret Le Cheval d’Or, dans le quartier Mouffetard, Paris des années soixante, épicentre s’il en est de la chanson rive-gauche, de ses cabarets. Les parents Tcherniak dirigent celui-ci qu’ils réaménagent régulièrement, pour l’adapter aux techniques de la scène, pour gagner en jauge. Tant que l’appartement contigu ne cesse de rétrécir. Une fine paroi sépare la minuscule chambre du petit Gilles de la scène. Et chaque soir il s’endort juste derrière Boby Lapointe, Ricet Barrier ou Anne Sylvestre… Pour faire et parfaire une éducation, il n’y a guère plus original et pertinent. Les parents, eux, attendent en toute fin de soirée le départ du public puis des artistes pour installer leur sommier sur la scène, y tendre les draps pour mieux s’y endormir en artistes qu’ils sont aussi, au moins dans l’âme. Derrière la scène est ce récit de vie, haut en couleurs, cette « tranche de scène » comme dirait Nadot, cette part de rive-gauche qui nous amena tant d’artistes. C’est le regard d’un enfant, qui devient adolescent, puis militant durant la guerre d’Algérie, avant de faire des tas de boulots tels qu’éducateur, restaurateur, agent immobilier ou détective privé. Et boxeur, en amateur. Témoignage sincère, vivant, qui vient rejoindre la somme d’ouvrages sur Mouffetard, qui en écrivent l’histoire. A la différence près du « je ». Ce n’est pas un historien ou un journaliste qui écrit, là, mais bien un de ses acteurs privilégiés qui consigne ses aventures, son émotion, l’oeuvre de ses parents et son parcours. Comme jadis le livre de Georges Bilbille sur La Mouff’, la plume est à l’unisson du palpitant. Ce livre, Derrière la scène (les chansons de la vie), est paru en 2008 chez L’Harmattan, dans la Collection « Graveurs de mémoire ».
Si je parle ici de Gilles Tcherniak, c’est aussi pour parler de ce charmant ouvrage, fac-similé du recueil des premières chansons de Boby Lapointe, Les 12 chants d’1 imbécile heureux, publié par Ticha Lapointe (fille de) et Gilles Tcherniak pour le compte de l’association « Eh ! dis Boby ». Boby se lit aussi sûrement qu’il s’écoute et se chante. Et ce petit opuscule est trésor pour l’amateur qui y puisera des vers encore luisants d’incongruité fruitée.

Derrière la scène, éditions L’Harmattan, c’est ici ; pour commander le livret « Les 12 chants d’1 imbécile heureux » (5 euros + frais de port), s’adresser à : au-pays-de-boby@orange.fr – le site internet de l’association « Eh ! dis Boby » c’est là.

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4 Réponses à Le petit lit derrière le débit de Boby

  1. Norbert Gabriel 10 février 2012 à 8 h 37 min

    En plus de l’histoire personnelle et passionnante de Gilles Tcherniak et de Marcelle et Léon, ses parents, « Derrière la scène » montre comment ce cabaret avait une réelle exigence en matière de programmation et de respect des artistes qui étaient invités. Un vrai bon livre de témoignage.

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  2. Papa Momo 10 février 2012 à 11 h 38 min

    Bon souvenir pour moi qui ai chanté là-bas une quinzaine de jours en 66. C’est Roger Riffard qui m’avait encouragé à venir passer une audition. Gilles est un ami, fidèle supporter de notre festival Poèmélodies. J’ai fait un petit film lors de l’inauguration de la plaque commémorative du Cheval d’Or. Vous y reconnaîtrez pas mal d’artistes et entendrez le discours de Gilles Tcherniak.
    http://www.youtube.com/watch?v=rnuQHkGx8fE&feature=mfu_in_order&list=UL

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  3. FESTIV'ART 12 février 2012 à 22 h 01 min

    Une façon encore de rappeler l’importance de ces »petits lieux « dédiés à la chanson…au fond, mon cher Papamomo nos deux festivals en sont de dignes descendants, ne crois-tu pas ? Grâce à toi j’ai lu ce livre et connu son auteur… c’est ça le monde de la chanson : un cercle d’amis qui se passent des adresses, des noms … J’aime !

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    • Papa Momo 12 février 2012 à 23 h 51 min

      Et grâce à toi ma chère Claude j’ai découvert et programmé l’espiègle Claire Danlalune, les déjantés Zorozora, le charmant Olivier Gil et cette année le surréaliste duo Strange Enquête. Vu sous cet angle tu as tout à fait raison.

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